«Nous, médecins, rappelons notre attachement viscéral au secret professionnel. C'est pourquoi nous refusons le fichage des Gilets jaunes blessés arrivant aux urgences.» C’est ainsi que débute la tribune publiée par plus d’une centaine de médecins sur le site de L’Express. Parmi les signataires, Patrick Pelloux, urgentiste et président de l’Association des médecins urgentistes de France, ancien collaborateur à Charlie Hebdo ou Joachim Son-Forget, député de la circonscription des Français établis en Suisse et au Liechtenstein, par ailleurs radiologue, qui s’était fait remarquer pour ses remarques sur le maquillage de la sénatrice EELV de Paris Esther Benbassa.
«Patients, imaginez que vous alliez à l'hôpital et que votre présence, votre identité voire des informations médicales ne soient plus confidentielles et immédiatement communiquées à des tiers dans un fichier parallèle à votre dossier médical, fichier dans lequel vous seriez inscrit par exemple en raison de votre appartenance politique, sexuelle, religieuse ou ethnique ?», interrogent-ils, précisant que «c’est exactement ce qui se passe depuis cinq mois avec le dévoiement de l'utilisation d'un dispositif réservé aux situations sanitaires exceptionnelles nommé SI-VIC».
«Nous répondons donc par un devoir de "désobéissance éthique". Nous refusons d'obéir à l'Administration»
Le Canard Enchaîné révélait, dans des articles des 17 et 24 avril, que le fameux fichier SI-VIC, mis en place à la suite des attentats de novembre 2015, était dévoyé et pouvait servir à ficher les Gilets jaunes. «Depuis cinq mois, ce dispositif est détourné par l'administration hospitalière […] Les autorités sanitaires enjoignent médecins et équipes soignantes à rentrer dans cette base de données les patients Gilets jaunes, à saisir leurs identités et données médicales mais aussi tout élément d'identification physique», poursuivent-ils, rappelant que «l'existence même d'un fichier parallèle renseigné après sélection de nos patients pour n'y entrer que les Gilets jaunes est parfaitement antidéontologique».
Ils fustigent une «injonction irréalisable» au regard de l’éthique et de la déontologie et estiment être «face à l'institutionnalisation d'une dérive inacceptable» constituant une «une faute pénalement répréhensible». En effet, le non-respect du secret professionnel est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
«Face à des demandes illégales, nous répondons donc par un devoir de "désobéissance éthique". Nous refusons d'obéir à l'Administration», concluent-ils, appelant à l’ouverture d’une enquête parlementaire afin de faire la lumière sur l’utilisation du logiciel SI-VIC.