«Antisémitisme, complotisme, apologie d'Hitler» : la Licra dénonce le rappeur Freeze Corleone
La sortie du dernier album de Freeze Corleone, la Menace fantôme, suscite une vive polémique en raison des paroles du rappeur, épinglés par la Licra. L'affaire a fait réagir de nombreux politiques ; une enquête a été ouverte.
Dans un tweet publié le 16 septembre, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) dénonce le rappeur Freeze Corleone pour des propos tenus dans plusieurs de ses titres : «Antisémitisme, complotisme, apologie d'Hitler, du IIIe Reich et du terroriste Mollah Omar, le rappeur [Freeze Corleone] fait business de son obsession des juifs.»
(1/2) Antisémitisme, complotisme, apologie d'Hitler, du IIIe Reich et du terroriste Mollah Omar, le rappeur @freezecorleone fait business de son obsession des juifs #hatemoney avec @YouTube, @GooglePlayMusic, @AppleMusic, @spotifyfrance, @DeezerFR, @amazonmusic et @TIDALpic.twitter.com/xOeSEECw2m
— Licra (@_LICRA_) September 16, 2020
La Licra appelle à la fin de «l’impunité». Elle demande également «à l’ensemble des acteurs partenaires de prendre leurs responsabilités». Le dernier album du rappeur, La Menace fantôme, sorti le 11 septembre et qui comptabilisait plus de cinq millions de streams 24 heures après sa diffusion sur Spotify, a donné une nouvelle visibilité à l’artiste. Dans le titre Freeze Raël, le rappeur scande : «Freeze Raël, sur la prod, kicke comme Israël. Fuck ces nègres comme Israël, Chen Laden dans l’complot comme les Ben Laden, Chirak comme JB Binladen.»
J’arrive déterminé comme Adolf dans les années 30
«Tout pour mes enfants pour que la famille vive comme des rentiers juifs»; «J’arrive déterminé comme Adolf dans les années 30»; «Sur la route du papier monte un empire comme le jeune Adolf, déterminé avec des grandes ambitions comme le jeune Adolf»; «J’ai les techniques de propagande de Goebbels»; «On arrive dans des allemandes comme des SS»; «Tous les jours R.A.F. [rien à foutre] de la Shoah», peut-on aussi entendre dans d'autres titres. Des paroles qui comptent par ailleurs des références à l’ancien chef taliban Mohammed Omar : «Seigneur de guerre comme le mollah Omar.»
Des députés LREM signent une lettre ouverte au ministre de la Justice
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, s'est offusqué dans un tweet publié le 17 septembre : «Apologie du nazisme et antisémitisme... Ces propos sont inqualifiables. A ma demande, le ministère de l’Intérieur étudie au plus vite les recours juridiques pour poursuivre leur auteur. D’ores et déjà, j’appelle Facebook et Twitter à ne pas diffuser ces immondices.»
Apologie du nazisme et antisémitisme... Ces propos sont inqualifiables. À ma demande, le ministère de l’Intérieur étudie au plus vite les recours juridiques pour poursuivre leur auteur. D’ores et déjà, j’appelle Facebook et Twitter à ne pas diffuser ces immondices. https://t.co/oKT645QejN
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) September 16, 2020
Plusieurs dizaines de députés LREM ont de leur côté signé une lettre ouverte : «Nous, députés de la Nation, fervents défenseurs de la République, citoyens viscéralement attachés à ses valeurs, sommes profondément choqués des propos absolument détestables antisémites et négationnistes tenus par "Freeze Corleone" […] Nous demandons au ministre de la Justice Eric Dupond-Morretti d’agir pour que l’auteur de ce clip abject soit puni.»
Le Délégué interministériel à la lutte contre le racisme l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) Frédéric Potier a lui indiqué avoir fait un signalement auprès du procureur de Paris après avoir recensé neuf passages qui constitueraient une incitation à la haine raciale, selon une saisine consultée par l'AFP et faite en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale.
Le ministère de l'Intérieur a également affirmé à l'AFP qu'un signalement en vertu de ce même article serait fait dans l'après-midi. Dans un tweet, le chef de file des députés LREM Christope Castaner a aussi expliqué avoir saisi le procureur face à un clip «intolérable».
Le clip de Freeze Corleone est intolérable. L’antisémitisme et le négationnisme sont punis par la loi, nous ne laisserons rien passer.
— Christophe Castaner (@CCastaner) September 17, 2020
Je saisis le Procureur de Paris, au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. @LaREM_AN
«Le faux artiste et vrai prêcheur de haine [Freeze Corleone] doit être radié de toutes les plateformes numériques, ses chansons de haine interdites à la diffusion», a commenté le député Les Républicains Eric Ciotti.
Haine des juifs, antisémitisme larvé, apologie du Mollah Omar, d'Adolf Hitler et du nazisme !
— Eric Ciotti (@ECiotti) September 17, 2020
Le faux artiste et vrai prêcheur de haine @freezecorleone doit être radié de toutes les plateformes numériques, ses chansons de haine interdites à la diffusion pic.twitter.com/wP5Z7K5cYH
L'adjointe d'Anne Hidalgo Audrey Pulvar a elle déclaré : «L'antisémitisme n'est pas une opinion, c'est un délit. L'apologie du IIIe Reich n'est pas non plus une opinion, c'est aussi un délit.»
L'antisémitisme n'est pas une opinion, c'est un délit. L'apologie du IIIe Reich n'est pas non plus une opinion, c'est aussi un délit. #Nauséehttps://t.co/CRmbBzigls
— Audrey PULVAR (@AudreyPulvar) September 16, 2020
Le philosophe Raphaël Enthoven interroge : «Qui est ce nazillon ?»
Mais qui est ce nazillon ? #FreezeCorleonehttps://t.co/PZF5lNXyki
— Raphaël Enthoven (@Enthoven_R) September 16, 2020
Le 1er septembre, la Fnac a retiré la Menace Fantôme de son site internet et annulé toutes les précommandes, sans apporter plus de précisions sur les motivations de sa décision. Freeze Corleone, de son vrai nom Issa Lorenzo Diakhaté, est né le 6 juin 1992 aux Lilas (Seine-Saint-Denis). Il est connu dans le monde du rap pour des albums tels que «Vieilles merdes», «THC» ou «Projet Blue Team».
Enquête ouverte par le parquet de Paris
Quelques heures après la montée de la polémique, le procureur de Paris, Rémy Heitz, a annoncé dans un communiqué avoir «pris l'initiative d'ouvrir [...] une enquête portant sur différents clips vidéo et chansons de Freeze Corleone» pour «provocation à la haine raciale» et «injure à caractère raciste».