Présidentielle au Sénégal : dépouillement commencé, résultat indécis
- Avec AFP
Après trois années d'agitation et de crise politique, le Sénégal a commencé à dépouiller les bulletins de la présidentielle dimanche 24 mars, après le premier tour de cette élection à l'issue totalement imprévisible.
Les bureaux ont fermé officiellement à l'heure prévue de 18H00 ce 24 mars au Sénégal, avant d'entamer immédiatement les opérations de dépouillement. Des agents du vote ont déversé sur une table les enveloppes contenues dans les urnes.
Les électeurs ont fait la queue par dizaines ou par centaines pendant la journée devant différents bureaux, sans qu'aucune appréciation exacte de la participation (qui était de 66% en 2019) soit fournie. Aucun incident notable n'a été rapporté et plusieurs électeurs ont exprimé leur satisfaction de voter, après les troubles provoqués par le report de l'élection.
De premiers résultats provisoires officieux pourraient être publiés dans la nuit. La date d'un éventuel second tour n'est pas fixée.
Le chef de l'opposition antisystème Ousmane Sonko, qui a fait campagne pour son second Bassirou Diomaye Faye parce que lui-même était disqualifié, a parlé de mobilisation record, notamment des jeunes sur lesquels son camp fonde ses espoirs, après avoir voté dans son fief de Ziguinchor (sud).
Les deux principaux concurrents, Bassirou Diomaye Faye et Amadou Ba, se sont déclarés « confiants » en une victoire dès le premier tour.
«Mise en garde»
Le président sortant Macky Sall, qui a voté avec son épouse à Fatick (centre-ouest), a mis en garde contre les revendications de victoire prématurées.
Quelque 7,3 millions d'électeurs étaient appelés à choisir entre 17 concurrents, dont une femme.
Amadou Ba, 62 ans, dauphin et Premier ministre il y a encore quelques semaines du président Sall, et Bassirou Diomaye Faye, 43 ans, le « candidat du changement de système » et d'un « panafricanisme de gauche », sont donnés favoris d'une compétition qui tranchera entre continuité et changement peut-être radical. L'ancien maire de Dakar Khalifa Sall, 68 ans, est cité comme outsider.
Le scrutin est suivi avec attention, le Sénégal ayant été considéré comme l'un des pays les plus stables de l'Afrique de l'Ouest.
Les Sénégalais devaient initialement voter le 25 février. Les urnes et les bulletins de dimanche arboraient toujours cette date.
Le report du vote a déclenché des violences qui ont fait quatre morts. Plusieurs semaines de confusion ont mis à l'épreuve la pratique démocratique du Sénégal, jusqu'à ce que soit arrêtée la date du 24 mars. La campagne a été réduite à deux semaines, tombant en plein mois de jeûne musulman.
La société civile, l'Union africaine, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) et l'Union européenne ont déployé des centaines d'observateurs.
C'est la première fois qu'un président sortant ne se présente pas à sa réélection.
«Nouvelles bases»
Amadou Ba se présente en héritier de l'action du président Sall et en rempart contre les « aventuriers » et les « amateurs ». « Nous allons consolider, nous allons approfondir, nous allons accélérer, nous allons améliorer et nous irons plus vite », a-t-il dit en votant avec sa femme à Dakar.
Bassirou Diomaye Faye s'est décrit comme un « choix pour la rupture » en votant au côté de ses deux femmes dans son village de Ndiaganiao (ouest).
« Macky Sall a beaucoup travaillé et c’est pour ça que je vais voter pour Amadou Ba, pour continuer le travail », dit à Dakar Ndeye Penda Faye, femme de ménage de 23 ans.
Au contraire Diaraaf Gaye, commerçant de 26 ans, a « voté Diomaye sans réfléchir ». « Il est temps que le pays parte sur de nouvelles bases avec des jeunes » au pouvoir, dit-il.
Amadou Ba doit assumer l'héritage du président Sall, une pauvreté persistante, un chômage élevé, et les centaines d'arrestations de la période récente.
Le pays a connu depuis 2021 des épisodes de troubles causés par le bras de fer entre Ousmane Sonko et le pouvoir, conjugué aux tensions sociales et au flou longtemps maintenu par le président Sall sur sa candidature à un troisième mandat. La crise s'est prolongée avec le report de la présidentielle. Plusieurs dizaines de personnes ont été tuées et des centaines arrêtées, mettant à mal l'image du pays. Injustement, selon le gouvernement.