D'après un rapport de police consulté par l'AFP, le MoDem présidé par François Bayrou a mis en place un «système ancien et plus ou moins informel» visant à utiliser les fonds du Parlement européen pour maintenir l’activité du parti et le niveau des rémunérations des salariés de l’UDF-MoDem.
Dans ses conclusions datées du 14 avril, l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) estimerait ainsi que «pour faire vivre son parti et assurer son fonctionnement à moindre coût, François Bayrou et Marielle de Sarnez, épaulés par les cadres du parti ont mis au service de l'UDF, puis du MoDem, des assistants parlementaires rémunérés par le Parlement européen», rapporte également l'agence de presse.
Les policiers anticorruption décrivent néanmoins un système qui «ne reposait pas sur une méthode monolithique et systématique» et expliquent qu'«il évoluait au fil du temps et relevait de l'opportunité des situations tout en respectant un budget déterminé», est-il écrit. Les enquêteurs expliquent que «les collaborateurs parlementaires détournés disposaient d'un contrat de travail à temps partiel avec le parti et un autre avec l'élu européen [endormant] ainsi la vigilance des services du Parlement européen».
François Bayrou nie toutes les accusations et assure que tout «sera prouvé»
Interrogé le 5 juin par la journaliste Apolline de Malherbe sur BFM TV, le président du MoDem a déclaré que tout cela «n'était pas vrai», précisant que «le jour où on voudra s'intéresser aux preuves, on verra, on constatera que ça n'est pas vrai». François Bayrou a également estimé que ce rapport et les terminologies employées n'étaient pas clairs, s'offusquant de «soupçons infondés».
Le Haut-commissaire au plan nommé par Emmanuel Macron a également indiqué : «Un parlementaire, c'est quelqu'un qui vit ou qui est élu grâce à son parti politique; le fait de travailler avec son parti politique, c'est le b.a.-ba, si on ne le fait pas, c'est là où on est immoral.» Evoquant ces informations diffusées pour la première fois par Le Monde dans un article paru le 2 juin, le président du MoDem avait immédiatement déclaré sur Twitter que ces allégations étaient «fausses» et ces accusations «malveillantes».
Une quinzaine de personnes déjà mises en examen pour «détournement de fonds publics» ou «complicité»
Le rapport évalue le préjudice du Parlement européen à 1,4 million d'euros en intégrant toutefois dans ce chiffre l'intégralité (400 000 euros) de la rémunération des assistants ayant tout de même partiellement travaillé pour les eurodéputés, soulignent leurs auteurs.
Au final, l'OCLCIFF suggère des poursuites judiciaires pour «détournement de fonds publics» contre neuf ex-eurodéputés dont Sylvie Goulard, Nathalie Griesbeck, Jean-Luc Bennahmias et Robert Rochefort. Cette infraction serait susceptible d'entraîner une peine d'inéligibilité pour ces anciens élus.
Les policiers estiment également possible de poursuivre trois cadres du parti pour «complicité» de ce délit et évoquent d'éventuelles poursuites pour «recel» contre les anciens assistants ainsi que contre le MoDem, son président, son ex-directeur financier et plusieurs autres personnes.
Le dernier mot reviendra aux juges d'instruction qui ont déjà engagé des poursuites en ordonnant les mises en examen d'une quinzaine de personnes dès novembre-décembre 2019, la plupart pour «détournement de fonds publics» ou «complicité». Parmi eux, François Bayrou et son bras droit Marielle de Sarnez (décédée le 13 janvier) ainsi que l'ex-garde des Sceaux Michel Mercier.