«Nous demandons instamment au ministère britannique des Affaires étrangères de mettre fin à ses activités provocatrices, d'arrêter de diffuser des absurdités», a réagi ce 23 janvier la diplomatie russe sur Twitter, après que Moscou a été accusé la veille de «chercher à installer un dirigeant prorusse à Kiev» et d'envisager «d'envahir et d'occuper l'Ukraine», au lendemain de pourparlers américano-russes à Genève. «La désinformation diffusée par le ministère britannique des Affaires étrangères est une preuve supplémentaire que ce sont les pays de l'OTAN, dirigés par les Anglo-Saxons, qui aggravent les tensions autour de l'Ukraine», explique encore le ministère russe des Affaires étrangères.
Dans un communiqué, le chef de la diplomatie britannique Liz Truss avait dénoncé «l'ampleur de l'activité russe visant à ébranler l'Ukraine». «Selon nos informations, le gouvernement russe cherche à installer un dirigeant prorusse à Kiev, tandis qu'il envisage d'envahir et d'occuper l'Ukraine», a-t-elle ajouté. Le Foreign Office affirme que «l'ex-député ukrainien Ievgeniï Mouraïev est considéré comme un candidat potentiel», et que les services de renseignement russes entretiendraient «des liens avec de nombreux anciens hommes politiques ukrainiens».
La diplomatie britannique évoque ainsi les noms de Serguiï Arbouzov (le premier vice-Premier ministre de l'Ukraine de 2012 à 2014, puis Premier ministre par intérim), d'Andriï Klouïev (qui dirigeait l'administration présidentielle de l'ex-chef de l'Etat ukrainien Viktor Ianoukovitch), de Volodymyr Sivkovytch (l'ancien secrétaire adjoint du Conseil national de sécurité et de défense ukrainien) ou encore de Mykola Azarov (le Premier ministre de l'Ukraine de 2010 à 2014).
Accord pour une rencontre entre les ministres russe et britannique de la Défense
«Certains d'entre eux sont en contact avec des agents des services de renseignement russes actuellement impliqués dans la planification d'une attaque contre l'Ukraine», accuse encore le ministère, sans fournir de preuves à l'appui de ces affirmations.
Pour les Etats-Unis, ces accusations sont «profondément préoccupantes». «Ce genre de complot est profondément préoccupant. Le peuple ukrainien a le droit souverain de déterminer son propre avenir, et nous sommes aux côtés de nos partenaires démocratiquement élus en Ukraine», a déclaré Emily Horne, porte-parole du Conseil national de sécurité à la Maison Blanche.
La veille, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres s'était de son côté dit «convaincu» qu'une invasion russe de l'Ukraine «n'arriverait pas». Les déclarations britanniques surviennent quelques heures seulement après que le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou eut accepté une rencontre avec son homologue britannique Ben Wallace.
Depuis plusieurs semaines, Washington, Kiev et certains de leurs alliés accusent la Russie d'envisager une invasion du territoire ukrainien, ce que Moscou dément catégoriquement. La Russie, de son côté, exprime ses craintes quant à sa sécurité, liées à l'extension vers l'est de l'OTAN et à la perspective de livraisons d'armements offensifs à Kiev. Dans ce contexte, Moscou a proposé à Washington et à l'OTAN des traités, qui prévoient un renoncement de l'Alliance atlantique à tout élargissement à l'est et un retour à l'architecture sécuritaire construite en Europe après la fin de la Guerre froide.
Les Occidentaux refusent à ce jour les exigences russes, arguant du caractère défensif de l'Alliance atlantique d'une part, et de la souveraineté des Etats, devant rester libres de choisir leurs alliances, d'autre part. Or, la Russie fait valoir que les Occidentaux avaient promis verbalement à Moscou à la fin de la Guerre froide de ne jamais élargir l'Alliance, promesse mainte fois rompue avec les élargissements successifs de l'OTAN aux pays anciennement dits «de l'Est».
Le 21 janvier, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a rencontré à Genève son homologue américain. Lors d'une conférence de presse à l'issue des pourparlers, le chef de la diplomatie russe a notamment souligné «la nécessité d'une désescalade», tandis qu'Antony Blinken a dit vouloir «privilégier la diplomatie».