Sous la menace d'un procès au civil aux Etats-Unis pour agressions sexuelles, le prince Andrew, deuxième fils d'Elizabeth II, a perdu ses titres militaires, s'enfonçant dans la disgrâce provoquée par l'affaire Epstein, de plus en plus embarrassante pour la monarchie britannique.
L'annonce retentissante du palais de Buckingham ce 13 janvier intervient au lendemain du rejet à New York des recours du prince Andrew pour tenter de mettre en échec la plainte au civil à New York d'une Américaine qui l'accuse d'agressions sexuelles en 2001, quand elle avait 17 ans. Le prince Andrew conteste vigoureusement ces accusations.
«Avec l'accord et l'approbation de la reine, les affiliations militaires et parrainages royaux du duc d'York ont été rendus à la reine», a annoncé le palais.
Le prince continuera à ne plus assumer ses fonctions publiques
Le prince «continuera à ne pas assumer de fonctions publiques et se défend dans cette affaire comme citoyen privé», précise Buckingham, laissant entendre que la reine ne financerait pas ses frais d'avocat.
Le duc d'York n'utilisera par ailleurs plus l'appellation d'«altesse royale» à titre officiel, a précisé une source royale.
Le prince Andrew s'est retiré de la vie publique depuis son interview calamiteuse à la BBC à l'automne 2019, où il avait affirmé n'avoir aucun souvenir d'avoir rencontré Virginia Giuffre et défendu son amitié avec Jeffrey Epstein, retrouvé pendu en prison.
Ce 13 janvier, plus de 150 anciens membres de l'armée britannique «en colère» avaient demandé à la reine de retirer ses titres militaires à l'ancien pilote d'hélicoptère pendant la guerre des Malouines (1982), qui a passé 22 ans dans la Marine.
Dans cette lettre publiée par le groupe opposé à la monarchie Republic, les signataires font grief au prince d'avoir manqué aux critères de «probité, honnêteté et de comportement honorable» qui incombent aux militaires britanniques.
La plaignante, Virginia Giuffre, affirme avoir été livrée au prince par Jeffrey Epstein, ami du deuxième fils de la reine, mort en prison en 2019. A moins qu'un recours couronné de succès ou qu'un accord n'intervienne d'ici là, le procès pourrait se tenir à l'automne.
Le prince entend «continuer à se défendre»
Une source proche du duc a affirmé qu'il entend «continuer à se défendre» et souligne que la décision rendue le 12 janvier par le juge new-yorkais ne constitue pas un «jugement sur les mérites des accusations» de Virginia Giuffre. «C'est un marathon et non un sprint», a fait valoir cette source.
Cette affaire fait planer un nuage noir au-dessus de la couronne britannique, quelques jours après l'annonce du programme des festivités du jubilé de platine pour les sept décennies de règne d'Elizabeth II en juin, avec défilés, concert, concours de pudding et jour férié supplémentaire.
Le 12 janvier, l'un des avocats de Virginia Giuffre, David Boies, a déclaré sur la BBC que sa cliente n'écartait pas un accord, mais qu'une simple transaction financière ne suffirait pas.
«Il est très important» pour elle «que cette affaire soit résolue d'une manière qui lui donne raison et qui donne raison aux autres victimes», a-t-il déclaré.
Quel embarras pour une femme de 95 ans que d'avoir à questionner son fils de 61 ans à propos d'accusations de comportements sexuels répréhensibles
Aller jusqu'au procès, risquer révélations et défaite ou conclure un accord qui sonnerait comme un aveu, pour le prince Andrew, «il n'y a pas de bonne solution», déclare a à l'AFP Anna Whitelock, historienne spécialiste de la monarchie à la City University de Londres.
Et un accord financier apporterait son lot de questions sur «l'origine de cet argent», souligne-t-elle.
Selon la presse britannique, le prince a soldé récemment un différend sur une dette de 6,6 millions de livres sterling (près de 8 millions d'euros), qui va lui permettre de vendre un chalet en Suisse qu'il avait acquis en 2014, pour une somme qui s'élèverait à 18 millions de livres (21 millions d'euros).
Ces derniers mois, le prince Andrew a «donné l'impression d'être un lapin qui détale» ou de «se cacher dans les jupes en tartan de sa mère à Balmoral pour éviter les documents judiciaires qui lui étaient adressés», a commenté jeudi sur Sky News l'ancienne chroniqueuse royale Jennie Bond.
«Quel embarras pour une femme de 95 ans que d'avoir à questionner son fils de 61 ans à propos d'accusations de comportements sexuels répréhensibles», a poursuivi l'ex-chroniqueuse de la BBC.