France

Meeting de Villepinte : pour Jean-Luc Mélenchon, «interdire Eric Zemmour est une mauvaise idée»

Réagissant à l'initiative du président de la Seine-Saint-Denis visant à empêcher la tenue du meeting d'Eric Zemmour prévu à Villepinte le 5 décembre, Jean-Luc Mélenchon a jugé, sur BFMTV, cette méthode contraire aux principes démocratiques.

«Interdire Eric Zemmour est une mauvaise idée», a affirmé le chef de file de La France insoumise sur BFMTV le 3 décembre. Il réagissait à la nouvelle polémique autour de l'éditorialiste, désormais candidat officiel, qui a prévu de tenir un premier meeting de campagne au parc des expositions de Villepinte le 5 décembre, après avoir renoncé à l'organiser dans la capitale.

Mais le président socialiste de la région Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, s'y oppose et a lancé, le 2 décembre, une pétition (qui aurait recueilli 2 000 signatures) et un site pour contrer le «symbole révoltant» que représente selon lui le meeting d'Eric Zemmour, qualifié de «fossoyeur de la République». Selon Stéphane Troussel, l'entreprise propriétaire du parc, Viparis, a signé en 2009 une charte de la diversité en entreprise. Des engagements «absolument incompatibles avec l'accueil d'un polémiste qui [...] conduit aujourd'hui une campagne dont le seul fondement est le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme, la haine des musulman.e.s.», avait-il affirmé. Soutien d'Anne Hidalgo, l'élu a justifié sa pétition par le fait de vouloir «interpeller une entreprise», et précisé qu'il n'avait pas «vocation à interdire le meeting d'Eric Zemmour». 

«Le principe de la démocratie est aussi d’écouter ce qui vous déplaît»

Une démarche condamnée par Jean-Luc Mélenchon, pour qui ce n’est pas en «interdisant un meeting qu’on fait reculer des idées». Rappelant que «le principe de la démocratie est aussi d’écouter ce qui vous déplaît», il s'est interrogé sur les motivations de Stéphane Troussel : «Si c’est à cause des opinions de monsieur Zemmour, il a tort», a-t-il argumenté, remarquant que seul «un risque de trouble à l’ordre public» peut justifier l'interdiction d'une réunion.

La position du candidat de gauche ne fait pas l'unanimité au sein de son propre camp : Clémentine Autain, députée LFI de Seine-Saint-Denis, a elle aussi demandé l'annulation de cette réunion publique, en adressant une lettre à l'entreprise Viparis et en faisant référence, comme Stéphane Troussel, à la charte signée par la société. La venue d'Eric Zemmour en Seine-Saint-Denis est, selon l'élue, «une insulte supplémentaire faite à ses habitants, cibles privilégiées de ses discours xénophobes et pétris de mépris de classe», rappelant que le candidat avait qualifié le département d'«enclave étrangère».

Jean-Luc Mélenchon, qui a lui aussi prévu de tenir un meeting le 5 décembre, mais à la Défense, souhaite se positionner frontalement face à Eric Zemmour et au candidat LR qui aura été investi la veille. Le journal Libération, qui a soulevé la question d'une discussion préalable entre les équipes de Jean-Luc Mélenchon et d'Eric Zemmour pour éviter un chevauchement des temps de parole le 5 décembre (l'un parle à 14h30, l'autre à 16h), s'est vu répondre par un proche du leader insoumis que «c'est faux, on ne discute pas avec Zemmour», alors que le communicant du candidat d'extrême droite, Olivier Ubéda, aurait indiqué, au contraire, que des discussions avaient eu lieu.

Quoi qu'il en soit, la position de Jean-Luc Mélenchon visant à permettre à Eric Zemmour de tenir ses réunions librement se distingue au sein de la gauche, inquiète de l'audience croissante des idées de droite et d'extrême-droite, et divisée sur les moyens de s'y opposer.

Lors de sa niche parlementaire du 2 décembre, le Parti communiste français a ainsi déposé une proposition de résolution «visant à lutter contre la banalisation des discours de haine dans le débat public», en rendant inéligible les personnes condamnées pour provocation à la haine. Un texte qui ciblait, sans le nommer, Eric Zemmour, et qui a été rejeté par 32 voix contre, 22 pour et une abstention. Du côté des syndicats et «antifas», le changement de lieu du meeting d'Eric Zemmour n'aura pas d'incidence sur la manifestation «Paris fera taire Zemmour»,  prévue dans la capitale ce 5 décembre, notamment à l'appel de la CGT, de Solidaires et de la Jeune Garde. Le parcours est prévu entre Barbès et La Villette.