Un professeur britannique de religion exerçant à la Batley Grammar School, dans la banlieue de Leeds (Angleterre), est victime de menaces sur les réseaux sociaux après avoir montré des caricatures de Mahomet lors d'un cours. Des manifestations ont eu lieu le 25 mars 2021 devant l'école pour demander son renvoi de l'établissement. Il a dû quitter son domicile avec sa compagne en demandant une protection policière, selon La Croix.
L'affaire n'est pas sans rappeler le meurtre du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty, décapité par un terroriste islamiste le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine après avoir montré à ses élèves, lors d'un cours d'éducation civique consacré à la liberté d'expression, des caricatures de Mahomet issues de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo.
A Batley, les faits reprochés à l'enseignant se seraient déroulés le 22 mars, «pendant une discussion portant sur le blasphème», et «les élèves auraient été prévenus en amont de la teneur du cours», selon le quotidien britannique The Times,relayé par Courrier International. Selon The Guardian, les dessins étaient issus de Charlie Hebdo.
Le soir même, des parents d’élèves se sont plaints auprès de l’école, et le nom du professeur a ensuite été cité sur les réseaux sociaux et accompagné de menaces, rapporte encore La Croix.
Le matin du 25 mars, une trentaine d’hommes étaient rassemblés devant les grilles de l'établissement – situé dans une ville de la banlieue de Leeds où la population est à 41% musulmane, comme le rappelle le quotidien – pour demander l’expulsion du professeur. La police du West Yorkshire a déclaré qu'aucune amende ou arrestation n'avait été prononcée, mais le porte-parole du ministère britannique de l'Education a condamné les manifestations qui, selon lui, incluaient des menaces et étaient «en violation des restrictions relatives au coronavirus». Un porte-parole a qualifié la manifestation de «totalement inacceptable», selon le quotidien britannique The Guardian, qui précise par ailleurs que l'enseignant a été suspendu dans l'attente d'une enquête officielle.
Le 26 mars, les manifestants étaient de retour en plus grand nombre, bien que, selon la presse britannique relayée par La Croix, aucun des hommes présents n’était parent d’élève de l’école. L'établissement a été contraint de fermer ses portes.
Des «menaces inacceptables» rappelant «des scènes vues en France»
Le directeur de la Batley Grammar School, Gary Kibble, avait pourtant tenté de calmer le jeu. Dans un email envoyé aux parents d'élèves publié par The Guardian, celui-ci s'exprimait en ces termes : «Après enquête, il était clair que la ressource utilisée dans le cours était complètement inappropriée et pouvait être très offensante pour les membres de notre communauté scolaire, auxquels nous aimerions présenter des excuses sincères et complètes.» Des excuses selon lui également présentées par l'enseignant et lues par la police aux manifestants. Le directeur se serait même engagé à «suspendre le cours» en question et à «vérifier tout le programme de cours de religion pour s’assurer qu’aucune autre ressource ou déclaration inappropriée» n’y figure.
Le 26 mars, le ministère britannique de l’Education a publié un communiqué encourageant «le dialogue entre les parents et l’école» et rappelant qu’il était «inacceptable de menacer ou d’intimider les enseignants», comme l'indique La Croix. «Les écoles sont libres d’inclure une gamme complète de questions, d’idées et de matériels dans leur programme, y compris des sujets difficiles ou controversés», a souligné le porte-parole du ministère.
Interrogé par la station de radio londonienne LBC, le secrétaire d'Etat aux Communautés Robert Jenrick s'est quant à lui dit «très troublé» d'apprendre que l'enseignant se trouvait sous protection policière, ainsi que par les manifestations qui ont eu lieu aux portes de l'école. «Nous ne voulons pas que les personnes qui travaillent dans nos écoles, les parents ou les enfants se sentent intimidés […] simplement parce qu'une question difficile a été abordée en classe». «Cela rappelle les scènes que nous avons vues en France», a-t-il également déclaré.
Dans la soirée du 26 mars, plus de 13 000 personnes avaient signé une pétition demandant la réintégration de l'enseignant. Celle-ci a été lancée par des élèves de la Batley Grammar School, selon The Times.