Pierre Lellouche : «L’Ukraine, un engrenage dangereux pour la France et l’Europe»

Dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron, Pierre Lellouche, ancien ministre et spécialiste des relations internationales, alerte sur les risques d’escalade liés à la guerre en Ukraine. Il critique les revirements du président et appelle à repenser notre stratégie.
Pierre Lellouche, ancien ministre sous Nicolas Sarkozy – il a été secrétaire d’État aux Affaires européennes (2009-2010) puis au Commerce extérieur (2010-2012) – ne mâche pas ses mots dans une tribune adressée à Emmanuel Macron et publiée le 11 mars. Il s’inquiète d’un conflit qui, selon lui, pourrait «dégénérer vers le pire». S’inspirant de Boris Vian, il débute ironiquement : «Monsieur le Président, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps…», avant d’exposer ses craintes.
«Les changements de cap à répétition» du président Macron
Lellouche ne se dit ni pacifiste ni défaitiste, mais un citoyen soucieux des intérêts nationaux. Il reproche à Macron ses déclarations alarmistes, comme celles du 5 mars 2025 à la télévision, suivies par 14 millions de Français, où il a affirmé que «la menace russe nous touche» et que «rester spectateurs serait une folie». Pour l’ancien député, ce discours, loin de rassurer, a semé l’anxiété. Il ironise : «Pour rassurer quelque peu nos concitoyens “inquiets”, il n’est pas inutile de rappeler votre goût prononcé pour les changements de cap à répétition».
Le texte de l’ancien politique de droite a été salué par de nombreux internautes sur les réseaux sociaux mais également par le député Rassemblement national (RN) Frederic Falcon qui a relayé le document sur X en commentant : «Analyse juste».
Analyse juste.
— Frederic Falcon (@FalconFrederic) March 11, 2025
Pierre Lellouche : «Lettre au président Emmanuel Macron au sujet d’une guerre qui pourrait dégénérer vers le pire»https://t.co/dVo2om3HZQ
Dans son courrier adressé au président, Lellouche critique une politique étrangère incohérente. S'agissant de l'Ukraine, Macron a oscillé entre dialogue avec Vladimir Poutine et soutien indéfectible à Kiev, proposant même l’envoi de troupes françaises – une idée rejetée par 65 % des Français (sondage CSA). Lellouche pointe d'autres revirements : au Liban, un désintérêt après des leçons de démocratie ; en Israël, une demande de cessez-le-feu laissant le Hamas en place, finalement obtenu par Trump ; au Sahel, une coûteuse opération Barkhane soldée par un échec. «Depuis 2017, vos positions contradictoires désorientent», assène-t-il.
Sur l’Ukraine, il juge irréaliste de poursuivre une guerre que Kiev ne peut gagner militairement face à la Russie. Alors que Donald Trump pousse pour un cessez-le-feu, Macron et l’Europe s’entêtent, selon lui, remplaçant une aide américaine tarie sans objectif clair ni moyens suffisants. Enfin l’ancien secrétaire d’Etat redoute un engrenage: «Envoyer des troupes françaises en Ukraine “otaniserait” le conflit, une folie rejetée par Russes et Américains.»
Il appelle à une stratégie lucide : arrêter les combats et négocier une neutralité ukrainienne sous égide internationale, loin des illusions d’une victoire ou d’une entrée dans l’OTAN. Sans cela, prévient-il, la France risque de perdre sur tous les tableaux – diplomatique, économique, stratégique –, dans un monde post-occidental où Trump privilégie le «deal» au droit.