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La justice polonaise déclare inconstitutionnelle une décision de l'UE sur les réformes judiciaires

Le Tribunal constitutionnel polonais a estimé que les décisions prises par la Cour de Justice de l'Union européenne contre les réformes judiciaires mises en œuvre par le parti Droit et Justice étaient contraires à la constitution du pays.

Le 14 juillet, le Tribunal constitutionnel polonais a affirmé que les décisions prises par la Cour de justice de l'Union européennes (CJUE) contre les réformes judiciaires mises en œuvre par Varsovie étaient inconstitutionnelles.

Cette déclaration survient après que la CJUE a ordonné plus tôt dans la journée à la Pologne de suspendre immédiatement les activités de la «chambre disciplinaire» de la Cour suprême, une nouvelle institution mise en place dans le cadre de la réforme du système judiciaire. Cette chambre est chargée de superviser les juges – dont ceux de la Cour suprême polonaise – avec le pouvoir de lever leur immunité pour les exposer à des poursuites pénales ou réduire leurs salaires.

Une réforme du système judiciaire accusée par l'UE de fragiliser l'Etat de droit

Varsovie et Bruxelles sont à couteaux tirés depuis plusieurs années au sujet des réformes engagées par le gouvernement du parti conservateur Droit et Justice (PiS). Le gouvernement polonais assure que ces réformes sont nécessaires pour lutter contre la corruption et mettre fin à l'héritage de l'ère communiste dans le système judiciaire, mais la Commission européenne juge quant à elle qu'elles minent l'Etat de droit et cherche à ramener la Pologne ainsi que la Hongrie en conformité avec ce qu'elle considère comme les normes démocratiques européennes. La commission accuse ces deux gouvernements d'étouffer les médias indépendants et d'imposer des réformes qui excluent les juges dont les décisions ne s'alignent pas sur les opinions des partis au pouvoir.

Entrée en vigueur en février 2020, la réforme polonaise du système judiciaire empêche notamment les juges de saisir la Cour européenne de justice de certaines questions légales et crée un organe qui statue sur l'indépendance des juges.

De nouvelles tensions au sujet de cette réforme sont attendues ce 15 juillet : la CJUE doit à nouveau prendre une décision sur la légitimité de la «chambre disciplinaire» et le tribunal constitutionnel polonais se réunit pour statuer sur une éventuelle supériorité du droit national sur celui de l'UE. D'anciens juges du tribunal constitutionnel polonais ont prévenu récemment que contredire la CJUE «serait une violation drastique des obligations d'un Etat membre et un pas de plus vers la sortie du pays de l'UE».

Le commissaire européen à la Justice Didier Reynders avait demandé au gouvernement polonais de renoncer à cette saisine qui, selon lui, remet en question «un des principes fondamentaux du droit de l'UE, en particulier celui de la primauté du droit européen sur le droit national», ainsi que «l'autorité de la Cour de justice de l'UE». Sa demande a été aussitôt rejetée par le Premier ministre polonais et dénoncée par son ministre de la Justice Zbigniew Ziobro, qui y a vu «une preuve d'insolence, d'agression et d'un regard colonial sur la Pologne».