Pour l'avocate pénaliste Marie Grimaud, invitée le 30 avril de l'émission Radio Brunet sur RMC, la France ne sait pas protéger ses enfants des pédophiles, notamment en ce qui concerne le suivi des personnes déjà condamnées. Pointant une justice laxiste, la magistrate, qui n'a pas mâché ses mots, a lancé en début d'émission : «Il vaut mieux violer un enfant que de dealer ses grammes de shit dans la rue. La sanction est beaucoup plus lourde pour le dealer que pour celui qui viole un enfant. C'est une réalité, il est grand temps de l'affronter et peut-être que nous aurons moins de drames comme celui d'Angélique».
Une référence à Angélique, une adolescente de 13 ans violée et assassinée le 25 avril dans la commune de Wambrechies, près de Lille, par un homme déjà condamné en 1996 pour «viol avec arme», «attentats à la pudeur aggravés» et «vol avec violence». L'homme qui a été interpellé, et qui a tout avoué aux enquêteurs, était inscrit au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles (FIJAIS). Il n'était pas soumis à une obligation de soins, a précisé le procureur de Lille. Depuis, le suspect «respecte globalement les obligations que cette inscription entraîne, c'est-à-dire une présentation tous les ans aux services de police et le signalement de ses changements d'adresse».
Des décisions juridiques trop légères
Pour Marie Grimaud, avocate référente de l'association Innocence en danger, «la France est l'Eldorado des pédophiles». Expliquant que la culture judiciaire française est très attachée à la préservation des libertés fondamentales dont celle du droit à l'oubli, l'avocate a assuré que la plupart des condamnations dans les affaires de pédophilie relevaient du sursis. Des magistrats qui prennent des décisions «qui ne sont pas à la hauteur de la gravité des faits», selon l'avocate. De plus, elle dénonce un manque criant de suivi socio-judiciaire des pédophiles condamnés. Ceux-ci peuvent être tenus pendant 20 années à un suivi auprès d'un psychiatre ou d'un psychologue. Dans les affaires les plus graves des cours d'assises, les magistrats pourraient ordonner un suivi socio-judiciaire «mais il est rarement prononcé, et quand il est prononcé c'est sur 5 ans», s'est indigné Marie Grimaud ajoutant : «Notre arsenal juridique permet une prise en charge très dure, mais nous avons des décisions qui ne suivent pas.» Pour l'avocate, une nouvelle loi consécutive à l'affaire Angélique ne servirait à rien : «Ce n'est pas une question de loi, c'est une question de mentalité». Une mentalité portée par des «magistrats qui sont à côté de leurs pompes», selon Marie Grimaud.
Quand vous avez des magistrats qui estiment qu'un enfant de cinq ou six ans peut éventuellement consentir à un rapport sexuel et qu'ils vont relaxer des individus pour cela, c'est que nous avons un problème dans la formation de nos magistrats
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Une seconde chance pour les pédophiles
L'avocate a également battu en brèche «le principe de la seconde chance» qui n'existe pas dans les textes de loi mais qui est bien présent selon elle. «Comme si quelqu'un qui allait passer à l'acte sur un enfant pouvait avoir une seconde chance, s'est elle exclamée. C'est bien mal connaître ce qu'est la réalité de la pédophilie». Pour l'avocate, «une fois qu'on est pédosexuel, c'est-à-dire actif dans sa pédophilie, une fois que le premier passage à l'acte a été fait, la récidive est au bout du chemin».
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