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Le Royaume-Uni ne formera pas les gardiens de prison saoudiens

Downing Street a décidé de se retirer d'un appel d'offres qui portait sur la fourniture par le ministère de la Justice de services pour le développement de l'administration pénitentiaire saoudienne. Un accord très controversé outre-manche.

Contre la somme de 5.9 millions de livres, soit 7,9 millions d'euros, des fonctionnaires britanniques auraient fourni une «analyse des besoins de formation» du système pénal saoudien.

Un contrat largement décrié

Tant Jeremy Corbyn, le leader du Parti travailliste que Michael Gove, actuel ministre de la Justice, étaient tous deux opposés au contrat. Le premier a ainsi rappelé lors d'une lettre ouverte à  David Cameron la situation actuelle des droits de l'homme dans le royaume. Lors de son premier discours à la conférence du principal parti de l'opposition, Jeremy Corbyn avait appelé à bloquer cette offre de fournir une formation pour le système carcéral en rappelant le sort du jeune Ali Mohammed Baqir al-Nimr, manifestant pro-démocratie, menacé à tout moment d'une sentence de décapitation et de crucifixion.

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Unanimement dénoncé, le système pénitentiaire saoudien fait un usage régulier de la crucifixion, de la décapitation et du fouet en guise de punition pénale.

Quant à Michael Gove, il avait déjà voulu annuler le contrat mais avait été contrecarré dans ce projet par Philipp Hamond, le ministre des Affaires étrangères. Le Foreign Office craignait en effet que l'annulation d'un tel contrat puisse avoir des effets négatifs sur la relation entre Grande-Bretagne et le Royaume wahhabite. Philip Hamon aurait même taxé son homologue à la Justice de naïveté.

Le contrat avait également été condamné par les groupes de défense des droits humains qui le jugeait «inexcusable».

Au nom de la lutte contre le terrorisme

Le Royaume-Uni a souvent justifié sa coopération avec le pays en alléguant des questions de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Ainsi des documents révélés en 2008 montraient qu'une enquête de l'Office de répression des Fraudes avait été abandonnée parce que l'Arabie saoudite avait tout simplement menacé de cesser tout partage de renseignement portant sur des complots terroristes. La crainte d'un nouvel attentat pareil à celui du 7 juillet 2005 à Londres si ce partage cessait avait alors poussé Downing Street à bloquer toute enquête. 

Mais malgré ce contrat abandonné, le Royaume-Uni vend toujours des milliards de livres de dollars d'armes à l'Arabie saoudite. Ainsi entre mai 2010 et mai 2015, le gouvernement a autorisé la vente d'armes pour 4 milliards de livres, soit 5,360 milliards d'euros.

En même temps que l'annonce de ne pas donner suite à ce contrat, Downing Street a également précisé que le Premier ministre avait écrit aux autorités saoudiennes pour exprimer ses préoccupations au sujet du cas de Karl Andrée, le grand-père de 74 ans qui risque 360 coups de fouet pour avoir transporté du vin dans sa voiture.

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