L'actuel maire du XVIIe arrondissement de Paris, Geoffroy Boulard a dit toute sa colère sur les plateaux de télévision et sur Twitter, après les dégradations constatées sur son secteur lors d'une manifestation interdite porte de Clichy le 2 juin, devant le TGI de la capitale.
S'exprimant ce 3 juin sur BFMTV, le maire a déploré un dispositif policier inadapté et assuré qu'il demanderait des comptes au préfet de police de Paris, Didier Lallement : «C'est incompréhensible qu'on ait interdit hier matin cette manifestation, qu'elle se soit déroulée sous les fenêtres du tribunal, qui est une institution qui représente l'autorité, avec des infiltrations de l'ultra-gauche qui est venue pour en découdre et pas du tout pour défendre la cause d'Adama Traoré. [...] La préfecture de police a une grande responsabilité, cette manifestation a été interdite au dernier moment, mais on savait pertinemment que ça n'allait pas dissuader les gens de venir. C'est la gestion du maintien de l'ordre qui est en cause et je vais demander la responsabilité du préfet de police, je vais demander qu'il s'explique parce que j'avais prévenu. J'avais demandé à être associé au dispositif. A l'évidence, le dispositif policier était inadapté et il y avait assez peu de policiers, notamment autour du périmètre.»
Ce rassemblement interdit ayant mené à de nombreuses dégradations à Paris était organisé au nom d'Adama Traoré qui est mort après son interpellation par des gendarmes dans le Val d'Oise en 2016. Sa sœur, Assa, militante virulente envers les forces de l'ordre, a assuré ce 3 juin au micro de BFMTV que la responsabilité des débordements (principalement des départs de feux dans le XVIIe arrondissement) revenait à Didier Lallement lui-même : «Cela fait quatre ans que nos rassemblements se passent pacifiquement. Aujourd'hui, le seul responsable c'est monsieur Lallement qui a donné cette interdiction et qui va mettre en face de certaines personnes, des policiers. Bien entendu, nous, on continue à manifester, comme on manifeste depuis quatre ans.»
La moindre des choses serait que Lallement et Castaner démissionnent
Interrogé par RT France, Jean-Pierre Colombies, porte-parole de l'association de policiers en colère, UPNI, a également estimé que la responsabilité de la préfecture était engagée, mais il a également souligné le rôle de Christophe Castaner, de l'actuel président de la République et des gouvernements précédents dans cette situation sécuritaire défaillante : «Il y a une conjonction de contextes qui fait que la situation peut être explosive et ce n'est certainement pas avec des Lallement et des Castaner que nous allons nous en sortir ! Ces personnages sont clivants et ils ne sont pas perçus légitimes, à la fois par une grande partie des policiers, des gendarmes et des citoyens. La conséquence directe de tout cela, c'est que toute politique de pseudo-reconquête républicaine dans les quartiers sensibles est totalement vouée à l'échec. Il faudrait des politiques responsables, des visionnaires consensuels dans la situation actuelle. Il faudrait des gens en qui nous aurions envie de croire... Nous en sommes loin et je pense que la moindre des choses serait que Lallement et Castaner démissionnent. Ce président de la République, lui-même, ne perçoit pas à l'évidence le risque d'explosion sociale... Sans quoi, il les renverrait sur le champ.»
Avec un regard vers le passé, l'ancien commandant de police passé par Marseille et l'Ile-de-France ajoute encore : «Ce qui s'est passé hier soir ne m'étonne pas du tout. Ce à quoi on assiste aujourd'hui, les hommes politiques des 15 dernières années en sont pleinement responsables. Par pur calcul politique, ils ont dissocié les policiers et les citoyens. Des zones de sous-citoyenneté ont été créées. Il ne faut pas être étonné aujourd'hui que nous ne maîtrisions plus rien dans ces secteurs. Nicolas Sarkozy, en tant que ministre de l'Intérieur a supprimé d'un trait de plume tout ce qui pouvait ressembler à une police de proximité. Le policier est à présent perçu comme un ennemi, un adversaire. Il a stigmatisé les cités tout en supprimant un dispositif policier. Il a amené cette situation d'explosion et fait de la provocation pour alimenter sa campagne présidentielle bourgeonnante à l'époque. Ce faisant, Nicolas Sarkozy a creusé un sillon qui est encore emprunté par d'autres politiques. Après cela, on demande aux membres des forces de sécurité d'aller rétablir l'ordre dans ces conditions ? Mais c'est presque impossible ! Il faudrait déjà une réforme globale de toute la chaîne judiciaire qui est aujourd'hui inopérante, il faudrait des responsables politiques courageux qui ne fassent pas preuve de carriérisme, il faudrait des signaux d'apaisement, il faudrait cesser de résumer la situation sociale à une opposition entre police et citoyenneté, comme on l'a fait avec les Gilets jaunes... Apparemment, ce n'est pas au programme. La radicalité répondra à la radicalité. Résultat, nous n'allons pas dans le mur, nous y sommes déjà !»
Antoine Boitel