«Poutine dit qu'il ne bluffe pas avec la menace nucléaire. Il doit alors comprendre que les pays qui soutiennent l'Ukraine, l'Union européenne et ses Etats membres, les Etats-Unis et l'OTAN, ne bluffent pas non plus. Toute attaque nucléaire contre l'Ukraine entraînera une réponse, pas une réponse nucléaire, mais une réponse militaire si puissante que l'armée russe sera anéantie», a déclaré ce 13 octobre le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Josep Borrell.
S'exprimant ce jour devant le collège d'Europe à Bruges, celui qui est également le vice-président de la Commission européenne assure désormais que dans le cas où l'armée russe recourrait à des armes nucléaires contre l'Ukraine, «cela aura[it] de graves conséquences».
Les circonstances dans lesquelles l'OTAN pourrait avoir à utiliser des armes nucléaires sont extrêmement éloignées
«La Russie le sait [...]. Nous n'entrerons pas dans les détails de notre réponse, mais bien sûr cela changera fondamentalement la nature du conflit. Toute utilisation d'armes nucléaires, même une petite arme, aura des conséquences et la Russie le sait», a abondé en ce sens le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, qui a toutefois précisé que «les circonstances dans lesquelles l'OTAN pourrait avoir à utiliser des armes nucléaires [étaient] extrêmement éloignées». «Une attaque contre les alliés de l'OTAN et dans ce cas, l'article 5 sera bien sûr déclenché. Mais en ce qui concerne l'Ukraine, l'OTAN n'est pas partie au conflit», a en outre expliqué le chef de l'Alliance atlantique, écartant implicitement le recours des alliés à l'arme nucléaire pour leur riposte.
La position OTANienne fait écho à des propos tenus la veille par Emmanuel Macron à ce sujet, lors d'un entretien accordé à la télévision publique française. Interrogé sur une éventuelle frappe nucléaire tactique russe en Ukraine, le président de la République avait affirmé que cela n’appellerait pas une réponse nucléaire de la France. «Ce n’est pas notre doctrine», avait-il souligné.
Opposition de l'UE à précipiter la fin du conflit
L'ancien président russe Dmitri Medvedev, aujourd'hui numéro 2 du Conseil de sécurité de son pays, a assuré que Moscou défendrait les régions récemment rattachées à la Russie «y compris avec les armes nucléaires stratégiques». Le 27 septembre, il a ainsi déclaré sur sa chaîne Telegram que «la Russie a[vait] le droit d'utiliser l'arme nucléaire si nécessaire, dans des cas prédéterminés». Et le haut responsable russe de préciser : «Si une attaque est menée contre nous ou nos alliés avec l’utilisation de ce type d'arme. Ou si, dans le cadre d'une agression avec l'utilisation d'armes conventionnelles, l'existence même de notre Etat est menacée». «Si la menace contre la Russie dépasse une certaine limite de danger, nous devrons réagir. Ce n'est certainement pas du bluff», avait enfin résumé Medvedev.
Si la perspective d'une escalade nucléaire dans le cadre du conflit en Ukraine est aujourd'hui amplement commentée, il faut rappeler qu'à la mi-septembre, le chef de la diplomatie européenne semblait hostile à une fin abrupte du conflit. Josep Borrell déplorait en effet que certains Européens souhaitent précipiter la fin de la guerre en stoppant l'aide de l'UE à Kiev, du fait de son coût important pour les sociétés européennes. Il avait alors dénoncé «une mentalité» qui devait «être dépassée».
Quelques jours plus tard, lors d'un déplacement aux Etats-Unis, la présidente de la Commission européenne avait exprimé, elle aussi, son opposition aux appels à un cessez-le-feu en Ukraine, en faisant valoir que les enjeux du conflit dépassaient la seule cause ukrainienne.