Au diapason de la France, la Tunisie s'achemine vers la proclamation de l’état d'urgence dans la foulée de l'attentat contre un bus présidentiel à Tunis (14 morts et 11 blessés), dix jours après le bain de sang de Paris (130 morts).
Le Prix Nobel de la Paix 2015, décerné à quatre organisations non gouvernementales chargées de la défense des Droits de l'Homme – s'il a honoré, à juste titre, un pays qui a su assurer en douceur la transition néo-islamiste du pouvoir par l'éviction du parti Ennahdha – n'a pas conféré pour autant une immunité à la Tunisie qui figure parmi les pays arabes les plus ciblés par le djihadisme takfiriste erratique, en dehors des pays en phase de guerre intestine (Libye, Syrie, Irak, Yémen).
Le bus a explosé sur l'Avenue Mohammad V, une des grandes artères de la capitale tunisienne, à proximité du ministère de l'Intérieur. C'est dire la vulnérabilité du pays et la porosité de son dispositif de sécurité.
Des attentats djihadistes avaient déjà visé le 26 juin 2015, la Tunisie et la France ainsi que le Koweït. Bravant le tabou du mois sacré du Ramadan, les djihadistes s'étaient livrés à des attentats aussi spectaculaires que meurtriers, au deuxième vendredi du mois de ramadan, dans une démonstration de force destinée tout à la fois à terroriser leurs ennemis arabes et musulmans et à impressionner leurs adversaires occidentaux.
La Tunisie, le maillon faible du Maghreb, a pu servir d'opération de diversion à la traque française de ses propres combattants
A Sousse, 27 morts, à travers l'hôtel Impérial, la cible visait à la fois la société de consommation et le tourisme, principal source de revenus de la Tunisie, en même temps qu'elle constituait un violent rappel à l'ordre des strictes règles d'observance du Ramadan en pays musulman.
Auparavant, la tuerie du Musée du Bardo, le 18 Mars 2015, avait fait 24 tués, principalement des touristes, et 45 blessés.
Au total pour 2015, la Tunisie a subi trois attentats, faisant au total 65 morts. Le pays paie le prix de l'éviction du pouvoir du parti Ennahdha, la branche tunisienne de la confrérie des Frères Musulmans, les compagnons de route du Front al-Nosra, le commanditaire du carnage de Charlie Hebdo, qui fait néanmoins du «bon travail en Syrie», selon l'expression de Laurent Fabius. La Tunisie, le maillon faible du Maghreb, a pu servir d'opération de diversion à la traque française de ses propres combattants.
Au-delà de cette déflagration tous azimuts, les djihadistes ont voulu apporter la démonstration de leur capacité opérationnelle omnidirectionnelle dans une stratégie apocalyptique, dont la France et certains pays arabes en paient le prix le plus lourd du fait de son laxisme moral.