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Russie / Ukraine : Biden met en garde contre de futures pénuries alimentaires en Occident

S'il a vanté l'unité du camp occidental, Joe Biden a mis en garde contre des pénuries de nourriture qui pourraient résulter du train de sanctions adopté contre la Russie. Il a de plus lui-même mis en cause l'efficacité de ces mesures de rétorsion.

«Les pénuries alimentaires vont se concrétiser», a averti le président des Etats-Unis Joseph Biden le 24 mars à Bruxelles, après les sommets du G7 et de l'OTAN, en évoquant les conséquences des sanctions adoptées à l'encontre de la Russie. Le dirigeant a assuré que les Etats-Unis comme le Canada, gros producteurs de céréales, allaient augmenter leurs exportations en conséquence, les Etats-Unis prévoyant de consacrer 11 milliards de dollars (environ 10 milliards d'euros), durant les cinq prochaines années, pour répondre aux menaces sur la sécurité alimentaire et à la malnutrition dans le monde. 

«Le prix des sanctions ne pèse pas uniquement sur la Russie, mais également sur un nombre considérable d'autres pays, dont les pays européens mais aussi notre pays», a encore fait remarquer le dirigeant étasunien lors de son intervention sur le sujet.

Macron anticipe une possible «famine inéluctable»

La guerre comme les conséquences indirectes des sanctions occidentales touchent un nombre important de pays, car la Russie et l'Ukraine sont «les greniers à blé de l'Europe», comme l'a rappelé Joe Biden, avec respectivement 75 millions et 33 millions de tonnes produites chaque année. Combinés, les deux pays représentent environ 30% des exportations mondiales de blé.

Dans le cadre du G7, les Etats-Unis et le Canada ont évoqué la manière «d'accroître et de distribuer des ressources alimentaires plus rapidement», a précisé le président américain, ajoutant que des discussions étaient en cours «avec les Européens et tous les autres pays pour qu'ils suspendent toutes les restrictions sur leurs exportations alimentaires».

Cette inquiétude de pénuries est partagée par Emmanuel Macron, qui a appelé Moscou à être «responsable» en permettant que les semis en Ukraine aient lieu, faute de quoi il faudra envisager «une famine inéluctable» dans les 12 à 18 mois à venir, avec des pénuries de céréales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, comme par exemple en Egypte : ce pays dépend à 80% des céréales russes et ukrainiennes pour nourrir sa population. La porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, avait quant à elle précisé le 21 mars que les inquiétudes américaines ne concernaient pas une pénurie de nourriture sur le sol des Etats-Unis, mais bien les impacts sur des pays déjà fragiles sur le plan alimentaire, «en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est».

«Les sanctions ne dissuadent jamais» : un aveu d'impuissance ?

Au-delà de cette alerte, le président américain a semblé douter de l'efficacité des mesures adoptées par les Occidentaux. Au cours de la conférence de presse du 24 mars, il a certes clamé que l'OTAN n'avait «jamais, jamais été aussi unie», mais, alors qu'une journaliste l'interrogeait sur l'absence d'effet dissuasif des mesures occidentales sur la Russie, le président américain, sur la défensive, a laissé percer un certain agacement. «Les sanctions ne dissuadent jamais. Vous [les journalistes] n'arrêtez pas d'en parler. Les sanctions ne dissuadent jamais», a répété Joe Biden, alors même que les Etats-Unis venaient d'annoncer de nouvelles mesures financières visant plus de 300 députés russes et une cinquantaine d'entreprises de l'industrie de la défense.

L'objectif, a développé Joe Biden, consiste à «faire mal» au président russe Vladimir Poutine, pas seulement à court terme, mais «pour le reste de l'année». «C'est ça qui va l'arrêter», a-t-il affirmé. Comme le relève l'AFP, le président américain a éprouvé les limites de l'action des Occidentaux à l'occasion de sa tournée en Europe : «En termes de sanctions par exemple, après les rafales de mesures des premières semaines, les trois sommets n'ont, sans surprise, pas accouché de décisions spectaculaires», constate l'agence de presse française. La question d'un embargo sur les hydrocarbures russes, notamment, est plus que délicate pour des pays européens très dépendants sur le plan de leurs approvisionnements.