Dans un entretien pour Le Point à paraître le 6 mai, Nicolas Sarkozy s'est exprimé sur la situation au Sahel, expliquant que l'intervention française ne devrait pas durer pour «demeurer légitime».
L'opération française Barkhane, lancée en août 2014 après l'opération Serval de 2013, est menée dans cinq pays (Tchad, Niger, Mali, Mauritanie, Burkina Faso) de la bande sahélo-saharienne, où sont déployés 5 100 soldats. «Je ne crois pas qu'une intervention française puisse demeurer légitime quand elle se prolonge au-delà de quelques années», a ainsi déclaré l'ancien président. «5 000 soldats français sur un territoire grand comme dix fois notre pays ne peuvent assurer durablement la sécurité du Sahel», assure-t-il.
Selon lui, «la première intervention, au moment où des colonnes terroristes descendaient sur Bamako, s'imposait sans doute, mais nous n'avons pas vocation à rester indéfiniment. Car c'est en priorité aux pays africains concernés de mener, ensemble, ce combat».
L'ancien chef d'Etat – de 2007 à 2012 – reconnaît «la grande complexité de ce sujet», car «quand la France ne fait rien, elle est accusée d'inaction ; et que quand elle intervient, elle est accusée d'ingérence».
Lui-même assume une nouvelle fois l'intervention militaire menée par Paris, Washington et Londres, sous l'ombrelle de l'Otan, en mars 2011 en Libye, alors dirigée par Mouammar Kadhafi, un «dictateur sanguinaire qui a déclaré qu'il allait faire couler des rivières de sang à Benghazi».
Interrogé pour savoir s'il aurait, comme le président Emmanuel Macron, assisté aux obsèques du dirigeant tchadien Idriss Déby, il assure qu'il se «serait sans doute posé la question [puisqu'] Idriss Déby a été un allié de la France, particulièrement précieux dans le combat contre le terrorisme djihadiste dans la région», même s'il reconnaît que «sa pratique interne du pouvoir au Tchad était plus que contestable».
Sur le génocide au Rwanda, Nicolas Sarkozy dit «saluer la qualité» du rapport de la commission Duclert remis fin mars à Emmanuel Macron. Ce rapport accablant a conclu que si «rien ne vient démontrer» qu'elle s'est rendue complice du génocide, la France porte des «responsabilités lourdes et accablantes» dans la tragédie.
«La reconnaissance de la gravité extrême des erreurs, et dans certains cas des fautes qui ont été commises, est incontournable, inévitable et juste», a estimé Nicolas Sarkozy, dénonçant «l'aveuglement dramatique d'un petit groupe au plus haut sommet de l'Etat : chef d’état-major particulier, cellule Afrique et le président [François] Mitterrand lui-même».