L'Iran a estimé le 5 janvier que les mesures prises par les Etats-Unis pour renoncer à certaines sanctions étaient «bonnes mais pas suffisantes», peu après l'annonce par Washington de la levée de restrictions liées au programme nucléaire civil de Téhéran.
Le département d'Etat américain a indiqué le 4 janvier qu'il rétablissait des dérogations-clés protégeant de la menace des sanctions américaines des pays et sociétés étrangers impliqués dans des projets nucléaires non militaires. L'initiative prise par l'administration de Joe Biden apparaît comme un geste notable en direction de Téhéran au moment où, à Vienne, les négociations pour sauver l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien entrent dans la dernière ligne droite.
En 2018, le président d'alors, Donald Trump, avait retiré les Etats-Unis de l'accord et rétabli l'essentiel des sanctions économiques américaines contre Téhéran. En mai 2020, alors que Donald Trump ne parvenait pas à faire plier la République islamique pour obtenir un «meilleur accord», son administration avait fini par supprimer aussi d'autres dérogations concernant notamment le réacteur de Téhéran destiné à la recherche, et celui d'Arak, modifié sous le contrôle de la communauté internationale de manière à rendre impossible la production de plutonium à usage militaire.
«La levée de certaines sanctions peut se traduire [...] par la bonne volonté [des Etats-Unis]. Les Américains en parlent, mais il faut savoir que ce qui est sur le papier est bon mais pas suffisant», a déclaré le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian.
L'Iran veut tirer des «avantages économiques réels» de l'accord
«Nous avons dit à la partie américaine, par l'intermédiaire de certaines personnes [...], de faire preuve de sa bonne volonté dans la pratique», a ajouté le chef de la diplomatie iranienne, expliquant que son pays attendait que «quelque chose de tangible se produise».
L'amiral Ali Shamkhani, secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale en Iran, n'a de son côté accordé que peu de crédit à l'annonce américaine. «On ne considère pas ce "show" de lever des sanctions comme un geste constructif», a-t-il expliqué dans un tweet.
«Des avantages économiques réels, efficaces et vérifiables pour l'Iran sont une condition nécessaire pour la conclusion d'un accord», a-t-il ajouté, alors que les sanctions américaines ont plongé l'Iran dans une crise économique et sociale. En réponse aux sanctions américaines, les autorités iraniennes se sont progressivement affranchies des restrictions imposées par l'accord à leurs activités nucléaires.
Le président étasunien Joe Biden veut revenir dans l'accord de 2015 pour garantir que les activités iraniennes demeurent strictement civiles et pacifiques, à condition que l'Iran renoue aussi avec ses engagements.
Le négociateur russe, Mikhaïl Oulianov, a salué le 5 janvier sur Twitter la décision américaine comme «un pas dans la bonne direction». Elle permettra selon lui «d'accélérer» le rétablissement de l'accord de 2015 conclu à Vienne entre Téhéran et les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie), plus l'Allemagne, et pourrait indiquer que les pourparlers «sont entrés dans leur phase finale». L'Allemagne, la France et le Royaume-Uni (E3) ont également salué dans un communiqué la décision américaine.
«Cela devrait faciliter les discussions techniques nécessaires pour soutenir les discussions» à Vienne, indiquent-ils, exhortant l'Iran à «saisir rapidement cette opportunité».
Les négociations en cours depuis le printemps dernier, coordonnées par l'Union européenne, se déroulent entre Iraniens et grandes puissances (Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni et Russie), avec la participation indirecte des Américains. Après des mois d'impasse, des progrès ont été réalisés ces dernières semaines.
«Téhéran prend en compte soigneusement toute mesure allant dans le bon sens pour remplir les obligations mentionnées dans l'accord sur le nucléaire», a déclaré de son côté le porte-parole de la diplomatie iranienne, Saïd Khatibzadeh, cité par des médias locaux.
Dans la capitale autrichienne, les discussions ont été suspendues la semaine dernière et doivent reprendre dans les prochains jours. L'heure est aux «décisions politiques» pour parvenir à un accord, ont prévenu plusieurs négociateurs, soulignant qu'il ne restait plus qu'une poignée de semaines pour éviter un échec de la diplomatie et une escalade des tensions.