La loi sur le renseignement définitivement votée
La loi renseignement, défendue par le gouvernement au nom de la lutte antiterroriste, est définitivement adoptée aujourd'hui par l'Assemblée nationale, certains élus et associations craignent une surveillance de masse de la population.
Vivement contestée dans la rue, mais votée sans encombre au Parlement. La loi renseignement est ratifiée par les députés réunis en séance.
Boîtes noires et algorithmes
Ce texte, que le gouvernement a présenté comme une réponse aux attentats de janvier 2015, apparaît pour ses détracteurs comme «la porte ouverte» à une véritable de surveillance de masse de la population, à l'image de ce que les Etats-Unis ont pu connaître après le 11 septembre 2001.
Dans le viseur de ces associations de défense des droits, les «boîtes noires» qui, placées chez les fournisseurs d'accès internet, permettront une surveillance de tout le trafic web et ce afin de détecter -grâce à de complexes algorithmes- les comportements suspects d'individus, en se basant sur leurs recherches et leurs contacts.
La loi autorise par ailleurs les Renseignements français à installer dans nos rues des IMSI-catcher, de fausses antennes-relais qui permettent d'aspirer les conversations téléphoniques. Des boîtiers de ce type, connus sous le nom de «stingray», avaient été découverts à Londres il y a quelques semaines, causant un certain émoi chez les Britanniques.
En savoir plus: A Londres, même les tours ont des oreilles
Fake mobile phone towers discovered in London: Stingrays come to the UK http://t.co/91j9Adzcg2
— Matt Hopkins (@1MattHopkins) June 11, 2015
Une loi jugée également «liberticide» en raison du peu de contrôle qu'aura, dans les faits, sur ces écoutes la nouvelle autorité créée par la loi: la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. Si, en effet la CNTCR devra se prononcer à chaque fois qu'une demande de surveillance lui sera adressée, l'avis rendu -qui ne sera que consultatif- pourra être à dessein outrepassé par le ministre de l'Intérieur et son cabinet.
Hollande saisira le Conseil Constitutionnel
Un texte très contesté dans la rue par de nombreux citoyens et associations, mais sur lequel le gouvernement avait pourtant fait le choix d'aller vite en déclenchant la procèdure d'urgence. Le projet de loi n'a donc été lu et voté qu'une seule fois par Chambre, ne laissant finalement que peu de place aux débats dans les hémicycles. Une méthode qui avait fortement déplu à nombre de parlementaires.
Aussi pour apaiser les tensions, le Président Hollande avait promis le 19 avril de saisir lui-même le Conseil Constitutionnel pour juger de la régularité de cette loi renseignement. «Pour que vous soyez bien convaincus que cette loi ne mettra pas, en aucune façon, en cause les libertés, je vais saisir, au terme de la discussion parlementaire, [...] le Conseil constitutionnel. [...] Cette garantie sera également apportée» avait-il déclaré.
#WikiLeaksElysee : le porte parole du gouv français a qualifié d'innaceptable la pratique d'espionnage entre alliés http://t.co/VhKtq9LWRY
— RT France (@RTenfrancais) 24 Juin 2015
L'arroseur arrosé
Hasard de l'actualité, le vote aujourd'hui au Parlement de cette loi coïncide avec les révélations de Mediapart et Libération sur les écoutes intempestives de plusieurs présidents français par les grandes oreilles américaines de la NSA. «C'est l'arroseur arrosé. Voilà un gouvernement qui vient de faire voter une loi sur les écoutes et qui se plaint d'être écouté», ironisait le sénateur UDI Yves Pozzo di Borgo. Laure de la Raudière, élue Les Républicains d'Eure-et-Loire, interpellait elle aussi le gouvernement sur ce retour de bâton: «Franceleak: ohé François Hollande ; Manuel Valls, Bernard Cazeneuve cela ne vous choque pas d'être écoutés. On attend vos réactions! (…) Etre écoutés, ce n'est pas grave, ils n'ont rien à cacher...».
Les Sages risquent donc d'avoir beaucoup de travail dans les prochaines semaines, puisqu'une centaine de députés (Les Républicains, Modem, FN et Vert) ont décidé, en parallèle de la saisine présidentielle, de se tourner vers le Conseil Constitutionnel pour «d'obtenir les réponses qu'ils n'ont pas eues du gouvernement» sur cette «collecte massive des données».