Trois jours après le traditionnel défilé du 1er mai auquel ont massivement participé les Gilets jaunes dans plusieurs grandes villes de France, la mobilisation citoyenne avait repris le 4 mai pour son acte 25. C'est dans ce contexte qu'en fin d'après-midi à Paris, quelques dizaines de Gilets jaunes se sont dirigés rue de Patay, dans le XIIIe arrondissement de la capitale, où se tenait un événement intitulé «La stratégie de la peur : médiabolisation des gilets jaunes».
Organisé et animé par le journaliste belge Michel Collon, fondateur du site Investig'action, l'événement avait pour but d'aborder la question du traitement médiatique de la mobilisation, et plus largement de l'actualité en général, à travers notamment une discussion sur ce sujet entre plusieurs personnalités pro-Gilets jaunes dont le juriste Robert Charvin, le blogueur Etienne Chouard, et deux figures médiatiques du mouvement : l'avocat François Boulo et l'entrepreneur Priscillia Ludosky.
Quelques minutes avant le début de la rencontre, son initiateur en a expliqué le contexte. «Les Gilets jaunes sont des victimes sur le plan économique et social, des gens qui n'arrivent pas à finir le mois alors que des milliardaires s'enrichissent sur leur dos [...] On a réussi à les faire présenter comme des violents», a estimé le journaliste belge, dénonçant «une inversion entre l'agresseur et l'agressé».
Et l'avocat Gilet jaune François Boulo de compléter cette présentation par son analyse de la relation conflictuelle entre le monde médiatique et le mouvement citoyen, estimant que «des raisons structurelles et sociologiques» pouvaient expliquer ce phénomène.
Durant la conférence, l'homme de droit a exposé des procédés qui selon lui, visent à déconsidérer le mouvement. Evoquant les médias de masse, il a par exemple affirmé : «Leur technique, c'est de déformer la réalité et de poser des sujets interdits.»
Initiatrice de la pétition à succès sur la «baisse des Prix du Carburant à la Pompe !» l'automne dernier, la Gilet jaune Priscillia Ludosky a, tout comme l'orateur précédent, eu l'opportunité d'accéder à divers plateaux télévisés depuis le début du mouvement – une expérience qui la laisse toutefois circonspecte. «Parfois, on a les présentateurs qui viennent à la fin pour nous dire qu'ils sont d'accord avec nous», a-t-elle expliqué, s'interrogeant alors sur les raisons qui pouvaient «museler» ces journalistes.
Ceux qu'il faut mettre en cause, ce sont les directeurs d'information, les éditorialistes, ils sont les super vedettes médiatiques
Très acerbe à l'encontre du traitement médiatique des Gilets jaunes, Etienne Chouard a pour sa part considéré que certains journalistes «ne se sent[ai]ent pas redevables de la mission d'inquiéter le pouvoir mais plutôt de le défendre». Une critique partagée par Robert Charvin, qui a cependant tenu à la compléter. «Ceux qu'il faut mettre en cause, ce sont les directeurs d'information, les éditorialistes, ils sont les super vedettes médiatiques», a estimé le juriste.
Affichant sa volonté de trouver des solutions face à la problématique soulevée, Michel Collon s'est quant à lui montré force de propositions. «Je propose de cibler une chaîne d'information afin d'analyser son traitement médiatique des événements pendant une semaine.» Et l'animateur du débat de proposer un boycott de la chaîne en question, au cas où cette dernière n’accepterait pas les droits de réponse qui lui seraient adressés.