La revue scientifique britannique The Lancet a publié mardi 2 février des résultats sur le vaccin russe Spoutnik V qui démontrent son efficacité à 91,6% contre les formes symptomatiques du Covid-19. Ces résultats proviennent du dernier stade des essais cliniques du vaccin, la phase 3, qui a porté sur près de 20 000 participants.
«Les résultats sont clairs et le principe scientifique de cette vaccination est démontré», ont déclaré les professeurs Ian Jones et Polly Roy, dans un commentaire joint à l'étude du Lancet, estimant en outre que «le développement du vaccin Spoutnik V a[vait] été critiqué pour sa précipitation, le fait qu'il ait brûlé des étapes et une absence de transparence».
«Un vaccin supplémentaire peut désormais rejoindre le combat pour réduire l'incidence du Covid-19», se sont félicités les scientifiques.
Les auteurs de l'étude pointent toutefois une limite : dans la mesure où les PCR n'ont été réalisés «que quand les participants ont déclaré être atteints de symptômes du Covid, l'analyse de l'efficacité ne porte que sur les cas symptomatiques». «D'autres recherches sont nécessaires pour cerner l'efficacité du vaccin sur les cas asymptomatiques et sur la transmission» de la maladie, poursuit The Lancet dans un communiqué, cité par l'AFP.
Entre septembre et novembre, tous les participants ont reçu deux doses de vaccin ou de placebo à trois semaines d'intervalle. A chaque fois, cela s'accompagnait d'un test PCR. Dans les jours suivant l'administration de la deuxième dose, un test PCR n'était réalisé que chez les personnes qui développaient des symptômes. Au total, 16 volontaires sur 14 900 qui ont reçu les deux doses du vaccin ont été testés positifs (soit 0,1%), contre 62 sur 4 900 qui avaient reçu le placebo (soit 1,3%).
«D’excellents résultats», selon l’Institut Gamaleïa
Le Spoutnik V se classe donc parmi les vaccins les plus performants, avec ceux de Pfizer/BioNTech et Moderna (autour de 95%, rappelle l'AFP).
Contrairement à ses concurrents occidentaux qui s'appuient sur la technologie de l'ARM messager, le vaccin russe est appelé «à vecteur viral», technologie qui consiste à prendre pour base d'autres virus rendus inoffensifs et adaptés pour combattre le Covid.
«Les études consacrées à ce vaccin n’ont montré aucune complication grave provoquée par ce vaccin. Les résultats de la phase 3 [des essais] ont montré que le niveau de protection de la population vaccinée au moyen du vaccin Spoutnik V dépasse 91% comparé au [groupe] placebo», a déclaré en conférence de presse Alexandre Guinzbourg, directeur de l’Institut de recherche Gamaleïa qui développe le Spoutnik V, après l'annonce de The Lancet. Et de poursuivre : «En même temps, l’expérience épidémiologique montre que l’efficacité du vaccin Spoutnik V contre les cas graves d’infection par cet agent viral est de 100%. Ce sont d’excellents résultats».
L'Allemagne manifeste son intérêt
Ces dernières semaines, des voix ont commencé à s'élever en Europe pour que l'Agence européenne des médicaments (EMA) évalue rapidement le Spoutnik V, déjà utilisé en Russie et dans d'autres pays comme l'Argentine ou l'Algérie.
Dans un entretien accordé le 31 janvier au journal Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung, le ministre allemand de la Santé Jens Spahn s'est déclaré ouvert à l'usage des vaccins russes et chinois, considérant que si l’agence européenne du médicament donnait son feu vert, il n'y aurait aucune raison de bouder leurs propositions. De son côté, la chancelière Angela Merkel avait déclaré le 22 janvier qu'en cas de validation de Spoutnik V : «nous pourrons discuter d’une production et d’une utilisation conjointe».
Le porte-parole du gouvernement français Gabriel Attal, interrogé le 1er février sur la possibilité pour la France d'acquérir le Spoutnik V, avait déclaré : «Ce qu'on veut, c'est qu'il soit sûr et efficace. Je crois que c'est le cas pour le vaccin russe et donc il va être examiné comme tous les vaccins ont été examinés.»