Avant «la race blanche» de Nadine Morano, ces phrases qui ont ruiné des carrières politiques (VIDEO)
Après sa phrase sur «un pays à majorité de race blanche», Nadine Morano est lâchée par de nombreux membres de son parti. Ce n'est pas la première fois qu'une phrase met en danger la carrière d'une personnalité politique.
L'avenir politique de Nadine Morano s'assombrit. Après sa sortie sur la «France, un pays à majorité de race blanche» sur le plateau de Laurent Ruquier samedi soir, la député européenne se retrouve isolée dans son propre camp. Elle risque d'être écartée de la liste Les Républicains pour les élections régionales et pourrait même être exclue de son parti.
Nicolas Sarkozy, le patron du parti de droite pourrait mettre dehors une de ses plus fidèles alliées, taclée par Bruno Le Maire, Alain Juppé ou Nathalie Kosciusko-Morizet, mais aussi par de nombreux députés Républicains. Si l'ancienne ministre peut encore rebondir, ce n'est pas la première fois qu'une phrase menace de briser la carrière d'un homme ou d'une femme politique. Certains ne s'en sont jamais relevés.
Jérôme Cahuzac : «Je n’ai jamais disposé d’un compte en Suisse ou ailleurs à l’étranger. Jamais.»
Lui, sa carrière politique semble réellement derrière lui. Jérôme Cahuzac était pourtant promis à un destin doré. Nommé ministre du budget par François Hollande, Jérôme Cahuzac est accusé par Médiapart, en décembre 2012, de posséder un compte en Suisse ouvert quelques années plus tôt, quand l'ancien chirurgien esthétique ne faisait pas encore de politique.
Plus que l'affaire, qui aurait pu être vite oubliée, ce compte n'ayant pas été alimenté depuis des années, c'est l'entêtement de Jérôme Cahuzac à nier qui va lui coûter sa carrière. Le 4 décembre 2012, devant l'Assemblée nationale, il déclare qu'il n'a «jamais disposé d'un compte en Suisse ou ailleurs à l'étranger. Jamais.» Le lendemain, il parle d'accusation «délirantes» avant de jurer «les yeux dans les yeux» son innocence à François Hollande. Il démissionne finalement le 19 mars de son poste de ministre. Il est ensuite exclu du PS. Si on dit qu'en politique, personne n'est jamais vraiment mort, son retour paraît des plus improbables.
Michèle Alliot-Marie et le «savoir-faire de nos forces de sécurité»
Le 11 janvier 2011, Michèle Alliot-Marie, alors ministre des Affaires étrangères, évoque la Tunisie, où la révolution prend de l'ampleur depuis plusieurs semaines. Loin d'avoir conscience de la colère en cours en Tunisie, la ministre des Affaires étrangères propose, devant l'Assemblée nationale, l'aide de la police française à Ben Ali : «Le savoir-faire de nos forces de sécurité, qui est reconnu dans le monde entier, permet de régler des situations sécuritaires de ce type».
En France, cela est perçu comme un soutien à Ben Ali. Déjà, sa démission est demandée. Cette phrase maladroite prend une ampleur énorme quelques jours plus tard quand le Canard enchaîné révèle que Michèle Alliot-Marie a passé, fin 2010, ses vacances en Tunisie, alors que le pays était déjà en proie à d'importantes manifestations. Ses liens avec la Tunisie sont alors décortiqués et fin février 2011, Michèle Alliot-Marie démissionne. Lors d'une intervention télévisée, Nicolas Sarkozy ne cite même pas son nom. Devenue députée européenne en 2014, la carrière politique de Michèle Alliot-Marie a été largement ralentie.
Christian Vanneste et la «légende» de la déportation des homosexuels
Habitué aux sorties douteuses, Christian Vanneste va trop loin en janvier 2012. Dans une interview, il réécrit l'histoire, évoquant «la fameuse légende de la déportation des homosexuels». «Il n'y a pas eu de déportation homosexuelle en France», insiste-t-il. Alors député, Christian Vanneste est lâché par son camp. Thierry Mariani, pourtant proche de lui, juge sa conduite «injustifiable et incompatible avec les valeurs» de l'UMP.
Il est finalement exclu du parti quelques jours plus tard. Sans le poids de l'UMP derrière lui, il tente de reconquérir son poste de député aux législatives de juin 2012, mais est battu dès le premier tour. C'est le candidat porté par l'UMP qui s'impose. Il est aujourd'hui président du RPF, un parti confidentiel.
Le maire de Cholet et Hitler qui «n'en a peut-être pas tué assez»
Membre fondateur de l'UDI, Gilles Bourdouleix n'est pas encore fini. Mais ses futurs mandats seront forcément plus difficile à conquérir depuis que le député-maire de Cholet a perdu le soutien de son parti, dont il a été exclu. Il faut dire que dans le genre petite phrase qui ne passe pas, Gilles Bourdouleix a fait très fort.
En juillet 2013, en compagnie de journalistes du Courrier de l'Ouest, le maire de Cholet visite un champ occupé par des gens du voyage. Il lance alors, en faisant référence à l'extermination des Tziganes pendant la Seconde Guerre mondiale, «Comme quoi, Hitler n'en a peut-être pas tué assez.» Ces propos sont démentis, mais un journaliste a filmé la scène. Il est renvoyé de l'UDI quelques jours plus tard, puis, en janvier 2014, il est condamné pour apologie de crimes contre l'humanité et de diffamation envers un journaliste du Courrier de l'Ouest.
Ceux qui ont survécu
C'est peut-être l'espoir auquel se rattache Nadine Morano. Malgré des phrases chocs, qui ont marqué l'opinion, des exclusions de partis politiques, certains politiciens ont réussi à poursuivre leur carrière. Georges Frêche est de ceux-là. En 2007, il lance deux phrases qui auraient pu marquer la fin de sa carrière politique : tout d'abord, il s'en prend à l'équipe de France de football estimant que «dans cette équipe (de France), il y a neuf blacks sur onze. La normalité serait qu'il y en ait trois ou quatre. Ce serait le reflet de la société. Mais là, s'il y en a autant, c'est parce que les blancs sont nuls. J'ai honte pour ce pays. Bientôt, il y aura onze blacks».
Il s'en prend ensuite à une association de harkis, les traitant de «sous-hommes». Il est finalement exclu du PS en janvier 2007, mais son poids local lui permet de continuer sa carrière politique. En 2010, il est réélu président du Conseil régional de Languedoc-Roussillon face à une candidate PS, avant de mourir en octobre 2010.
Brice Hortefeux non plus, n'est pas passé loin d'une fin de carrière précoce. En 2009, lors d'une université d'été de l'UMP, un homme présente un militant maghrébin au ministre de l'Intérieur. S'en suit un échange très limite, et filmé par une équipe de télévision. Alors que quelqu'un évoque «notre petit Arabe», Brice Hortefeux répond «il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes...»
La phrase fait scandale, Hortefeux est attaqué en justice et se défend en affirmant qu'il parlait... des Auvergnats. Il a été acquitté, mais a depuis reconnu son erreur. Sa carrière, elle ne s'est pas arrêtée là. Il est resté ministre de l'Intérieur jusqu'en 2011, et après avoir été élu député européen, il est aujourd'hui conseiller politique de Nicolas Sarkozy au sein des Républicains. C'est même lui qui aurait été chargé par l'ancien président d'appeler Nadine Morano pour lui demander de s'excuser.
Autre «survivant», dont la carrière c'est pourtant envolée : Manuel Valls. En juin 2009, filmé par des caméras de télévision, Manuel Valls visite le marché d'Évry, dont il est maire. Il oublie alors qu'il porte un micro, et lance à un de ses conseillers :"Belle image, belle image de la ville d'Évry. Tu me mets quelques Blancs, quelques white, des blancos». Si la phrase a choqué, elle n'a pas empêché Manuel Valls de devenir Premier ministre quelques années plus tard. Nadine Morano peut avoir de l'espoir.