France

Six mois avec sursis requis contre un Gilet jaune accusé d'injures antisémites contre Finkielkraut

Le parquet de Paris a requis six mois de prison avec sursis contre un individu qui, en marge d'une manifestation des Gilets jaunes, avait insulté le philosophe de «grosse merde», ou encore de «sioniste», suscitant l'indignation des politiques.

La scène avait mis en émoi le monde politico-médiatique ; en marge de l'acte 14 des Gilets jaunes le 16 février à Paris, le philosophe Alain Finkielkraut, croisant la route du cortège de manifestants, avait été la cible d'insultes. Parmi les individus l'ayant invectivé, un homme comparaissait devant le parquet de Paris ce 22 mai. Six mois de prison avec sursis ont été requis.

La procureur a dénoncé une «véritable et rapide démonstration de haine et d'antisémitisme» et a évoqué un «antisémitisme qui se cache derrière un antisionisme».

Reconnaissable sur les vidéos de la scène du 16 février, le prévenu, vendeur en téléphonie en Alsace, avait notamment crié à l'attention du philosophe : «Espèce de sioniste», «grosse merde», «elle est à nous, la France», «sale race» ou «t'es un haineux et tu vas mourir». 

Cet individu de 36 ans a confié avoir agi pour «sa cause de cœur [...] la cause palestinienne», à la vue du philosophe. Il a contesté le caractère antisémite des propos, assurant avoir injurié l'intellectuel en raison de ses positions favorables à Israël.

Refusant de s'excuser, le Gilet jaune a accusé Alain Finkielkraut d'être une figure du «lobby sioniste» qu'il a dit dénoncer.

Alain Finkielkraut, qui ne s'est pas constitué partie civile, est cependant venu témoigner. Il a revendiqué se considérer comme «sioniste» au sens large du terme et a précisé être favorable «depuis 1981 pour la solution à deux Etats». «L'antisionisme peut dans certains cas être une forme d'antisémitisme : on veut coudre sur la poitrine des juifs non plus l'étoile jaune mais la croix gammée», a déclaré l'académicien.

«A travers moi, les Juifs, la France et la République ont été insultés»

Dans une déclaration à la presse, l'intellectuel a estimé : «Ce n'est pas en tant qu'individu que j'ai été agressé et insulté, c'est en tant que représentant parmi tant d'autres d'une "sale race" [l'une des insultes proférées par le prévenu]. C'est en tant que Juif.»

«Et comme l'a dit Manuel Valls, "sans les Juifs, la France ne serait plus la France". Donc à travers moi, les Juifs, la France et la République ont été insultés», a-t-il poursuivi.

Les insultes dont avaient fait l'objet Alain Finkielkraut lors de la manifestation avaient été largement commentées, donnant lieu à de nombreuses condamnations, certains commentateurs n'hésitant pas à amalgamer les Gilets jaunes à des antisémites.

Réagissant à chaud à l'incident dans les colonnes du Parisien le 16 février, Alain Finkielkraut avait pour sa part estimé : «Il y a chez [ceux qui m'ont insulté] un sentiment d’hostilité très fort à l’égard des Juifs et je paie ma notoriété. Ils visaient avant tout mes liens et mes positions sur Israël.»

«C’est un groupe de gens politiquement difficilement situables, me semble-t-il un mélange de gens des banlieues, de l’extrême gauche et peut-être aussi des soraliens. Ça m’étonnerait que ce soient des Gilets jaunes d’origine», avait-il encore affirmé.

Le jugement, ainsi que la décision du tribunal sur plusieurs recours de la défense, sera mis en délibéré.

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