RT France : La proposition de loi contre la haine en ligne est en lecture définitive le 13 mai. Soutenez-vous ce projet ou y êtes-vous opposé ?
Gilles-William Goldnadel(GWG) : Je voudrais d’abord dénoncer un paradoxe très curieux, et qui est notamment très français : je constate qu’existent des peurs assez excessives pour des libertés désincarnées, alors qu'elles sont inexistantes pour des libertés en danger.
Beaucoup de Français ont peur de la loi sur le traçage du Covid-19. Tant et si bien que, aujourd’hui encore, il n’y a toujours pas de traçage. Le Conseil constitutionnel a encore modifié des règlements lundi [11 mai]. On a donc perdu un temps fou par rapport à beaucoup de pays qui s’en sortent infiniment mieux que nous. Or, je ne crois pas qu’il y ait beaucoup d’institutions qui aient intérêt à savoir que je me trouve à Clermont-Ferrand à 14h05. En vérité, cette peur est excessive. En revanche, l’absence de tout pluralisme dans les radios et télévisions d’Etats me paraît infiniment plus dangereuse pour les libertés, et notamment celle d’être informé, de ne pas être intoxiqué... et cela, personne ne le dénonce ! Idem pour la loi Avia, qui est à peu près dans le même esprit. Dans un monde idéal, on pourrait parfaitement concevoir que l’idée de vouloir réprimer la haine sur les réseaux sociaux soit parfaitement louable.
Il y a, sur les réseaux sociaux – et je ne suis pas le plus mal placé pour vous en parler –, des gens qui passent leur temps à vous lancer des injures, notamment à caractère racial, et à vous expliquer que votre mère est une femme de peu de vertu. Mais comme il est extrêmement difficile de donner une définition précise de ce qu’est la haine – et c'est le but de la loi Avia d'en trouver une –, on est livré à la subjectivité la plus totale. Que cette subjectivité soit réservée à l’examen des tribunaux, je n’y vois pas vraiment d'inconvénient. Moi-même, je ne suis pas un partisan de la liberté absolue, à l’américaine. Le système est loin d’être idéal et les juges loin d’être impartiaux, mais on peut imaginer que les juges ne sont pas les plus mal placés pour arbitrer.
Par contre, pour ce qui est des plateformes qui seraient, elles, à même de pouvoir le dire, je suis extrêmement sceptique. Car je sais très bien dans quel cadre politiquement correct opère ces plateformes qui adorent le politiquement correct à l’américaine.
RT France : Pourriez-vous citer un exemple ?
GWG : Ce n'est probablement pas le meilleur exemple mais il a au moins le mérite d’être le plus récent : j’observe d’ores et déjà que Facebook a décidé d’enlever toute référence aux identitaires, et notamment aux identitaires français. Je trouve cela extrêmement discutable, et encore!, j’emploie là un euphémisme. C’est d'autant plus insupportable, lorsque l’on sait, par exemple, que ce même Facebook ne veut pas de mal à beaucoup de sites islamistes, qui sont infiniment plus haineux (pour reprendre l’expression de la loi Avia), ou au nouveau parti anticapitaliste par exemple, qui est antidémocratique, antisioniste, qui ne voit pas d’inconvénient à ce que, de temps en temps, la violence soit utilisée contre les policiers.
Donc en réalité, les plateformes en question craignent assez peu l’amende dont menace la loi Avia au cas où elles ne répondraient pas dans les 24h ou 48h à une demande d’enlever tel ou tel contenu haineux. En vérité, elles sont très intéressées à l'idée d'être autorisées légalement à utiliser ce politiquement correct dont elles raffolent ! Je vois la loi Avia d’un très mauvais œil. J’observe d’ailleurs, pour vous donner un exemple contextuel mais tristement savoureux, que la mère de la loi Avia, madame Avia elle-même, avait «liké» un trait d’esprit de monsieur Dominique Sopo, président de SOS Racisme, qui cautionnait une insulte à l'endroit de monsieur Jean Messiha. Ce dernier avait été traité de «chameau» par monsieur Yassine Belattar.
Vous voyez bien la discrimination qui existe entre individus victimes du racisme. C’est dans cet état d’esprit très discutable, plus que politiquement correct, que cette loi Avia s’insère. Il y a deux scandales : la loi elle-même, et le fait qu’il n’y ait pas de scandale. Je ne trouve pas qu’il y ait une levée de boucliers des grands défenseurs de la liberté d’expression, de la liberté de penser pour protester contre la loi Avia. Et c'est à mon avis tout à fait scandaleux.
RT France : La mobilisation massive d'activistes cherchant à faire censurer des contenus qui ne leur plaisent pas n'est-elle pas un risque ?
GWG : Malheureusement, cela existe déjà. Prenons l'exemple du CSA : il suffit que certains se plaignent en nombre de telles ou telles déclarations qui ne leur plaisent pas pour donner prétexte au CSA de pouvoir intervenir, avertir, voire réprimer. Alors que, très souvent d’autres, à tort ou à raison, se plaignent de certaines choses qui ont été dites à la télévision et le CSA ne bouge pas un doigt. Donc nous ne sommes pas du tout dans un pays de liberté. Sur le plan de la liberté d’être informé – sans être décérébré, sans être intoxiqué, lentement mais sûrement –, nous sommes dans un système de dictature soft.
RT France : Comment lutter contre la haine en ligne sans porter atteinte à la liberté d'expression ?
GWG : Il n’y a pas beaucoup de manières de procéder. La seule façon de faire, et cela m’arrive, c’est de porter plainte. La justice est bien là pour quelque chose! Vous avez toujours la possibilité de faire des copies d’écrans et de porter plainte.
J’ai déjà fait condamner des gens pour avoir insulté mes clients sur Facebook. C’est vrai qu'il faut de l’argent, il faut du temps, il faut beaucoup de choses... Et ce d'autant plus que le parquet de la République pratique exactement la même discrimination par le politiquement correct.
Quand je vois, par exemple, le parquet de Paris se saisir lui-même de poursuites contre Zemmour ou autres, contre certains propos prétendument islamophobes, et que, dans le même temps, lorsque je cite devant le haut parquet de Paris des passages entiers de livres d’islamistes qui appellent à massacrer les juifs et les chrétiens, ce même parquet ne bouge le petit doigt, je vous mentirais en vous disant que j’ai l’impression de vivre dans un pays de droit.
Tout cela relève de la même idéologie ! Que ce soit la section presse du parquet de Paris, que ce soit le CSA ou que ce soit la loi Avia, derrière, il y a toujours une sorte d’idéologie gauchisante, largement anti-occidentaliste et qui fait la pluie et le beau temps. Et c'est ce que je ne cesse de dénoncer depuis très longtemps.