Renommée «pour un nouveau pacte de sécurité respectueux des libertés», la proposition de loi La République En Marche (LREM) sur la Sécurité globale a été votée par le Sénat à majorité à droite, ce 18 mars, à 238 voix pour et 98 contre.
Députés et sénateurs vont tenter de s'accorder sur un texte commun. En cas d'échec, une nouvelle lecture sera organisée dans les deux chambres, le dernier mot revenant à l'Assemblée nationale.
La principale nouveauté apportée par la chambre haute est la réécriture de l'article 24, qui vise à protéger les forces de l'ordre en opération mais a cristallisé les critiques, provoquant une levée de boucliers notamment chez les journalistes. La version des sénateurs ne fait plus référence à la loi de 1881 sur la liberté de la presse, mais vise à créer dans le code pénal un nouveau délit de «provocation à l'identification».
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a réaffirmé que le gouvernement faisait «confiance» au Parlement pour la rédaction, tant que le but recherché, à savoir la protection des policiers et gendarmes en opération, était selon lui préservé.
La chambre haute a voté le dispositif visant à faciliter le recours aux caméras-piétons des policiers, mais après avoir supprimé la possibilité pour les forces de l'ordre de diffuser les images de leurs interventions dans les médias ou sur les réseaux sociaux.
Toujours sur le volet consacré aux images, le Sénat a resserré l'encadrement juridique du recours aux drones, pour tenir compte des observations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Il a aussi prévu l'élaboration par le ministère de l'Intérieur d'une «doctrine d'emploi des drones».
Il a adopté par ailleurs sans modification la disposition visant à autoriser le port d'armes par les policiers hors service dans les lieux accueillant du public, malgré l'opposition d'élus de tous bords.
Les sénateurs ont donné leur aval à l'élargissement, à titre expérimental pour cinq ans, des pouvoirs des agents de police municipale. Ils ont approuvé la création «historique» d'une police municipale à Paris.
La proposition de loi prévoit encore un encadrement de la sécurité privée, assoupli sur plusieurs points par les sénateurs.
La gauche vent debout contre la proposition de loi
La gauche a ferraillé toute la semaine contre le texte qui selon le ministre de l'Intérieur «améliorera très sensiblement le travail du continuum de la sécurité».
«Nous ne croyons pas sur le fond au continuum de sécurité. On aura à la fin une peau de léopard», a déclaré Jérôme Durain (PS), tandis que l'écologiste Esther Benbassa regrettait que «les pouvoirs publics s'engagent sur une voie toujours plus répressive».
C'est un peu la signature du crime : vous êtes obligés d'écrire "libertés" dans le titre tellement il est évident que cette loi leur porte atteinte
«C'est un peu la signature du crime : vous êtes obligés d'écrire "libertés" dans le titre tellement il est évident que cette loi leur porte atteinte», a également lancé Pierre Laurent (CRCE à majorité communiste) à la majorité sénatoriale.
Françoise Gattel (centriste) a au contraire défendu «la possibilité donnée d'exercer sa liberté dans la sécurité» à travers ce texte.
Le président Les Républicains (LR) de la commission des Lois François-Noël Buffet s'est en outre félicité que le travail du Sénat ait permis de «ramener un peu de sérénité» après les débats houleux de novembre dernier.
Depuis son examen par l'Assemblée en automne, la proposition de loi sur la Sécurité globale a mobilisé contre elle une série de manifestations. La coordination #StopLoiSecuriteGlobale, qui s’est constituée le 8 novembre 2020 à l’initiative des quatre organisations syndicales représentatives de journalistes (SNJ - SNJ-CGT - CFDT-Journalistes - SGJ-FO) et de la Ligue des droits de l’Homme, juge que cette proposition de loi «vise à porter atteinte à la liberté de la presse, à la liberté d’informer et d’être informé, à la liberté d’expression».