Soupçonné d'avoir accordé un coup de pouce fiscal à Bernard Tapie après l'arbitrage controversé de son conflit avec le Crédit lyonnais, l'ancien ministre du Budget Eric Woerth a été mis en examen par la Cour de justice de la République (CJR) le 2 juillet dans le cadre d'une information judiciaire ouverte en 2019, selon l'AFP.
«J'ai été assez surpris de cette mise en examen qui me paraît être un choix technique et je suis convaincu qu'on obtiendra un non-lieu ou, mieux, un abandon de cette mise en examen quand la Cour aura pris connaissance des documents que nous avons, qui sont nombreux et qui démontrent qu'aucun avantage illicite n'a été accordé à Bernard Tapie», a réagi son avocat Jean-Yves Le Borgne, cité par l'agence de presse française.
Dans le cadre de cet arbitrage rendu en 2008 (et annulé depuis au civil), Bernard Tapie s'était vu accorder 403 millions d'euros pour solder son litige avec le Crédit lyonnais concernant la vente d'Adidas. Une partie de l'argent avait été versée au Groupe Bernard Tapie (GBT), une des holdings de l'ancien président de l'Olympique de Marseille.
Pour l'administration fiscale, l'argent versé à GBT devait être taxé au titre de l'impôt sur les sociétés (33,3%) mais le camp Tapie demandait l'application du régime des plus-values (1,67%). Finalement, dans une lettre du 2 avril 2009, le cabinet ministériel d'Eric Woerth avait décidé de taxer les deux tiers de l'indemnité à 1,67% et le tiers restant à 33,3%.
«Nous parlons en 2008 d'une compensation d'une perte qui remonte à 1994-1995. Entre les deux dates, le régime fiscal a changé. La question est : quel est celui le plus légitime à adopter ? Celui de 1995 au moment du dommage ou celui de 2008 au moment où on répare ce dommage ?», s'est interrogé l'avocat d'Eric Woerth.
L'ancien ministre est mis en examen depuis 2018 pour «financement illégal de la campagne électorale» de Nicolas Sarkozy en 2007
Agé de 65 ans, l'actuel président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale a été inquiété à plusieurs reprises par la justice mais n'a jamais été condamné. L'ancien ministre de Nicolas Sarkozy avait déjà fait l'objet d'une enquête de la CJR – seule instance habilitée à examiner les responsabilités pénales de membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions – pour la vente controversée de l'hippodrome de Compiègne (Oise) en 2010. Soupçonné de «prise illégale d'intérêts», l'ancien maire de Chantilly (1995-2017) avait obtenu un non-lieu fin 2014.
En plus de l'affaire Tapie, une autre menace de procès pèse sur Eric Woerth en tant qu'ancien trésorier de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. Il est mis en examen depuis 2018 pour «financement illégal de campagne électorale» dans l'enquête sur les soupçons de financement libyen de cette élection.