Le débat entre Jean-Luc Mélenchon et Eric Zemmour sur BFM TV, dont l'annonce avait fait couler beaucoup d'encre, a sans surprise mis en lumière deux visions radicalement différentes de l'identité française, de l'économie ou encore de la politique énergétique. Mais, durant les deux heures qu'a duré la séquence télévisée ce soir du 23 septembre, le chef de parti et le journaliste ont exceptionnellement convergé sur une thématique : leur rejet de l'OTAN. Un sujet abordé dans le contexte particulier de l'échec retentissant de la vente de sous-marins français à l'Australie, au profit de navires américains à propulsion nucléaire.
Interrogé par la journaliste Aurélie Casse sur la place de la France dans l'organisation atlantique – dont Washington est de loin la plus importante puissance – Jean-Luc Mélenchon a répondu que les Français n'avaient «rien à faire dans cette alliance militaire, qui d'ailleurs n'a pas de sens». Le candidat à la présidentielle et député des Bouches-du-Rhône a fait valoir que l'OTAN avait «été créé pour faire face à l'URSS» et s'est demandé pourquoi elle existait encore, trois décennies après la disparition de l'Union soviétique. «Cela s'appelle le traité de l'Atlantique nord et ça mène des guerres dans des endroits où il n'y a pas d'Atlantique», a également relevé le leader de La France insoumise (LFI), invoquant l'intervention de l'OTAN en Afghanistan qui a récemment pris fin. «Je suis donc pour que la France récupère intégralement, totalement son indépendance et pour qu'elle soit à l'initiative d'autres d'alliances», a poursuivi le chef de parti, avant de dresser la liste des leviers de puissance dont jouit, selon lui, Paris : une potentielle «autorité morale, scientifique, culturelle», un vaste territoire maritime ou encore sa place dans la francophonie.
Une fois n'est pas coutume au sein de ce débat, le journaliste de droite a admis être «tout à fait d'accord avec le début de ce qu'a dit monsieur Mélenchon» sur l'alliance atlantique. «Je pense que l'OTAN aurait dû se dissoudre [...] quand l'URSS a disparu et quand le pacte de Varsovie a disparu», a-t-il en effet dit. Plus encore, pour Eric Zemmour, cette organisation n'est pas seulement obsolète, mais néfaste à la France : «L'OTAN est devenue une machine à asservir les pays qui sont soit disant les alliés des Etats-Unis et qui en fait ne sont que leurs obligés [devant] se soumettre et même [être] traités de façon brutale, comme on l'a vu dans cette histoire australienne», a déclaré l'éditorialiste, en référence au fiasco de la vente de sous-marins français lié à une nouvelle alliance conclue entre Washington, Londres et Canberra.
L'OTAN est devenue une machine à asservir les pays qui sont soit disant les alliés des Etats-Unis
Pour Eric Zemmour, qui laisse encore planer le suspense quant à sa potentielle candidature à l'élection présidentielle de 2022, la France n'a «rien à faire là-dedans» et devrait au contraire développer «son industrie militaire», accroître son budget de Défense et «rechercher des alliances nouvelles». L'écrivain et polémiste a aussi prôné une main tendue à la Russie, par exemple en levant les sanctions anti-russes «iniques» et «contre-productives» prises par les Occidentaux, depuis notamment le rattachement de la Crimée à la Fédération russe à l'issue d'un référendum en 2014.
Ces prises de positions ne sont pas vraiment des surprises, les deux hommes ayant déjà exprimé auparavant un rejet à l'égard de l'OTAN. Pas plus tard que le 15 septembre, Jean-Luc Mélenchon déclarait dans un communiqué qu'il était temps «de cesser de se bercer d’illusion, de refuser la caporalisation, de quitter l’OTAN et d’expulser de France le Centre d’excellence OTAN pour l’espace que les Etats-Unis veulent installer à Toulouse». Eric Zemmour, de son côté, avait récemment prôné la sortie de la France du commandement intégré de l'OTAN, considérant notamment que cette alliance poussait des Français à aller mourir pour des guerres qui ne sont pas les leurs.