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Retrait militaire du Mali, sentiment anti-français en Afrique : Emmanuel Macron fait le bilan

Alors que la France et plusieurs pays européens ont annoncé ce 17 février leur retrait du Mali, Emmanuel Macron s'est exprimé en conférence de presse sur le bilan de la présence française dans le pays et le sentiment anti-français en Afrique.

Le président français Emmanuel Macron a expliqué ce 17 février «récuser complètement» l'idée d'un échec français au Mali et a commenté le sentiment anti-français en Afrique. Il s'exprimait lors d'une conférence de presse, alors que Paris a décidé de retirer ses troupes du pays après neuf ans de lutte antidjihadiste.

«Que se serait-il passé en 2013 si la France n'avait pas fait le choix d'intervenir ? Vous auriez à coup sûr un effondrement de l'Etat malien», a-t-il fait valoir, en ajoutant qu'«ensuite nos militaires ont obtenu de nombreux succès», dont l'élimination de l'émir d'Al Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi) en juin 2020.

Macron attribue le sentiment anti-français... à la Russie

Revenant sur le sentiment anti-français qui existe au Mali et qui a compliqué la mission des militaires sur place, Emmanuel Macron a estimé qu'il était le fait d'activistes «financés par la Russie et d'autres puissances» : «Je constate que beaucoup des gens qui expriment sur les réseaux sociaux des messages anti-Français sont des gens qui sont financés. Ce sont des activistes qui sont financés par la Russie, et par d'autres puissances, et qui ont installé de ce discours, ce langage. Les réseaux sociaux sont devenus des lieux de mobilisation, pour parfois pousser les gens à la grande violence, les désinformer, et en faire des instruments de guerre ou de position politique.»

La fermeture des bases au Mali prendra «4 à 6 mois»

Le chef d'Etat a ensuite présenté un calendrier de ce retrait et notamment de la fermeture des bases dont dispose l'armée française dans le pays. «Nous allons donc progressivement fermer, dans un exercice qui va prendre 4 à 6 mois, les bases qui sont présentes au Mali. Pendant ce temps [...] nous allons continuer d'assurer les missions de sécurisation de la Minusma [la Mission de l'Onu au Mali, forte de plus de 13 000 Casques bleus]», a-t-il ainsi fait savoir. «Ce retrait se traduira par la fermeture des emprises de Gossi de Ménaka et de Gao, il sera effectuée de manière ordonnée, avec les forces armées maliennes et avec la Mission des Nations unies au Mali», a-t-il ajouté.

Des militaires européens participant au groupement de forces spéciales Takuba seront par ailleurs «repositionnés aux côtés des forces armées nigériennes dans la région frontalière du Mali», a annoncé Emmanuel Macron.

De son côté, l'état-major des armées françaises a précisé ce 17 février que quelque 2 500 à 3 000 soldats français resteront déployés au Sahel au terme de leur retrait du Mali. Actuellement, 4 600 militaires français sont déployés dans la bande saharo-sahélienne dont 2 400 au Mali, a indiqué le porte-parole de l'état-major, le colonel Pascal Ianni, lors d'un point de presse à Paris. 

Macron accuse Wagner d'être au Mali pour «sécuriser le pouvoir», malgré les démentis des autorités

Lors de sa conférence de presse, Emmanuel Macron a en outre accusé la société de sécurité privée russe Wagner d'être au Mali «pour servir ses intérêts économiques propres et sécuriser la junte au pouvoir à Bamako», bien que les autorités maliennes ont toujours démenti la présence de ce groupe sur leur territoire.

«Ces mercenaires sont présents depuis des années en Libye pour prélever des ressources et ce qui doit revenir au peuple libyen [...] Ils sont présents depuis plusieurs années en République centrafricaine avec des exactions terribles contre les populations civiles», a encore soutenu le président français. «Ils arrivent au Mali avec des finalités prédatrices [...] parce que la junte, qui est au pouvoir après deux coups d'Etat, considère que ce sont les meilleurs partenaires qu'ils peuvent trouver pour protéger leur propre pouvoir, pas pour lutter contre le terrorisme», a-t-il martelé.

«Je veux ici [...] distinguer [cette présence] d’un lien avec l’Etat russe. La Russie elle-même en tant qu’Etat a déclaré publiquement qu’elle n’était pas derrière cette présence», a poursuivi le dirigeant français précisant encore : «Il ne faut pas confondre ou lier ce qu’il se passe là avec d’autres sujets géopolitiques qui nous occupent et dans lesquels la Russie est un acteur en tant qu’état souverain, assumé, un acteur militaire et diplomatique».

Et pour cause, interrogé le 21 octobre dernier sur les activités d'entreprise de sécurité privées russes en Afrique, Vladimir Poutine avait pour sa part rappelé que celles-ci n'étaient pas liées à l'Etat russe. Il avait ajouté que Moscou était prêt à agir si ces entreprises compromettaient les intérêts nationaux. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait de son côté martelé que le gouvernement russe n'avait «rien à voir» avec la société Wagner. Le chef de la diplomatie russe avait par là même condamné la tendance européenne à s'inquiéter de l'arrivée de nouveaux acteurs étrangers sur le terrain sécuritaire malien et rappelé que l'activité des entreprises militaires privées n'était «pas du tout un phénomène russe» mais trouvait son origine dans les pays occidentaux.

«Vous allez avoir de plus en plus de sociétés privées qui utilisent l'insécurité liée au terrorisme [...], elles ne seront d'ailleurs pas que russes», a encore déclaré Emmanuel Macron, estimant à environ 800 le nombre de mercenaires actuellement déployés au Mali, un chiffre déjà évoqué par plusieurs sources sécuritaires françaises.

Dans un communiqué publié le 24 décembre dernier, le gouvernement du Mali avait pour sa part apporté «un démenti formel à ces allégations sans fondement [sur] un prétendu déploiement des éléments d'une société de sécurité privée au Mali», exigeant que des sources indépendantes apportent des preuves de ces allégations.

A l'antenne de RT France mi-janvier, Nouhoum Sarr, membre du Conseil national de transition du pays, avait pour sa part estimé que la présence présumée de Wagner au Mali était une «rumeur» propagée par les anciennes puissances coloniales.

«C’est une plaisanterie. Dans notre pays, il n’y a pas de Wagner. Nous coopérons d’Etat à Etat. Nous coopérons avec les autorités légitimes russes tout comme nous coopérons avec les autorités turques, américaines… Nous coopérons avec toutes les autorités», avait lancé Nouhoum Sarr, avant de poursuivre : «Je pense que c’est une rumeur. Une calomnie. Le monde est habitué. C’est comme quand on a dit que l'Irak avait l'arme nucléaire, des armes de destruction massive.»