En plus d’un agenda international chargé (Covid-19, élection biélorusse, coup d’Etat au Mali, tensions gréco-turques…) le président de la République française Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel devaient évoquer les perspectives de l’économie européenne lors de leur rencontre au fort de Brégançon ce 20 août.
En juillet, le couple a usé de tout son poids au sein de l’Union et de la zone euro pour obtenir, malgré la réticence des «quatre frugaux» (Autriche, Danemark, Pays-Bas et Suède) la création en 2020 d’un fonds européen pour la relance post-Covid-19 doté de 750 milliards d’euros, dont 390 financés par de la dette collective.
Peut-il aller plus loin pour garantir la solidité de la reprise économique de l’Europe, attendue à une moyenne de +5,8% en 2021, avant leurs échéances respectives : élections fédérales en Allemagne en 2021 et élection présidentielle en France l’année suivante ?
Sur la question de l’endettement, les conservateurs de la CDU rangés derrière Angela Merkel sont loin d’avoir renoncé à la rigueur, même s’ils ont dû se résoudre, en 2020, à un budget en déficit de 156 milliards d’euros, ainsi qu’à l’émission de près de 220 milliards de dette, soit l’équivalent de 6 points de PIB.
Entorse à la Constitution
Avec leur consentement, le Bundestag a entériné une double entorse, à la Constitution allemande qui prévoit un «frein à l’endettement», ainsi qu'à un accord, signé en 2015 par la grande coalition toujours au pouvoir, l'engageant à un solde budgétaire équilibré à 0%, c’est-à-dire ni déficitaire ni excédentaire.
Suspendre le frein à l'endettement ne doit pas devenir une habitude. Nous devons revenir à la limite d'endettement le plus rapidement possible
Mais les meilleures choses ont un fin, comme s’en est ému auprès de l’agence Reuters, peu avant la rencontre Merkel-Macron, Eckhardt Rehberg, député porte-parole de la CDU sur les questions du budget fédéral : «Suspendre le frein à l'endettement ne doit pas devenir une habitude. Nous devons revenir à la limite d'endettement le plus rapidement possible.»
Cet influent membre du parti de la chancelière allemande a également souligné qu'il n'y avait toujours pas d'accord au sein de la coalition sur une éventuelle demande du gouvernement au Parlement visant à suspendre le frein à l'endettement en 2021 également.
Or c’est ce que souhaite pour 2021 Olaf Scholz, le ministre (SPD) des Finances du gouvernement Merkel, choisi le 10 août par son parti pour le représenter dans la course prochaine à la chancellerie d’ici un an. Une estimation fiscale exceptionnelle est prévue en septembre, pour réévaluer la baisse des recettes fiscales de l’Etat, et c’est sur cette base que le candidat déclaré à la succession d’Angela Merkel entend présenter son projet de budget 2021.
Ivan Lapchine