Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov a déclaré avoir eu une discussion préliminaire «compliquée» le 9 janvier avec son homologue américaine Wendy Sherman, avant des négociations diplomatiques entre les deux pays prévues ce 10 janvier dans un contexte tendu. Parmi les principaux enjeux, Moscou entend obtenir des garanties de sécurités mutuelles via notamment l'arrêt de l'extension de l'OTAN, tandis que Washington devrait principalement tenter de désamorcer la crise autour de l'Ukraine.
«La discussion a été compliquée – elle ne pouvait pas être simple – mais [...] pragmatique. Je pense que demain nous ne perdrons pas notre temps», a expliqué Sergueï Riabkov, cité par l'agence Interfax, après un dîner de travail de deux heures à Genève avec la secrétaire d'Etat adjointe des Etats-Unis.
Durant ce dîner de travail, Wendy Sherman a averti Sergueï Ryabkov que Washington ne parlerait «pas de sécurité en Europe sans la participation des pays européens eux-mêmes», et «a souligné le soutien des Etats-Unis aux principes internationaux de souveraineté, d'intégrité territoriale, et à la liberté des pays souverains de choisir leurs propres alliances», selon un communiqué du département d'Etat américain.
Moscou réclame la fin de l'extension de l'OTAN, «irrecevable» selon Washington
Les Etats-Unis et la Russie se sont fermement positionnés avant ces négociations. Le 9 janvier, Serguei Ryabkov a ainsi fait savoir que son pays n'accepterait «aucune concession» sur ses propositions visant à éviter une confrontation avec les Etats-Unis et leurs alliés. Le 15 décembre, la diplomatie russe avait en effet remis aux Etats-Unis deux projets de traités, prévoyant notamment l'arrêt de tout nouvel élargissement de l'OTAN – à l'Ukraine, ainsi qu'à tout autre pays – et une limitation des déploiements et des exercices militaires proches de la frontière russe, dans les pays de l'ancien espace soviétique.
Quelques heures avant le dîner préliminaire de ce 9 janvier, Sergueï Riabkov s'était en outre dit «déçu des signaux venant ces derniers jours de Washington, mais aussi de Bruxelles», où sont basés l'UE et l'OTAN.
Et pour cause, plus tôt, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken avait déclaré que selon ses estimations, les textes proposés par Moscou constituaient un prétexte à une «agression» de l'Ukraine : «Cela fait certainement partie de leur stratégie de présenter une liste d'exigences absolument irrecevables et ensuite prétendre que l'autre camp ne joue pas le jeu et utiliser cela comme une justification pour une agression.»
Menaces de sanctions côté américain, Poutine évoque «un risque de rupture»
Cette rencontre lance une semaine diplomatique intense. Outre les discussions américano-russes en Suisse le lundi, une réunion Otan-Russie est prévue mercredi 12 janvier à Bruxelles, puis une rencontre le lendemain à Vienne de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), pour inclure les Européens, qui redoutent d'être marginalisés.
Les Occidentaux et Kiev accusent la Russie d'avoir massé près de 100 000 soldats à la frontière ukrainienne en vue d'une potentielle invasion (menace maintes fois brandie malgré les démentis de Moscou). Plus tôt, le 31 décembre, Joe Biden avait menacé la Russie d'introduire des sanctions «à grande échelle» en cas d'escalade de la situation autour de l'Ukraine lors de son entretien avec son homologue russe. Ces sanctions pourraient aller jusqu'à couper la Russie des rouages de la finance mondiale ou empêcher l'entrée en fonction du gazoduc Nord Stream 2.
Vladimir Poutine avait de son côté expliqué à ce sujet qu'il s'agirait là d'«une grave erreur» faisant courir «un risque de rupture complète des relations russo-américaines», ainsi que le rapporte le compte-rendu. En attendant la tenue des pourparlers, Sergueï Riabkov a annoncé qu'en l'absence de progrès lors de la première réunion le 10 janvier, la Russie pourrait décider de ne pas poursuivre les négociations. «C'est un scénario tout à fait possible [...] Si nous tournons en rond, si nous ne voyons pas que l'autre partie est prête à prendre en compte nos priorités, à réagir de manière constructive, alors dialoguer sera inutile», a-t-il déclaré.