Une histoire sans fin ? Les problèmes liés à la consommation de crack dans le nord-est de Paris semblent insolubles, en dépit d'une opération de nettoyage du square de la Porte de la Villette menée le 24 janvier au matin sur ordre de la préfecture de police de Paris. Une opération qu'elle a décidée «seule», a commenté Anne Souyris, adjointe en charge de la santé publique à la mairie de Paris, précisant sur Twitter ne pas se résoudre «à la destruction d'abris de fortune en plein grand froid sans hébergement accompagné, malgré notre demande persistante».
Accompagnées par des pelleteuses, les forces de l'ordre sont intervenues pour démanteler le camp de fortune, qui comptait une quarantaine de baraquements érigés sur le square par les toxicomanes, expulsés quatre mois plus tôt du quartier des jardins d’Eole, à la frontière des XVIIIe et XIXe arrondissements. Or, a constaté un journaliste de RT France présent dans le quartier porte de la Villette, les consommateurs se sont réinstallés sur les lieux dès le 24 janvier au soir.
«Depuis mi-décembre, les opérations de ménage, comme il y en avait trois fois par semaine, étaient arrêtées. Elles ont repris aujourd'hui pour éviter que des constructions en dur et le trafic s’installent», avait précisé la préfecture à l'AFP, indiquant qu'il ne s'agissait pas d'une opération d'«évacuation».
«Quatre mois que la République se déshonore. Quatre mois de mépris», dénonce la maire d'Aubervilliers
Le 24 janvier également, des habitants de Pantin, regroupés notamment dans les collectifs «93 Anti-Crack» et «Villette Village», sont venus déposer des bougies devant le mur érigé en septembre 2021 entre Pantin et la capitale, qualifié de «mur de la honte». Il s'agissait, selon les organisateurs, de fêter le «non anniversaire» de l’installation du camp de consommateurs de crack depuis quatre mois. «Cela fait 4 mois que nous demandons à l’Etat la prise en charge médicale, sanitaire et sociale des personnes souffrant de toxicomanie [...]. 4 mois que nous demandons des actions concrètes. 4 mois que la République se déshonore. 4 mois de mépris», a commenté la maire d'Aubervilliers, Karine Franclet (UDI), également vice-présidente de la Plaine commune, qui regroupe neuf villes du nord de Paris. L'édile avait déjà lancé, avec deux élus socialistes, une pétition en décembre 2021 pour interpeller directement Emmanuel Macron sur ce sujet.
Le dossier des consommateurs de crack suscite des mécontentements et des tensions depuis des mois, plusieurs manifestations ayant été organisées par des riverains pour dénoncer l'insécurité et l'insalubrité qui règnent dans les zones fréquentées par les toxicomanes. La réponse – ou plutôt l'absence de réponse – des pouvoirs publics est vivement critiquée : «Ils ne nous répondent pas», avait estimé sur RT France Stéphanie Benoist, présidente de l'association de riverains Village-4-chemins, jugeant «le stade de l'urgence largement dépassé».
Dans un courrier adressé le 24 janvier à la maire de la capitale – et candidate à la présidentielle – Anne Hidalgo, le préfet de police de Paris a reconnu que la situation ne pouvait avoir «vocation à se pérenniser». Faute d'information sur les solutions alternatives prônées par la mairie, Didier Lallement a annoncé «chercher un terrain qui ne relève pas de l'espace public», et qui, «éloigné de tout quartier résidentiel», permettrait d'accueillir les toxicomanes, charge à la ville de s'occuper de leur accompagnement médico-social.
La mairie de Paris avait présenté en août 2021 un plan pour lutter contre la crise du crack, dont la solution controversée visant à créer de nouvelles salles de consommation, mais les emplacements de celles-ci se font attendre, notamment en raison de l'opposition de certains élus socialistes d'arrondissement, rapporte Le Parisien. Selon Rachida Dati, maire Les Républicains du VIIe arrondissement, cette lenteur dans la mise en œuvre du plan montre qu'Anne Hidalgo est «prise au piège de son irresponsabilité démagogique aux dépens des Parisiens et des malades».