Il s'agissait d'une demande ancienne des corps intermédiaires de la police nationale, notamment portée par l'Unsa-Police à l'apogée de la fronde contre Christophe Castaner, lors d'un rassemblement sur la place Beauvau le 11 juin 2020 : la caméra-piéton va devenir la norme pour les policiers et gendarmes d'ici juillet 2021, selon une déclaration de Gérald Darmanin au micro de LCI ce 14 septembre.
Interrogé par RT France à l'occasion de cette marche des syndicats de police vers le ministère de l'Intérieur, l'ancien secrétaire général de l'Unsa-Police, Philippe Capon avait déclaré au sujet de la caméra-piéton dont étaient dotés ses collègues : «L’administration nous a dotés de matériel de merde, je le dis. Les policiers aiment leur travail. On n'est pas soutenus. Il faut que le président de la République prenne toute la mesure de la colère des policiers.»
C'est précisément à cette demande qu'a répondu l'actuel ministre de l'Intérieur, à savoir remplacer un matériel inopérant, ainsi qu'il l'a expliqué sur LCI : «Le problème des caméras-piétons est qu'aujourd'hui elles ont une charge limitée. Une patrouille dure huit heures, une charge entre deux et quatre heures, donc vous comprenez bien qu'elles ne peuvent pas se mettre en marche dès le début. Pour l'instant la consigne est de mettre en marche la caméra quand on est en intervention».
«Mon travail à moi est de trouver de nouvelles caméras qui durent le temps des patrouilles. C'est du bons sens. Nous sommes en train de les acheter, tout sera généralisé pour le 1er juillet 2021», a-t-il précisé.
De source policière, les modèles de caméras proposés par l'entreprise Axon, qui commercialise également le célèbre pistolet à impulsion électrique Taser, pourrait bien décrocher ce marché des caméras piétons... à condition de remporter un appel d'offres en bonne et due forme.
Dès le mois de juin, un formateur de la police expliquait à RT France que les fonctionnaires avaient déjà en tête le matériel qui leur convenait : «On voudrait avoir la même chose qu'en police municipale, c'est-à-dire un package complet et que le Taser soit couplé à la caméra-piéton vendue par le même fournisseur. Nous avons déjà eu des problèmes de comptabilité informatique par le passé, des logiciels qui ne fonctionnaient pas ensemble, par exemple. La caméra-piéton couplée au Taser filme tout en permanence, mais elle ne va enregistrer que le moment où un Taser va être enclenché et les deux minutes précédentes vont être enregistrées également. Le système en Bluetooth peut aussi permettre que l'enregistrement de toutes les caméras des collègues s'enclenche en même temps, et là on a une vision 360° de l'intervention.»
Lors du congrès de l'Unsa-Police tenu à Paris le 10 septembre, auquel RT était présent, un petit stand du fabricant Axon était d'ailleurs en place dans le hall d'accueil de l'hôtel qui hébergeait l'événement. Le nouveau secrétaire général du syndicat, Olivier Varlet, n'avait pas manqué de souligner à la tribune, devant ses adhérents, que le ministre avait passé du temps sur le stand avant de venir les rejoindre.
«Rétablir la confiance», mais également protéger les fonctionnaires
Le 14 juillet, Emmanuel Macron avait annoncé sa volonté de généraliser les caméras-piétons «avant la fin du quinquennat», afin de permettre de «retracer la vérité des faits qui permettent de protéger, de rétablir [la] confiance.»
Concernant les fonctionnaires qui n'utiliseraient pas la caméra-piéton et les éventuelles sanctions qu'ils pourraient encourir, Gérald Darmanin a répondu qu'il faisait «confiance aux policiers et aux gendarmes» et rappelé une statistique souvent oubliée en France : «La caméra est là pour les protéger. [Ce sont] les plus sanctionnés de tous les fonctionnaires. C'est une grande police, une grande gendarmerie, il faut leur faire confiance. Ce sont souvent des gens qui se sont engagés pour l'amour du drapeau et la protection des plus faibles, le police bashing commence vraiment à agacer, je crois, les Français.»
Ce sont souvent des gens qui se sont engagés pour l'amour du drapeau et la protection des plus faibles, le police bashing commence vraiment à agacer, je crois, les Français
Concernant la bataille des images, Gérald Darmanin s'est également engagé le 10 septembre à soutenir au Parlement une autre demande syndicale récurrente : obliger les médias et les réseaux sociaux à flouter les visages des policiers et des gendarmes identifiables sur les contenus vidéos lors de leurs interventions.
Les engagements du ministre répondent globalement à des attentes anciennes des policiers, qui avaient manifesté leur colère en juin dernier, peu avant la sortie de Christophe Castaner de la place Beauvau... Reste désormais à savoir si les annonces de son successeur seront suivies d’actes.
Antoine Boitel