RT : D’après vous, les sanctions aideront-elles à l’Espagne et le Portugal à réduire leurs déficits budgétaires ?
Tania Gonzales (T. G.) : Je crois que les sanctions n’aideront ni l'Espagne ni le Portugal à réduire leur déficit. À mon avis, les sanctions sont une sorte de chantage, qui se transforme déjà en quelque chose d’honteux, quelque chose qui ne peut pas être toléré. D'une part parce qu'il y a des pays qui ont été incapables de faire face à des déficits beaucoup plus importants que l’Espagne et le Portugal. D'autre part, il est inapproprié de parler de déficit, alors qu’en réalité nous parlons ici de la sauvegarde d’un projet politique qui fait passer le peuple en dernier. En outre, la raison pour laquelle on n’observe toujours pas de reprise économique en Espagne et pour laquelle il y a toujours un déficit se trouve dans le fait que le pays avait déjà eu recours à des mesures d'austérité similaires à celles requises aujourd’hui. Par conséquent, quand on nous dit que les sanctions ne devraient peut-être pas nécessairement être économiques, mais [qu’il faut] présenter de nouvelles mesures d'économie, tous disent que c’est du cirque, afin que le gouvernement espagnol utilise ce modèle de politique d'austérité.
La seule chose que ces mesures restrictives ont donnée c’est l’approfondissement de la pauvreté, des inégalités, non seulement en Espagne mais aussi dans toute l'Europe
RT : A quelle réaction populaire vous attendez-vous ?
T. G. : J'espère qu’il y a une issue. Parce que tout est déjà mis en place pour à nouveau recourir à ces mesures restrictives, alors que la seule chose qu'elles ont donnée c’est l’approfondissement de la pauvreté, des inégalités, non seulement en Espagne mais aussi dans toute l'Europe : en Europe, un citoyen sur quatre est pauvre. Cette aggravation des inégalités et de la pauvreté ne cesse de progresser en Europe, précisément car une politique de ce type y est encore menée. C’est pour cette raison que j'espère qu’elle ne sera pas tolérée et qu’elle sera changée.
Ce chantage sert à ce que le nouveau gouvernement applique de nouvelles restrictions et que les gens ne pensent pas le gouvernement agit mal, mais qu'il n’a pas d’autre option
RT : Pourquoi l’Union européenne a-t-elle décidé de punir l’une de ses plus grandes économies, l’Espagne ?
T. G. : C’est l'une des plus grandes économies, c’est la quatrième économie européenne. Mais elle ne fait pas partie des [économies] les plus efficaces, parce qu'il n'y a pas de croissance économique qui aiderait les citoyens à se remettre debout. Au contraire, on est en train de passer d’un modèle social où les organismes gouvernementaux et les droits sociaux étaient des piliers importants, à une société instable dans laquelle les contrats sont temporaires et les travailleurs ne gagnent pas assez pour tenir un mois, les organismes gouvernementaux sont de plus en plus abandonnés, etc. Pourquoi cette sanction est-elle envisagée ? Je pense que c'est pour justifier ce genre de politique. C’est un chantage, et si ce n’est pas le chantage de l’Europe, c’est celui des dirigeants européens qui défendent un politique d'austérité. Ce chantage sert à ce que le nouveau gouvernement applique de nouvelles restrictions et que les gens ne pensent pas le gouvernement agit mal, mais qu'il n’a pas d’autre option.
RT : Prendra-t-on de telles mesures à l’encontre d’autres pays européens qui ne remplissent pas non plus les critères financiers de l’UE ?
T. G. : Il y a d'autres pays qui ont échoué à respecter plus d'engagements que l'Espagne, le Portugal, la France, l'Allemagne et l'Italie - les grands Etats européens. Dans ces cas, il n’y a eu aucune punition. À mon avis, c’est purement politique. Dans le cas du Portugal c’est aussi associé au contexte politique, mais pas pour les mêmes raisons. Cela est dû à un gouvernement progressiste, qui essaie maintenant de renverser certaines des mesures d'austérité qui sont appliquées. Le Portugal a été puni par des sanctions de ce genre pour qu’il ne puisse continuer ses politiques progressistes, car l’inverse voudrait dire qu'il est possible de mener une politique différente en Europe, et c’est précisément ce dont on ne veut pas. Ainsi, dans le cas du Portugal, nous sommes confrontés à une punition, dans le cas de l'Espagne, à des excuses, des justifications, pour que le Parti populaire puisse continuer à détruire notre Etat.
Dans une certaine mesure, il s’agit d’une tentative de mettre une camisole de force sur un Etat membre de l’Union européenne
RT : Ces initiatives européennes, sont-elles soutenues par les gouvernements ?
T. G. : Je crois que ces initiatives sont justifiées par des gouvernements comme [celui du] Parti populaire. Dès le début, on a utilisé des excuses telles que Bruxelles, l'Europe... afin de mettre en œuvre ces politique. Et cela continue d’être un élément pour renforcer leurs arguments. Cela témoigne, entre autres, que si l'Espagne n’était pas gouvernée par le Parti populaire, si l'Espagne avait un autre gouvernement, ciblant les changements et le progrès, ils ne seraient pas en mesure de mener à bien les politiques qu'ils entendraient. Dans une certaine mesure, il s’agit d’une tentative de mettre une camisole de force sur un Etat membre de l’Union européenne. Mais nous devons comprendre que c’est un chantage, c'est-à-dire, un jeu truqué, et que ce n’est pas vrai. Vous pouvez mener une autre politique, une politique qui aidera à respecter les règles budgétaires, car pour la croissance économique, pour le développement social, pour la reprise économique dans les pays tels que l'Espagne c’est justement une autre politique qu’il faut, une politique qui nous mènera vers un modèle productif et aidera à restaurer l'économie.