C’est dans une lettre publiée ce 16 septembre sur les réseaux sociaux que le désormais ancien Commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton a annoncé avec fracas son départ de la Commission européenne. Une démission avec «effet immédiat» qui fait suite à de vifs désaccord avec la présidente allemande de la Commission, Ursula von der Leyen.
«Dernière minute : mon portrait officiel pour le prochain mandat de la Commission européenne», avait lancé sur X (ex-Twitter) Thierry Breton, avec la photo d'un cadre vide, quelques minutes avant de rendre publique sa lettre de démission.
«Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom – pour des raisons personnelles que vous n’avez en aucun cas évoquées directement avec moi – et proposé un compromis politique, un portefeuille prétendument plus influent pour la France au sein du futur Collège» détaille Thierry Breton dans sa lettre, avant d’assainer «un autre candidat va maintenant vous être proposé».
Soulignant que «défendre et de faire progresser le bien commun européen, au-dessus des intérêts nationaux et partisans» au cours des cinq dernières années «fut un honneur», celui-ci estime qu’il ne peux plus faire partie de la Commission «à la lumière de ces derniers développements – un autre témoignage d’une gouvernance douteuse».
«Démission en anglais alors qu’il est commissaire français et que le français est l’une des trois langues de travail» a réagi, en France, le sénateur du Rassemblement national Aymeric Durox. Ce dernier y a vu «une synthèse parfaite de son mandat et de son rapport à son pays».
Une guerre de tranchée avec Ursula von der Leyen
Ancien ministre de l'Économie (2005 - 2007) sous les gouvernements Raffarin et Villepin, le commissaire démissionnaire a entretenu des rapports ombrageux avec la présidente allemande de l’exécutif européen.
Dans un courrier adressé fin mars à cette dernière, aux côtés de trois autres commissaires européens, Thierry Breton avait exigé une discussion «dès que possible» suite à l'attribution d’un poste clé à l’eurodéputé allemand Markus Pieper, un proche de Ursula von der Leyen et également issu de l'Union chrétienne-démocrate (CDU). «Cette nomination a suscité des questions sur la transparence et l’impartialité du processus de sélection» soulignaient les quatre commissaires. Mi-avril, face à la polémique et à l'approche des élections européennes, Markus Pieper avait finalement jeté l'éponge.
Quelques semaines plus tôt, Thierry Breton avait raillé le résultat obtenu par Ursula von der Leyen lors d'un congrès du Parti populaire européen (PPE) à Bucarest, allant jusqu'à questionner la légitimité d'un second mandat de von der Leyen à la tête de la Commission. Au cours de ce vote, seuls 400 des 801 élus présents avaient voté en faveur de von der Leyen, seule candidate en lice, comme la candidate du parti à la présidence de la Commission.
Déjà un successeur évoqué dans la presse française
Ancien PDG du géant du numérique Atos (2009 - 2019), Thierry Breton avait notamment été très critiqué pour la mise en place du DSA, le Digital Service Act, une réglementation européenne jugée liberticide par ses détracteurs.
Dans la foulée de l’annonce de sa démission, la piste Stéphane Séjourné a été avancée par l'Élysée afin de le remplacer. Ministre des Affaires étrangères du gouvernement démissionnaire qui a connu des premiers pas délicats à la tête de la diplomatie française, notamment en raison de ses problèmes de dyslexie.
«De pire en pire ! Thierry Breton remplacé par Stéphane Séjourné», s’est indigné sur X l’eurodéputé du RN Thierry Mariani à l’annonce de cette piste, et de dénoncer «l’art de recaser les petits marquis déchus de la macronie». «Typique de l’administration : plus vous êtes incompétent, plus on vous promeut pour se débarrasser de vous. À ce train là, monsieur Séjourné finira secrétaire général de l’ONU», s'est pour sa part agacé l’ancien député Les Républicains Julien Aubert.
Ursula von der Leyen devrait présenter cette semaine les 26 nouveaux membres de son nouveau Collège, mais les tractations prennent du temps et doivent respecter des compromis tant au niveau des partis politique que des représentations nationales.