Réparations en faveur de Kiev : l'assemblée de l'ONU adopte une résolution occidentale
Les «réparations» en faveur de Kiev étaient à l'ordre du jour de l'Assemblée générale des Nations unies. Celle-ci a voté une résolution contre la Russie, mais qui pourrait se retourner contre l'Occident, a fait valoir la représentation russe.
«Les co-auteurs ne peuvent manquer de réaliser que l'adoption d'une telle résolution entraînera des conséquences qui peuvent se retourner contre eux», a prévenu Vassily Nebenzya, le représentant permanent de la Russie à l'ONU.
Coparrainée par le Canada, le Guatemala, les Pays-Bas et l'Ukraine, la résolution tenant la Russie pour responsable d'une violation du droit international contre l'Ukraine, notamment par le paiement de réparations, a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies ce 14 novembre.
«L’Ukraine fait face au défi titanesque de se relever après cette guerre. L’heure est venue d’exiger de la Russie qu’elle rende des comptes», a martelé à la tribune Sergiy Kyslytsya, le représentant de l'Ukraine.
Sur les 181 électeurs, 94 États ont voté en faveur de la résolution, moins que les 143 pour condamner les «annexions illégales» de la Russie le 12 octobre. 14 pays s'y sont opposés, dont la Chine, la Biélorussie, la Corée du Nord, l'Iran et la Syrie, et 73 pays se sont abstenus de voter, parmi lesquels l'Inde, l'Egypte, l'Arménie, l'Algérie ou encore l'Arabie saoudite et Israël. «Plus de la moitié des [193] membres n’ont pas soutenu le projet de résolution promu par les Occidentaux. Et ce, malgré la pression, le chantage, la volonté de leur tordre le bras», a voulu relativiser le représentant adjoint de la Russie, Dmitri Poliansky, sur Telegram.
L'Erythrée, porte-voix des non-alignés
La résolution, qui n'est pas juridiquement contraignante, (contrairement à celles du Conseil de sécurité), recommande aux Etats membres de l'Assemblée générale d'établir «un mécanisme international aux fins de la réparation des dommages, pertes ou préjudices résultant des faits internationalement illicites commis par la Fédération de Russie en Ukraine». Elle invite aussi les mêmes membres à tenir un «registre international» contenant les réclamations sur les dommages, les pertes ou les préjudices causés à l'Ukraine par la Russie.
C'est l'Erythrée, par la voix de sa représentante Sophia Tesfamariam, qui a exprimé l'opinion des pays contestataires ou neutres, parmi lesquels Cuba, la Chine, la Corée du Nord, l'Iran, le Nicaragua ou la Syrie.
«L’Assemblée générale n’est pas un organe judiciaire», compétent en matière de réparation, a-t-elle aussi fait valoir. Craignant de surcroît «un dangereux précédent» qui verrait l'institution «donner sa bénédiction à un organe de réparation» qui n'aura pas à lui rendre de comptes, l'ambassadeur d'Erythrée n'a pas manqué de rappeler que les «puissances coloniales» avaient «infligé d’énormes dégâts et souffrances aux pays en développement». Dans une critique à peine voilée à l'encontre des mêmes puissances, Sophia Tesfamariam a tancé «l’ingérence extérieure» qui mériterait également «le droit au recours et à la justice dans des procédures juridiques».
«Les pays membres ne devraient pas être forcés de prendre parti dans ce conflit. L’Assemblée générale devrait se garder de toute tentative d’imposer une mentalité de guerre froide», a conclu la diplomate.
Parmi les plus critiques de la résolution, on retrouve la République arabe syrienne. Son représentant, Bassam Sabbagh, a avancé que l'Assemblée générale de l'ONU «devrait s’abstenir de toute initiative susceptible d’empêcher tout règlement pacifique du conflit». «Il est évident que les pays occidentaux [tentent de] semer la division au sein de l’ONU afin de creuser encore les dissensions entre les Etats», a-t-il asséné.
L'Assemblée générale de l'ONU, une instance judiciaire ?
Geng Shuang, le représentant adjoint de la Chine, a quant à lui admis que « le recours juridique et la réparation» pourraient être «des moyens de parvenir à la justice après un conflit». D'autant plus que la Chine a essuyé «de lourdes pertes dans l’histoire récente», a-t-il déclaré. Avant de poursuivre : «Nous éprouvons de la compassion face aux souffrances [du peuple ukrainien].»
«Malheureusement, le projet de résolution présenté contient des lacunes flagrantes et ne correspond pas à nos principes », a-t-il enchaîné. «L’Assemblée générale [de l'ONU] n’est pas un organe judiciaire international et n’a nul droit de définir qui doit être tenu responsable», a-t-il taclé, appelant pour conclure à une résolution rapide du conflit ukrainien.
Zelensky euphorique
«De la libération de Kherson à la victoire diplomatique à New York - l'Assemblée générale des Nations unies vient de donner son feu vert à la création d'un mécanisme de réparations par la Russie des crimes commis en Ukraine», a déclaré Volodymyr Zelensky sur Twitter. «L'agresseur va payer pour ce qu'il a fait!», a-t-il ajouté.
«L'ONU devrait adopter une résolution sur l'indemnisation américaine des dommages causés à la Corée, au Vietnam, à la Yougoslavie et aux autres pays touchés», a réagi sur Telegram Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie.