France

Charlie Hebdo : l'assaillant mis en examen et écroué pour tentatives d'assassinats terroristes

L'auteur présumé de l'attaque du 25 septembre près des anciens locaux de Charlie Hebdo qui a fait deux blessés dans l'agence Premières Lignes a été mis en examen et écroué pour tentatives d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste.

Le ressortissant pakistanais accusé d'avoir grièvement blessé au hachoir deux personnes vendredi à Paris en pensant s'en prendre à l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a été mis en examen mardi et écroué pour tentatives d'assassinats terroristes.

A l'issue de quatre jours de garde à vue, Zaheer Hassan Mahmoud a été présenté à un juge d'instruction qui l'a mis en examen pour «tentatives d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste» et «association de malfaiteurs» terroriste criminelle, a fait savoir le parquet national antiterroriste (Pnat). Il a été placé en détention provisoire.

Lors d'une conférence de presse dans l'après-midi, le procureur national antiterroriste Jean-François Ricard avait confirmé que l'assaillant, en s'attaquant à deux salariés de l'agence Premières Lignes, visait en réalité la rédaction de Charlie Hebdo, dont les locaux étaient situés à cet endroit, rue Nicolas-Appert (XIe arrondissement), lors de l'attentat meurtrier de janvier 2015, mais qui ont depuis été déplacés dans un lieu tenu secret.

L'auteur de cet attentat islamiste a déclaré aux enquêteurs avoir regardé «ces derniers jours des vidéos en provenance du Pakistan» concernant la publication et la republication début septembre par Charlie Hebdo des caricatures de Mahomet qui en avaient fait la cible des djihadistes, a ajouté le magistrat.

Selon le procureur, certains «amis» entendus par les enquêteurs ont confirmé que l'homme «regardait abondamment ces derniers temps des vidéos de Khadim Hussain Rizvi, le fondateur et dirigeant du parti Tehreek-e-Labbaik Pakistan, dit TLP», un mouvement extrémiste pakistanais.

Le TLP a participé au début du mois de septembre à des manifestations réunissant des milliers de personnes dans plusieurs villes du Pakistan contre Charlie Hebdo et la France après la republication des caricatures.

Son acte était prémédité, selon le Pnat : «en colère», l'intéressé avait procédé à des repérages les jours précédant l'attaque, avait acheté le matin même une feuille de boucher, un marteau et des bouteilles de white spirit, car son «projet initial était d'entrer dans les locaux du journal, si nécessaire à l'aide du marteau, et de les incendier», selon Jean-François Ricard.

«En arrivant devant la rue, et en apercevant les victimes, il a pensé que ces dernières travaillaient pour [Charlie Hebdo] et a décidé de les attaquer [...] subitement», a-t-il affirmé.

L'employé de Premières Lignes est «toujours hospitalisé dans un état très grave» avec plusieurs fractures du crâne, tandis que sa collègue a eu «plusieurs plaies et fractures au visage».

Interpellé place de la Bastille après les faits, Zaheer Hassan Mahmoud a passé 96 heures en garde à vue entre les mains des enquêteurs de la brigade criminelle et de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

L'assaillant présumé, qui déclarait initialement s'appeler Hassan Ali et être âgé de 18 ans, a été confronté à une photo d'un passeport pakistanais retrouvée dans son téléphone et a finalement déclaré s'appeler Zaheer Hassan Mahmoud et avoir 25 ans.

Ce nom était aussi celui sous lequel il avait enregistré une vidéo peu avant son acte, dans laquelle il annonçait qu'il entendait se «révolter» contre les caricatures. La vidéo a circulé sur les réseaux sociaux.

En arrivant devant la rue, et en apercevant les victimes, il a pensé que ces dernières travaillaient pour Charlie Hebdo et a décidé de les attaquer

Il dit venir de Kothli Kazi, un village du district agricole de Mandi du Pendjab au Pakistan. Contacté par téléphone par l'AFP, Arshad Mahmoud, qui se présente comme son père, s'est dit «très heureux» et «très fier» des actes de son fils, qui aurait, selon lui, «protégé l'honneur du prophète» en blessant deux salariés de l'agence de presse Premières Lignes à la tête avec une feuille de boucher.

Sous ces deux identités, le terroriste islamiste présumé était inconnu des services spécialisés. Mais il a déclaré être arrivé en France en août 2018 et, grâce à sa première identité de mineur, a bénéficié de l'aide sociale à l'enfance dans le Val-d'Oise. Son parcours administratif sur le territoire national a ouvert un débat politique en France sur la prise en charge des mineurs isolés.

La seconde identité de l'assaillant présumé n'a pas encore été définitivement authentifiée auprès des autorités pakistanaises.

En l'état, les enquêteurs semblent penser qu'il a agi seul : les dix personnes placées en garde à vue depuis le 25 septembre ont toutes été relâchées.

Parmi elles figuraient un frère et plusieurs anciens colocataires de l'assaillant présumé, mais aussi Youssef, un Algérien de 33 ans un temps suspecté d'être un complice et qui a fait, au contraire, «preuve d'un grand courage en tentant d'attraper le mis en cause pour l'arrêter», selon le procureur antiterroriste. L'information judiciaire devra déterminer «s'il a bénéficié d'un quelconque soutien», a encore relevé Jean-François Ricard.