Les Taliban ont mis en garde ce 23 août les Etats-Unis contre le maintien envisagé de forces américaines en Afghanistan au-delà de la date prévue du 31 août, prévenant qu'il s'agirait d'une «violation claire» de leurs engagements et qu'ils n'annonceraient la constitution d'aucun gouvernement avant leur départ.
Le président américain Joe Biden a évoqué le 22 août la possibilité de prolonger au-delà du 31 août la présence américaine à l'aéroport de Kaboul, où sont retranchés les derniers soldats et diplomates occidentaux qui coordonnent ces évacuations jugées «difficiles et douloureuses» par le chef d'Etat démocrate. Il avait auparavant fixé cette date pour l'achèvement du retrait des forces américaines d'Afghanistan.
Aucun moyen d'évacuer autant de gens, sans causer de peine ni de pertes
Mais les Taliban ont haussé le ton contre un possible allongement de ce délai : «la réponse est non», et «il y aura des conséquences» en cas de non-respect de la date-limite, a réagi l'un des portes-parole du nouveau pouvoir afghan, Suhail Shaheen, auprès des chaînes britanniques BBC et Sky News. «Cela créera de la méfiance entre nous. S'ils ont l'intention de continuer l'occupation, cela provoquera une réaction», a-t-il ajouté.
Deux sources au sein du nouveau régime ont aussi expliqué à l'AFP que les Taliban n'annonceraient pas la constitution d'un gouvernement tant qu'il resterait des militaires américains en Afghanistan.
Joe Biden a par ailleurs expliqué qu'il n'y avait «aucun moyen d'évacuer autant de gens sans causer de peine ni de pertes, ni les images déchirantes» qui en résultent. Si l'accès à l'aéroport de Kaboul reste très difficile, le périmètre a été étendu avec l'accord des Taliban qui ont été «coopératifs», a ajouté le président américain : «Nous avons fait un certain nombre de changements, y compris en étendant l'accès autour de l'aéroport et dans la zone sécurisée.»
Jusqu'à 45 000 Américains pourraient être exfiltrés au total
Quelque 30 300 personnes ont été évacuées par les Etats-Unis depuis le 14 août, a fait savoir le 22 août la Maison blanche, qui espère exfiltrer jusqu'à 15 000 Américains, ainsi que 50 000 à 60 000 Afghans et leurs familles. Des milliers de citoyens d'autres nationalités, mais aussi des Afghans menacés ou ayant travaillé pour les alliés, ont également été évacués par les puissances occidentales ou sont en attente d'exfiltration.
L'Allemagne a ainsi aidé plus de 2 500 personnes à partir et le Royaume-Uni plus de 5 700. Le Premier ministre britannique Boris Johnson a de son côté annoncé ce 23 août qu'il allait plaider pour une prolongation des opérations d'évacuation à Kaboul au-delà du 31 août, à l'occasion d'un sommet virtuel du G7 consacré le 24 août à l'Afghanistan.
«Même si [l'opération d'évacuation] dure jusqu'au 31 août ou quelques jours de plus, cela ne suffira pas» a, dans la même veine, expliqué le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas, lors d'une interview pour le journal Bild, plaidant à nouveau pour la poursuite des discussions avec les Taliban afin d'assurer des transferts une fois l'armée partie.
La France a également jugé «nécessaire» un «délai supplémentaire», au-delà du 31 août, pour mener à bien les évacuations de personnes à risque, a communiqué ce 23 août le ministre français des Affaires étrangères : «Nous sommes préoccupés de la date-butoir fixée par les Etats-Unis le 31 août. Un délai supplémentaire est nécessaire pour mener à bien les opérations en cours», a dit Jean-Yves Le Drian à des journalistes l'accompagnant sur la base aérienne 104 d'Al-Dhafra, à 30 kilomètres d'Abou Dhabi, où l'armée de l'Air française a mis en place un pont aérien vers Kaboul.