Mercredi 15 mars
Selon une estimation de la CGT, 450 000 manifestants étaient présents à Paris pour protester contre la réforme des retraites. Ils étaient 37 000 selon la préfecture de police.
Selon des sources parlementaires citées par l'AFP, les députés et les sénateurs réunis en commission paritaire mixte se sont accordés sur une version commune du projet de réforme des retraites.
Des heurts sont signalés à Paris avec les forces de l'ordre comme le montrent des images de plusieurs journalistes sur place.
«Grosse mobilisation devant la gare du Mans», rapporte France Bleu Maine, publiant la vidéo d'un cortège dynamique. «Les deux voies du tram sont bloquées par la manifestation», constate le média local.
«Il y a quelque chose de grave à opposer systématiquement la légitimité de la rue à celle du Parlement», a dénoncé la Premier ministre Elisabeth Borne au Sénat face aux rangs de la gauche. «Vous n’aviez qu’un seul objectif, empêcher le vote du texte», a fustigé le chef du gouvernement, reprochant aux élus de gauche leurs «postures».
A l'inverse, elle a «salué l’attitude responsable de la majorité sénatoriale pour la bonne tenue des discussions», sous les moqueries des élus de gauche. La Premier ministre a estimé que la Nupes menait une entreprise de disqualification de nos institutions, particulièrement insupportable venant d'élus de la Nation».
«Depuis deux mois, le peuple vous dit non», lui avait lancé la sénatrice communiste Eliane Assassi lors des questions au gouvernement. «Vous aimez rappeler votre passé de gauche, dois-je vous rappeler que c’est la grève et la rue qui ont bâti des conquêtes sociales?», a-t-elle ajouté.
Le taux de grévistes mobilisés a chuté à moins de 3% dans la fonction publique d'Etat à la mi-journée, contre près de 25% lors de la journée du 7 mars, selon le ministère de la Fonction publique. Dans la fonction publique territoriale, le taux de grévistes recule aussi, passant de 11% le 7 mars à 2,2% ce 15 mars. Dans la fonction publique hospitalière, seuls 4,5% des agents étaient en grève à la mi-journée contre 9,4% le 7 mars.
A la SNCF, le taux provisoire de grévistes approchait les 15% à la mi-journée selon une source syndicale, un chiffre en forte baisse par rapport au 7 mars (39%).
Le fort de Brégançon, résidence officielle de la présidence de la République, a été privé d'électricité, selon la CFE-CGC Energie Côte d'Azur.
Dans le Var, la fédération CGT Mines-Energie affirme avoir coupé le courant de 43 000 personnes dépendant d'un transformateur de la commune de Six-Fours, et «privé de courant des élus de la République», «voire résilié» leurs abonnements «dans leur permanence ou à leur domicile». Enedis a dénoncé auprès de l'AFP des «actes de malveillance» et précisé qu'elle portait «systématiquement» plainte.
France Bleu Armorique signale que des affrontements sont en cours à Rennes, en marge de la manifestation contre la réforme.
Selon le média Quartier général, de «très gros moyens» ont été déployés par les forces de l'ordre pour bloquer les accès à l'Assemblée Nationale, aux Champs-Elysées ou encore à la place de la Concorde, le cortège ayant commencé à défiler depuis les Invalides.
La commission mixte paritaire a adopté l'article 7 du projet de loi qui repousse l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, ont annoncé plusieurs membres de la CMP. «La honte !», a déploré le chef des députés LFI Mathilde Panot qui y siège, en dénonçant «la complicité des LR».
Entre 2 000 et 2 500 personnes ont défilé à Morlaix (Finistère), ville où la permanence de la députée macroniste Sandrine Le Feur a été bloquée par des palettes de bois, selon le journaliste Jonathan Konitz.
Moins d'un quart des salariés d'EDF (22,45%) avaient cessé le travail aujourd'hui à la mi-journée pour la huitième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, selon la direction de l'entreprise. Cette participation est en très forte baisse par rapport à la précédente journée de mobilisation en semaine, le 7 mars, lors de laquelle la direction avait fait état de 41,5% de grévistes à la mi-journée.
«On constate une très grande combativité sur le terrain», a déclaré le leader des Insoumis Jean-Luc Mélenchon, se félicitant de l'entrée en lutte des éboueurs et plus généralement des «petites payes», ce qui démontre selon lui l'ampleur du rejet de la réforme. Il a également ironisé sur les manœuvres de la majorité pour «rouler tout le monde», à commencer par Les Républicains, «une espèce de bagage accompagné qui attend qu'on le descende du train», en référence aux travaux de la commission mixte paritaire qui se réunit actuellement.
A Lyon, le cortège est «une nouvelle fois massif» d'après le journaliste du Figaro Antoine Sillières, avec «quelques dizaines de gilets jaunes et manifestations vêtus de noir» devant les services d’ordre syndicaux. «Les métros, trams et bus roulent normalement malgré l'appel à la grève» à Lyon, relève-t-il, même si le mouvement social est en revanche suivi à la SNCF, avec de nombreuses suppressions de train dans la région lyonnaise.
La manifestation nantaise a connu des tensions, la police ayant effectué des tirs de gaz lacrymogène après avoir été la cible de jets de projectiles. Plusieurs commerces et une agence d'intérim ont été dégradés, selon la journaliste du Figaro Laurène Trillard. Une assemblée générale interprofessionnelle doit se tenir vers 17h pour décider des suites du mouvement.
Toujours selon Révolution Permanente, des manifestants sont venus soutenir les éboueurs en grève dans le 20e arrondissement en entonnant le slogan «Darmanin, fumier, on va te composter», alors que le ministre de l'Intérieur souhaite réquisitionner les grévistes pour mettre fin à l'accumulation des ordures dans la capitale.
Le siège de la RATP a été envahi par des manifestants, qui y ont entonné des chants et craqué des fumigènes, rapporte le média de gauche radicale Révolution Permanente. Selon le journaliste du Parisien Victor Tassel, Thomas Portes, le député LFI mis en cause pour sa photo avec le pied sur un ballon à l’effigie du ministre Olivier Dussopt, était présent aux côtés des manifestants. Aucune dégradation n'a été signalée, précise le reporter.
Le courant a été coupé au domicile du chef des sénateurs LR, Bruno Retailleau, la CGT Energie de Vendée ayant revendiqué cette action en affirmant avoir passé le logement de l'élu, qui soutient sans faille la réforme, «en sobriété énergétique». L'information a été confirmée par Le Figaro, le sénateur ayant condamné des «actes de malveillance [...] inacceptables» et fait part de son intention de porter plainte.
Le cortège parisien doit s'élancer à 14h depuis l'esplanade des Invalides (7e arrondissement), la place d'Italie (13e) étant le point d'arrivée de la manifestation. Selon le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez, «il n’y a pas de résignation ou de lassitude de notre côté», malgré des chiffres semblant indiquer une baisse de la mobilisation dans une série de villes. «Le président de la République ne nous a pas pris au sérieux», a-t-il déploré devant la presse.
Son homologue de la CFDT Laurent Berger s'est quant à lui adressé aux parlementaires : «Ne votez pas cette loi», a-t-il exhorté. «Une colère et un ressentiment s’installent, face à l’obstination du gouvernement», a-t-il encore ajouté, aux côtés des autres leaders syndicaux.
La CGT Énergie a lancé un «ultimatum» à Storengy, filiale d'Engie, pour qu'elle mette en œuvre d'ici au 15 mars au soir une importante baisse de pression dans les réseaux de gaz, sans quoi les grévistes pourraient décider de priver de gaz certains clients industriels.
«L'assemblée générale de l'ensemble des sites de stockage de Storengy a décidé […] de changer de créneau d'attaque» avec «un ultimatum» lancé à «la direction pour faire baisser l'ensemble du réseau [...] à 49.3 bars symboliquement», a indiqué à l'AFP Frédéric Ben pour la CGT Énergie. Le syndicaliste fait ainsi référence à la perspective de voir la réforme adoptée par le recours à cet article de la Constitution, régulièrement dénoncé par les oppositions comme synonyme d’un passage en force.
Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a quant à lui assuré lors d’un point presse que «l’hypothèse d’un 49.3 n'a pas été évoquée en Conseil des ministres», la majorité semblant croire dans ses chances de réunir une majorité de députés lors du vote du texte le 16 mars, ce qui la dispenserait de l’emploi de cette arme constitutionnelle.
«La manifestation contre la réforme des retraites s’élance à l’instant dans les rues de Rennes», relaye France Bleu Armorique, notant que les lycéens et les étudiants sont en tête du cortège. «Grève générale jusqu’au retrait», scandent les manifestants parmi d'autres slogans.
La présidente des députés LFI juge sur LCP que la commission mixte paritaire qui se réunit actuellement est «hors-sol» et en état «d’apesanteur sociale», faisant référence aux mobilisations en cours. «Nous n'avons aucune des informations budgétaires alors que nous sommes sur un texte budgétaire», a aussi dénoncé Mathilde Panot. «On est dans un texte qui nous a été présenté [...] à l'arrache, qui présente des reculs par rapport à celui qui nous avait été déjà présenté en hémicycle», a pour sa part déploré l'écologiste Sandrine Rousseau.
Le Journal du Centre fait état d'environ 1 500 manifestants à Nevers, estimant que «la mobilisation semble moins importante que lors des précédentes journées». La permanence de Perrine Goulet, députée du MoDem de la circonscription, était placée sous surveillance policière, rapporte le quotidien régional.
Des blocages routiers sont recensés dans plusieurs villes : à Poitiers (Vienne), La Nouvelle République fait état de plusieurs ronds-points occupés par des manifestants, paralysant l'accès à une zone commerciale. A Saint-Dizier (Haute-Marne), des membres de l’intersyndicale ainsi que des Gilets jaunes bloquent le rond-point de Marnaval, empêchant la circulation.
«A Versailles, deux tonnes de nourriture apportées par le Modef [Mouvement de défense des exploitants familiaux] et la Confédération paysanne et distribuées ce matin avec les cheminots !», a salué le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, alors qu'une manifestation doit prendre le chemin du château à la mi-journée. «Ceux qui nous nourrissent et ceux qui font tourner notre industrie, solidaires contre la réforme des retraites», s'est félicité le dirigeant communiste.
A Nantes (Loire-Atlantique), le siège départemental du Medef a été recouvert de peinture dans la nuit du 14 au 15 mars, selon la journaliste du Figaro Laurène Trillard. La manifestation a débuté dans la ville, connaissant là aussi une moindre affluence, selon Ouest-France.
Selon Le Télégramme, la manifestation à Carhaix (Finistère) connaîtrait une mobilisation moins forte que lors des précédentes journées de protestation. Une moindre affluence serait aussi constatée à Brest, la sous-préfecture du département, d'après le média local Côté Brest.
Au Havre (Seine-Maritime), «le cortège intersyndical vient de rejoindre les dockers et portuaires», rapporte le média local Tendance Ouest. Les dockers du port seront en grève jusqu’au 17 mars.
«Colère bruyante dans les rues d’Arras», constate le journaliste de La Voix du Nord Laurent Boucher. Selon lui, plusieurs milliers de personnes participent au défilé, «sans doute un record» dans cette ville du Pas-de-Calais pour s’opposer au vote imminent de la loi.
Le départ de la manifestation marseillaise est prévu aux alentours de 10h30. Plus tôt dans la matinée, La Provence signalait que 150 personnes s'étaient rassemblées pour bloquer le lycée Montgrand, situé dans le 6e arrondissement de la ville.
Des manifestants, dont des enseignants, étaient mobilisés depuis ce matin contre la réforme des retraites devant le rectorat de Rouen. La police est intervenue pour rabattre les manifestants sur la chaussée, alors qu'ils débordaient sur la route, donnant lieu à quelques bousculades entre protestataires et policiers.
Les salariés du secteur de l'énergie restent mobilisés pour cette nouvelle journée d'action. «Il y a du monde ce matin à la centrale nucléaire de Saint-Laurent-Nouan [Loir-et-Cher] pour manifester contre la réforme des retraites !», ont constaté nos confrères de La Nouvelle République présents sur place.
La filiale de GRTgaz, Elengy, qui exploite les terminaux méthaniers en France, confirme que la grève sur ses trois terminaux de gaz naturel liquéfié va être reconduite jusqu'au 21 mars, selon l'agence de presse Reuters.
Les conditions dans lesquelles se réunit la commission mixte paritaire (CMP) font l’objet d’une polémique, la majorité et la droite ayant critiqué l’intention du leader du groupe LFI Mathilde Panot de rendre compte des débats de la CMP au fur et à mesure au moyen de points réguliers sur les réseaux sociaux.
Selon le patron des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau, il s’agit d’une «guignolisation de la vie politique». «Elle parle d'une démocratie de couloirs et elle veut une démocratie spectacle», a-t-il taclé sur France Inter. De la même manière, le ministre du Travail Olivier Dussopt a estimé sur Public Sénat que «la tendance de LFI, c’est de vouloir casser les règles et remettre en cause le fonctionnement des institutions», rappelant qu’un compte-rendu écrit des réunions de la CMP est prévu.
Mathilde Panot a publié un premier tweet à propos de la CMP, selon lequel la rapporteur de la majorité se réjouirait de «l'accord» qui va être trouvé, évoquant des «avancées sociales» du texte, ce que conteste LFI.
«Profits en baisse pour Carrefour aujourd’hui. Amiens Nord est bloqué !», s'est félicité le député insoumis François Ruffin en relayant des photos de l'occupation d'un rond-point par des manifestants, dont des syndicalistes de la CGT et de la CFDT, dans une zone commerciale de la préfecture de la Somme.
Le périphérique de Caen (Calvados) est bloqué par des manifestants depuis 5h du matin, rapporte Ouest-France, l'opération devant se poursuivre jusqu'à la mi-journée.
Les éboueurs de Paris restent mobilisés et ont annoncé qu'ils reconduisaient leur mouvement jusqu’au 20 mars, alors que l’accumulation des déchets dans les rues de la capitale donne lieu à de vives polémiques et que le ministre de l’Intérieur Gérard Darmanin envisage de réquisitionner les personnels grévistes.
«Vous ne nous voyez jamais, mais quand on n’est plus là, toute la ville s’effondre. On croule sous les critiques parce que la ville est une déchèterie. Quand on nous aura dégoûté du métier à force d’être pénalisés, allez chercher ces mêmes bureaucrates pour nous remplacer », ont-ils lancé sur Twitter.
Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l'Assemblée nationale et membre de la commission mixte paritaire qui se réunit ce 15 mars pour finaliser le texte de la réforme des retraites, a condamné sur RTL «une déclaration de guerre sociale» de la part du ministre, et précisé que les Insoumis avaient remis un chèque de 20 000 euros aux grévistes pour les aider à tenir.
Près de 400 manifestants se sont réunis devant le siège de la compagnie de transport maritime CMA-CGM à Marseille dans le cadre de la mobilisation contre la réforme des retraites, aux cris de «Saadé, rends l’argent !», interpellant directement le dirigeant de l’entreprise Rodolphe Saadé. La CMA-CGM a réalisé des bénéfices particulièrement élevés ces dernières années, avec un record de 24 milliards d'euros en 2022.
Aucun ferry ne quittera le port de Marseille à destination de la Corse et du Maghreb jusqu'à ce week-end au moins, précise France 3, rappelant qu’une opération «ports morts» est annoncée par la CGT pour le 16 mars, dans la foulée de cette huitième journée de mobilisation.
Ce 15 mars, jour de l’examen du texte en commission mixte paritaire, la mobilisation se poursuit contre la réforme des retraites – rejetée par une majorité de Français. A l'appel des syndicats, les opposants au projet du gouvernement se mobilisent dans tout le pays, où de nombreuses actions sont prévues.
Si la RATP a prévu un trafic quasi normal pour les métros, bus et tramways, le service des RER devrait en revanche être «très perturbé» pour cette huitième journée de mobilisation interprofessionnelle. Le secteur aérien est également touché par le mouvement : la Direction de l'aviation civile prévoit ainsi que 20% des vols seront annulés à l'aéroport de Paris-Orly le 15 mars.
La grève concernera également les zones portuaires. Après avoir appelé à trois jours d'arrêt de travail, le secrétaire général adjoint de la Fédération nationale CGT des ports et docks Serge Coutouris a fait savoir que ce 15 mars serait une journée «ports morts» : «Durant toute la journée, rien ne rentre et rien ne sort [des ports].»
Alors que la France est partiellement paralysée depuis plusieurs jours, Clément Beaune, ministre chargé des Transports interrogé sur France 2, a de son côté prévu que ce 15 mars ne serait pas une «journée noire».
La commission mixte paritaire réunissant députés et sénateurs se réunit ce 15 mars pour se mettre d'accord sur une version du texte controversé, qui sera soumis − si un compromis est trouvé entre les députés et sénateurs − au vote du Sénat puis de l'Assemblée le 16 mars. La majorité macroniste table sur une victoire d'une courte tête au Palais Bourbon, ce qui lui permettrait de se dispenser de l'utilisation de l'article 49.3 de la Constitution, tandis que les oppositions envisagent une ou plusieurs motions de censure.
Selon un sondage diffusé par BFM TV le 6 mars, une majorité de Français soutiendraient le mouvement syndical dans sa lutte contre la réforme, soit 59% des personnes sondées.