«On n'a pas encore compris le traumatisme qu'ils ont subi». C'est ce qu'a assuré l'avocat de plusieurs lycéens interpellés début décembre à Mantes-la-Jolie dans des conditions qui avaient déclenché une vive émotion dans le pays. Arié Alimi a réclamé ce 13 mai la nomination d'un juge d'instruction et l'audition des 151 jeunes par les enquêteurs de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN).
Mains derrière la tête, collés au mur pour certains, en rang et entourés de nombreux policiers : des dizaines de lycéens avaient en effet été arrêtés à Mantes-la-Jolie le 6 décembre 2018, jour d'une mobilisation étudiante. Les images de cette interpellation pour «participation à un attroupement armé» avaient rapidement fait le tour des réseaux sociaux, cumulant des centaines de milliers de vues, et suscitant d'innombrables réactions d'indignation.
Deux de ces lycéens devaient être entendus ce 13 mai par la police des polices dans le cadre de l'enquête préliminaire ouverte par le parquet de Nanterre. Une dizaine de personnes s'étaient donné rendez-vous devant les locaux de l'IGPN pour les soutenir.
Les membres du Collectif de Défense des jeunes lycéens de Mantes-La-Jolie se sont rassemblés ce même jour devant les locaux de l’IGPN à Paris, au moment de l'audition.
«On attend que la vérité soit faite», a affirmé l'avocat Arié Alimi, qui représente une vingtaine de lycéens qui ont déposé plainte pour violences policières. Il a qualifié les méthodes de la police ce jour-là d'«actes de torture et de barbarie».
Par ailleurs, les interpellés sont «des enfants majoritairement issus de l'immigration et on les a traités comme des animaux», s'est indigné Arié Alimi. «On a quelque chose qui relève de l'abject, c'est une forme d'humiliation», a-t-il ajouté, accusant également des policiers d'avoir proféré des «insultes racistes» à l'encontre des jeunes.
Seuls ceux ayant déposé plainte doivent être entendus, selon l'avocat qui a annoncé le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile auprès du parquet de Nanterre, pour contraindre à la nomination d'un juge d'instruction.
«On souhaite qu'un juge indépendant soit saisi», a expliqué l'avocat, et ce, pour «déterminer qui du procureur, du commissaire ou du préfet a donné ces instructions». Il a également expliqué avoir demandé à ce que tous les lycéens arrêtés ce jour-là, soit 152 au total, soient auditionnés, «ne serait-ce que comme témoins, pour dire ce qu'ils ont vu».
Les deux lycéens convoqués ont parlé du «choc» et de l'«humiliation» ressentie lors de cette interpellation. Anas, 17 ans, est resté entre une heure trente et deux heures à genoux par terre avant de passer 24 heures en garde à vue. «Ça fait mal de rester à genoux pendant tout ce temps sur des petits cailloux», a assuré le jeune homme dont les propos ont été rapportés par l'AFP. Chaque fois qu'un lycéen essayait de s'asseoir, il recevait un coup, a affirmé Anas, parlant aussi d'insultes sans se rappeler précisément la nature de celles-ci.
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