Les Etats-Unis ont besoin de moderniser leur arsenal nucléaire pour maintenir une supériorité stratégique sur leurs rivaux, selon des officiers supérieurs de l'armée de l'air et de la marine.
«Notre capacité de dissuasion nucléaire s'approche d'un carrefour. Nous sommes au point où il nous faut recapitaliser simultanément chaque composante de notre dissuasion nucléaire : les armes nucléaires elles-mêmes, la triade des plates-formes, les systèmes de signalisation et d'avertissement pour soutenir nos prises de décision, les réseaux de commande et de contrôle qui assurent la connexion entre le président et les forces déployées, et nos avions tactiques à double capacité qui peuvent être équipés d'armes nucléaires non stratégiques», a expliqué Paul J. Selva, général de l'armée de l'air.
Le Pentagone prévoit de moderniser les trois parties de sa triade nucléaire (air, mer et sol) au cours des 30 prochaines années, pour un coût estimé à un billion de dollars.
RT : Les Etats-Unis cherchent à détenir la supériorité nucléaire sur la Russie, mais ne veulent pas d'une nouvelle guerre froide. Y voyez-vous une contradiction?
Bruce Gagnon (B. G.): Absolument. La supériorité nucléaire sur la Russie et la Chine et tous les autres pays de la planète que les Etats-Unis décident de voir comme des ennemis. L'économie américaine est dépendante des dépenses militaires : les armes constituent le premier produit d'exportation industrielle de ce pays. Dans de nombreuses communautés à travers le pays c'est, comme on dit, le seul emploi en ville. L'Amérique se tourne de plus en plus vers de nouveaux systèmes d'armements pour rester dans cette dépendance au militarisme.
C'est une escalade et une provocation visant la Russie et l'Europe
C'est aussi une escalade et une provocation visant la Russie et l'Europe. Surtout étant donné que l'OTAN s'élargit en Europe orientale, déplace les systèmes de défense antimissile en Roumanie et en Pologne, mettant en place des systèmes de défense antimissiles sur des destroyers en Méditerranée, en mer Baltique et en mer Noire. Nous assistons à un déploiement incroyable de systèmes d'armements de types variés. Ils sont déplacés vers l'Est, près de la Russie. Les Etats-Unis ne font pas que graisser les engrenages du complexe militaro-industriel, ils provoquent également la Russie.
RT : Pourquoi la supériorité nucléaire sur la Russie est-elle si importante alors que l'administration Trump dit vouloir un partenariat plus étroit avec la Russie ?
Il y a à Washington une guerre au sein de l'oligarchie au pouvoir en Amérique
B. G. : Je pense qu'il y a en ce moment à Washington une guerre au sein de l'oligarchie au pouvoir en Amérique. J'appelle cela la foule contre la mafia. Ni les uns, ni les autres ne sont très recommandables. Beaucoup de militants pour la paix et de progressistes à travers notre pays se retrouvent dans une situation très confuse et pensent qu'ils doivent choisir leur camp et soutenir les démocrates qui diabolisent la Russie avec une sorte de chasse aux rouges actualisée. Mais ce qu'il faut vraiment faire, c'est être critique de cette folie militaire qui n'en finit pas de grandir et par laquelle ce pays est obsédé. Peu importe qui est au pouvoir. Je pense que Donald Trump pourrait bien vouloir avoir de bonnes relations avec la Russie. Il l'a dit à plusieurs reprises lors de sa campagne. Mais il y a une faction forte : ce qu'ils appellent «l'Etat profond» (le complexe militaro-industriel, Wall Street). La campagne de Clinton représentait réellement ce dernier...
Les Etats-Unis cherchent à dominer dans tous les domaines
RT : Après l'annonce par Donald Trump d'une augmentation des dépenses militaires de 10%, la Chine a suivi, disant qu'elle allait les augmenter de 7%. Assiste-t-on à une nouvelle course aux armements à plusieurs joueurs?
B. G. : Je pense que c'est tout à fait ça. C'est dû en grande partie aux technologies spatiales... Ils veulent être en mesure de faire la guerre depuis l'espace. La Russie et la Chine demandent depuis des années à l'ONU de faire un nouveau traité interdisant les armes dans l'espace. Les Etats-Unis refusent même de négocier une telle possibilité, parce qu'ils cherchent à dominer, et ce dans tous les domaines...