Tentative d'incendie d'une mairie en Guadeloupe, barrages routiers en Martinique et à Saint-Martin : la situation était toujours tendue dans les Antilles françaises le 1er décembre, au dernier jour de la visite du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, qui s'est montré ouvert sur l'application de l'obligation vaccinale, déjà repoussée au 31 décembre.
Arrivé le 29 novembre au soir en Martinique, deuxième et dernière étape d'un court séjour destiné à apaiser les tensions et sortir de la crise sociale dans les Antilles françaises, le ministre a rencontré à la préfecture une délégation de 20 syndicalistes et les élus locaux, après que des discussions similaires la veille en Guadeloupe ont tourné court.
A Pointe-à-Pitre, le ministre avait jugé qu'aucune discussion n'était possible tant que les syndicats ne condamnaient pas les «tentatives d'assassinat contre des policiers et des gendarmes». A Fort-de-France, l'issue a été différente, le membre du gouvernement se montrant ouvert à une «adaptation de l'application de la loi» d'obligation vaccinale, qui devait initialement s'appliquer le 15 novembre dans les Antilles, jour où a débuté la grève générale en Guadeloupe. Né du refus de cette obligation vaccinale pour soignants et pompiers, le mouvement s'est étendu à des revendications politiques et sociales, notamment contre la vie chère, occasionnant violences, pillages et incendies et gagnant la Martinique où la contestation a débuté le 22 novembre. Les deux îles sont placées sous couvre-feu.
Le 26 novembre, Sébastien Lecornu et le ministre de la Santé Olivier Véran avaient annoncé repousser au 31 décembre 2021 la «finalisation de la mise en œuvre de l'obligation vaccinale» pour la Guadeloupe et la Martinique. Mais «je ne vois pas comment le 31 décembre on pourra accepter l'obligation vaccinale telle que c'est aujourd'hui», a souligné le 30 novembre à la sortie de la réunion Serge Letchimy, président du conseil exécutif de Martinique, car «on n'atteindra pas un niveau qui permette la continuité des soins». «Le ministre a bien compris que notre spécificité doit être prise en compte dans cette question d'obligation vaccinale», s'est réjoui Bertrand Cambusy, secrétaire général de la CSTM, syndicat à l'origine de l'appel à la grève générale, qui s'est exprimé en tant que porte-parole de l'intersyndicale.
Avant la réunion, environ 120 personnes s'étaient rassemblées devant la préfecture, après une nuit relativement calme sur l'île. Des barrages ont toutefois été érigés, notamment sur l'autoroute, coupant l'île en deux, et un centre de traitement postal situé dans un quartier de Fort-de-France a été vandalisé, a fait savoir La Poste qui déplore la détérioration d'une partie des colis. Une journaliste de l'AFP a constaté la présence de voitures brûlées et retournées sur un barrage au rond-point de Mahault, sur la commune du Lamentin, avec une dizaine de personnes présentes.
Reprise des blocages à Saint-Martin
En Guadeloupe, la mairie de Basse-Terre a été la cible d'un début d'incendie, rapidement maîtrisé. Dans le même secteur, la préfecture a annoncé interdire les rassemblements de plus de six personnes à Rivière-des-Pères, où les gendarmes ont fait lever un barrage. «Des barrages sont actuellement installés sur les routes de Guadeloupe», a toutefois informé la préfecture dans le même communiqué. Plus tôt dans la journée, l'accès à Mare-Gaillard sur Grande-Terre, entre Le Gosier et Saint-François, était à nouveau complètement bloqué par un barrage alors qu'il était dégagé depuis plusieurs jours.
Et à Baie-Mahault, la situation était incertaine dans la vaste zone commerciale de Jarry que les forces de l'ordre tentaient de sécuriser, au lendemain de l'annonce par Sébastien Lecornu de l'envoi d'un escadron de 70 gendarmes mobiles et 10 membres du GIGN supplémentaires.
Les élus guadeloupéens ont annoncé le 30 novembre dans un communiqué avoir pris contact avec le «collectif des organisations en lutte» pour «déterminer les modalités d’ouverture des négociations entre l’ensemble des parties». Et dans un communiqué, la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Guadeloupe, déplorant un «lourd tribut» pour le monde du travail, a également invité «à créer les conditions de retour à la table des négociations pour un règlement rapide de ce funeste conflit».
A Saint-Martin, autre territoire français des Antilles confronté depuis quelques semaines à un mouvement social, des barrages perturbaient de nouveau la circulation le 30 novembre après trois semaines d'accalmie, et des commerces ont été attaqués.
A Paris, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a réaffirmé la position du gouvernement consistant à refuser de «débattre avec des personnes» qui ne veulent pas condamner les violences contre les forces de l'ordre. «La grande majorité des Guadeloupéens ne soutiennent pas ce mouvement de contestation de casseurs», a-t-il estimé à l'Assemblée, soulignant le bilan du gouvernement qui «a mis fin à la difficulté de l'approvisionnement de l'eau en Guadeloupe» ou encore «versé 1,5 milliard d'euros» pour lutter contre le Covid-19 sur l'île.
Au même moment, la préfecture de Guadeloupe annonçait la révision mensuelle des prix des carburants et du gaz, l'un des objets du mouvement social : super sans plomb en hausse de deux centimes par litre, gazole en baisse de deux centimes, prix maximum d'une bouteille de gaz en baisse de 1,26 euros. La préfecture de Martinique avait annoncé des évolutions identiques le 29 novembre.