Le 1er mars, un discours du ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a été diffusé devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU. L'intervention du chef de la diplomatie russe – qui aurait dû venir en personne à Genève mais a annulé son déplacement en raison des sanctions anti-russes lui interdisant le survol de l'Union européenne – a été boycotté par de nombreux diplomates en raison de l'intervention militaire russe en Ukraine.
Lavrov : «Nous ne pouvons laisser ce réel danger sans réaction»
Dans son discours, Sergueï Lavrov a expliqué qu'il était «inacceptable» pour Moscou que, en contradiction avec les principes fondamentaux du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, des armes nucléaires des Etats-Unis se trouvent toujours sur le territoire de certains pays européens.
«La pratique perverse des missions nucléaires conjointes impliquant des pays non-nucléaires de l’OTAN persiste. Dans le cadre de ces missions, le scénario d’une utilisation d’armes nucléaires contre la Russie fait l’objet d’exercices», a-t-il noté. «Il est grand temps de ramener les armes nucléaires américaines à la maison, et de démanteler complètement les infrastructures associées en Europe», a plaidé le ministre.
Sergueï Lavrov a par ailleurs estimé que «la tragédie de l'Ukraine» était «le résultat de la complaisance des mécènes occidentaux avec le régime criminel qui s'est formé là-bas après le sanglant coup d'Etat anticonstitutionnel de février 2014».
«Aujourd'hui, les dangers que représente le régime de [Volodymyr] Zelensky pour les pays voisins, et la sécurité internationale d'une manière générale, ont considérablement augmenté après que les autorités de Kiev ont commencé à jouer à des jeux dangereux liés aux projets d'acquisition de leurs propres armes nucléaires», a-t-il ajouté, avant de poursuivre : «Les déclarations irresponsables faites à ce sujet ne sont pas de vaines bravades. L'Ukraine dispose des technologies nucléaires soviétiques ainsi que des vecteurs de telles armes. Nous ne pouvons laisser ce réel danger sans réaction.»
Le 19 février, dans une allocution devant la conférence de Sécurité de Munich, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait expliqué initier des consultations dans le cadre du Mémorandum de Budapest. «Le ministre des Affaires étrangères a été chargé de les convoquer. Si nous ne parvenons à aboutir à des décisions concrètes qui garantissent la sécurité de notre Etat, l'Ukraine aura tout à fait le droit de croire que le mémorandum de Budapest ne fonctionne pas et que toutes les décisions du paquet de 1994 ont été remises en cause», avait-il affirmé. «Le paquet de décisions de 1994» auquel Volodymyr Zelensky faisait référence suggère un lien entre la décision de l'Ukraine d'adhérer au Traité sur la non-prolifération nucléaire (TNP) en tant qu'Etat non-nucléaire, et les garanties de sécurité codifiées dans le Mémorandum de Budapest de 1994, notamment celle fournie par la Russie, entre autres, «respecter l'indépendance et la souveraineté et les frontières existantes de l'Ukraine».
De son côté, le président russe Vladimir Poutine avait annoncé ce 27 février mettre en alerte la «force de dissuasion», pour répondre aux actes hostiles des pays européens dans le domaine économique, ainsi qu'aux déclarations jugées agressives de l'OTAN à l'égard de la Russie. Les forces de dissuasion russes sont un ensemble d'unités dont le but est de décourager une attaque contre la Russie, «y compris en cas de guerre impliquant l'utilisation d'armes nucléaires», selon le ministère de la Défense.
Depuis plusieurs jours, l'Ukraine est le théâtre d'une offensive militaire russe présentée par Vladimir Poutine comme une opération de «démilitarisation et de dénazification» du pays, et qui fait suite à la reconnaissance par Moscou de l'indépendance des républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk. Kiev et ses alliés y voient une guerre d'invasion, même si le président russe avait affirmé, lors de l'annonce de l'opération, qu'il ne planifiait pas d'«occupation» des territoires ukrainiens. L'opération militaire russe a fait l'objet de multiples condamnations sur la scène internationale et a mené à de nouvelles sanctions contre Moscou.