Renseignement, franc-maçonnerie : démantèlement d'une incroyable officine criminelle

- Avec AFP

Renseignement, franc-maçonnerie : démantèlement d'une incroyable officine criminelle© Martin BUREAU Source: AFP
Deux hommes posent dans les bureaux de la DGSE à Paris (image d'illustration).
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L'arrestation fortuite de deux hommes de la DGSE fin juillet 2020 à Créteil, soupçonnés d'être venus assassiner un coach en entreprise, a révélé une série de crimes – perpétrés ou en projet – attribués à une officine aux liens sulfureux.

Cette histoire vertigineuse, racontée par plusieurs médias nationaux et régionaux, commence par hasard dans une rue résidentielle de la préfecture du Val-de-Marne, fin juillet 2020. Au petit matin, un riverain s'étonne de voir deux hommes simulant un somme à l'avant d'une Clio trafiquée. Il appelle la police.

Interpellés, Pierre B. et Carl E. se révèlent être des militaires affectés au Centre parachutiste d'entraînement spécialisé, situé à Saran (Loiret), un site qui dépend de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), le renseignement extérieur français.

Ils assurent effectuer une mission «clandestine» de renseignement pour la Direction des opérations de la DGSE, ciblant Marie-Hélène Dini, figure du milieu du coaching en entreprise. Mais ils nient avoir eu l'intention de la tuer.

«Coaching» et «Mossad»

Pierre B. et Carl E. auraient pour mission d'arrêter ses «activités anti-étatiques» liées au Mossad, le renseignement israélien. Dans leur voiture, pistolet 9 mm chargé, munitions, gants, bouchons d'oreilles anti-bruit...

Leurs téléphones mettent les enquêteurs sur la piste de Sébastien L., agent de protection rapprochée dans le privé depuis 2011, rapidement interpellé. Devant la brigade criminelle, lui aussi nie que le projet visait à assassiner Marie-Hélène Dini.

Mais présenté à un juge et mis en examen, Sébastien L. lâche le morceau : il reconnaît avoir mandaté l'un des deux militaires pour tuer le coach. L'homme met les enquêteurs sur deux nouvelles pistes : d'abord, un membre de la DGSI (le renseignement intérieur) qu'il accuse d'avoir «actionné» les deux interpellés à Créteil.

Surtout, Sébastien L. évoque un commanditaire présumé mais non identifié, surnommé «le vieux». De qui s'agit-il ? Marie-Hélène Dini évoque sans certitudes quelques rivaux professionnels – et notamment un certain Jean-Luc B. – échaudés par sa volonté de développer une certification pour le coaching. 

A ce stade, les enquêteurs patinent : ils ont les hommes de main, les chefs d'orchestre, mais pas le cerveau. Après quelques mois de flottement, tout bascule mi-janvier, lors d'une audition de la compagne de Sébastien L.. «Les policiers fouinassent dans son téléphone, et tombent sur un nom déjà apparu dans la procédure, Daniel B. [un ancien de la DCRI (ex-DGSI) à la retraite]», raconte une source proche du dossier.

Rencontre au sein d'une loge maçonnique

La jeune femme l'identifie comme le donneur d'ordre de son compagnon. Devant les enquêteurs, Daniel B. «s'affale d'une manière extraordinaire», selon cette même source qui s'en étonne encore. Il reconnaît d'abord avoir remis à Sébastien L. les contrats ciblant Marie-Hélène Dini, et explique qu'il l'a fait à la demande d'un nouveau suspect, Frédéric V. Daniel B. renforce la piste de la rivalité professionnelle en citant celui que Marie-Hélène Dini a mentionné comme rival en affaires, Jean-Luc B., comme possible commanditaire.

L'histoire prend alors un tournant exceptionnel : Daniel B. «leur raconte tout, ce qu'ils veulent savoir et bien plus encore», selon cette source. Il évoque ainsi le projet d'assassinat d'un «syndicaliste gênant» de la CGT à Bourg-en-Bresse, mais surtout l'assassinat en 2019, confié à Sébastien L. et abouti cette fois, de Laurent Pasquali.

Les juges d'instruction parisiens récupèrent début février le dossier de ce pilote de rallye, dont le corps enterré avait été découvert neuf mois après sa disparition par un promeneur en septembre 2019 dans un bois de Haute-Loire. Un couple d'amateurs de voitures, créanciers de Pasquali, est mis en cause pour avoir mandaté l'officine.

A son tour, le nouveau suspect, Frédéric V., ancien journaliste reconverti dans la sécurité privée qui a rencontré Daniel B. au sein d'une loge maçonnique francilienne, est interpellé. Celui que tous désignent comme central dans la cellule criminelle confirme que la mission sur Marie-Hélène Dini lui vient de Jean-Luc B., également franc-maçon. Et Frédéric V. accrédite aussi l'existence de projets visant le syndicaliste de l'Ain et le pilote de rallye.

Jean-Luc B., enfin, est interpellé. Pressé par les enquêteurs, il reconnaît, au bout de sept auditions, avoir demandé d'assassiner Marie-Hélène Dini.

Pistes à explorer

Les principaux intervenants dans cette série de projets, Frédéric V., Daniel B. et Sébastien L., semblent désormais avoir été identifiés. A ce jour, au moins 12 personnes sont mises en examen. Les enquêteurs n'en sont-ils qu'au début ? 

Alors que le dossier «Dini» semble désormais quelque peu éclairci, les différentes séries d'aveux ont mis les enquêteurs sur bien d'autres pistes à explorer, parmi lesquelles un éventuel autre assassinat, un projet criminel visant le maire de Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne), Sylvain Berrios, un autre contre le général Ferdinand Mbaou, un opposant congolais au président Sassou Nguesso, mais aussi un projet qui aurait impliqué un politicien connu, etc.

Dans ce dossier protéiforme, les choses restent complexes. «Tout est fermé entre chaque échelon», relève un avocat au dossier cité par l'AFP. «Ce sont des "branques". Il s'agit de gens qui se la racontent et qui se dupent les uns les autres sur leur importance respective», observe un autre, relativisant l'idée d'une cellule structurée.

Contactés par l'AFP, les avocats de Sébastien L., Daniel B., Frédéric V. et Jean-Luc B. n'ont pas souhaité réagir.

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