Dans un communiqué mis en ligne le 6 octobre, le ministère russe des Affaires étrangères a vivement critiqué le fait que plusieurs médias français aient partagé des contenus imputant à la Russie une surenchère en matière de menace nucléaire.
Des spéculations qui «dépassent l'absurde» a affirmé le ministère russe, prenant par exemple le cas du crédit qu'a récemment accordé un journaliste vedette de LCI à des informations tirées d'un rapport de l'OTAN, selon lesquelles le président russe aurait l'«intention d'utiliser des armes de destruction massive en organisant un essai nucléaire aux frontières de l'Ukraine».
La diplomatie russe a également dénoncé avec fermeté l'allégation de BFMTV, qui évoque la potentielle présence d'armes nucléaires à bord d'un train ayant récemment traversé la Russie en direction de la frontière avec l'Ukraine. «A en juger par la nature de la discussion "experte" qui a suivi, la thèse du "chantage nucléaire" s'impose de plus en plus dans l'arsenal des médias français comme un outil sûr pour attirer l'attention des spectateurs», a déclaré le ministère russe, qui reproche également à la chaîne BFMTV de donner «la plus grande publicité possible» à ce qu'elle qualifie de «fake» sur ce «train nucléaire», en référence à une séquence mise en ligne le 4 octobre par la chaîne d'information en continu, intitulée : «Russie : un convoi ferroviaire appartenant à une unité chargée des déplacements nucléaires interroge.»
Seuls les Etats-Unis ont à ce jour utilisé des armes nucléaires contre des populations civiles, rappelle la Russie
Concernant ce passage, la diplomatie russe se rassure toutefois du fait qu'une spécialiste de la dissuasion nucléaire ait alors «coupé court» aux spéculations à ce propos, en pointant «l'impossibilité de transporter des charges nucléaires par chemin de fer, ce qui s'explique par des raisons élémentaires de sécurité».
Une intox mal orchestrée
«On voudrait rappeler aux "analystes" français que les informations sur les projets de la Russie d'utiliser l’arme nucléaire sur le territoire de l'Etat voisin ne peuvent être considérées que comme une intox mal orchestrée. La Russie ne prévoit pas d'utiliser l’arme nucléaire tactique sur le territoire des Etats voisins», assure à ce stade la diplomatie russe. Celle-ci souligne par ailleurs que Moscou s'est exprimée de façon officielle à plusieurs reprises sur le sujet.
Enfin, le ministère conclut son texte en rappelant que seuls les Etats-Unis ont à ce jour utilisé des armes nucléaires contre des populations civiles, se référant ici aux bombardements des villes japonaises d'Hiroshima et de Nagasaki en 1945.
Quelle est la doctrine nucléaire de la Russie ?
La publication de ce communiqué russe survient alors que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé l’OTAN à mener des «frappes préventives» contre la Russie. Des propos en réaction desquels le Kremlin a dénoncé un «appel à déclencher une guerre mondiale». Depuis, Kiev temporise.
Si les intentions présumées de la Russie en ce qui concerne le recours à son arsenal nucléaire ont bénéficié ces derniers mois d'une attention accrue au sein du paysage médiatique occidental, Moscou à plusieurs reprises, a fait valoir sa doctrine en la matière.
Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, déclarait ainsi le 27 septembre sur sa chaîne Telegram que «la Russie a le droit d'utiliser l'arme nucléaire si nécessaire, dans des cas prédéterminés». Et l'ancien dirigeant de l'Etat russe de préciser : «Si une attaque est menée contre nous ou nos alliés avec l’utilisation de ce type d'arme. Ou si, dans le cadre d'une agression avec l'utilisation d'armes conventionnelles, l'existence même de notre Etat est menacée».
«Si la menace contre la Russie dépasse une certaine limite de danger, nous devrons réagir. Ce n'est certainement pas du bluff», a enfin résumé Medvedev, tandis que l'Occident voit dans de tels propos une provocation russe au «chantage nucléaire».