Les manifestations s'enchaînent dans plusieurs pays d'Europe ainsi qu'au Liban, demandant la fin des restrictions liées à la gestion de l'épidémie de Covid-19 : confinement, couvre-feu, fermetures de commerces, etc. Au Danemark, en Autriche, aux Pays-Bas, en Belgique mais aussi au Liban, des heurts ont éclaté entre les civils et les forces de l'ordre entre le 24 et le 31 janvier 2021.
«Liberté pour le Danemark, nous en avons eu assez !»
Le 31 janvier, la police danoise a annoncé l'arrestation de trois personnes suspectées d'avoir incendié un mannequin à l'effigie du Premier ministre lors d'une manifestation anti-restrictions marquée par de nouveaux incidents à Copenhague.
Les trois hommes, âgés de 30 à 34 ans, sont soupçonnés d'avoir mis feu à ce mannequin en marge de la manifestation et ont fait l'objet d'une mise en examen préliminaire pour plusieurs motifs, dont «attaque contre le gouvernement» et «menaces», a indiqué la police dans un communiqué.
Affublée d'une perruque et d'une photo de Mette Frederiksen sur le visage, la poupée grandeur nature était complétée par un papier disant «elle doit être mise à mort». Hissée sur un lampadaire, elle avait ensuite été brûlée, selon les vidéos de l'incident diffusée par les médias danois.
«Il est complètement inacceptable d'exprimer des menaces aussi sérieuses dans une démocratie, et je suis donc satisfaite que l'enquête ait déjà permis de procéder à des arrestations», a déclaré la directrice de la police de Copenhague, Anne Tonnes, dans un communiqué.
Plusieurs centaines de personnes s'étaient rassemblées le 30 janvier en début de soirée avant de défiler avec des flambeaux dans la capitale danoise aux cris de «Liberté pour le Danemark, nous en avons eu assez !» contre les mesures anti-coronavirus prises par l'exécutif.
«Men in Black»
Baptisé «Men in Black Danemark», ce groupe actif sur Facebook organise des manifestations depuis plus d'un mois contre la «coercition» et la «dictature» du semi-confinement anti-Covid en place au Danemark.
Malgré une tonalité radicale de manifestants vêtus de noir, l'essentiel du défilé – qui était autorisé – s'est déroulé dans le calme, avec un important encadrement de police. Mais des tensions sont apparues lors de la dispersion de la manifestation, avec notamment des jets de bouteilles sur les forces de l'ordre.
La manifestation des «Men in Black» deux semaines auparavant avait été marquée par des violences plus importantes, qui s'étaient traduites par des échauffourées entre la police et les manifestants et une vingtaine d'arrestations, dont plusieurs placements en détention provisoire.
L'émergence du mouvement, même si les manifestations restent limitées à quelques centaines de personnes, suscite des craintes de radicalisation. Commerces non essentiels, bars, restaurants et écoles sont notamment fermés en ce moment au Danemark, et le gouvernement a prolongé les restrictions jusqu'au 7 février au moins.
Le 31 janvier à Apeldoorn, dans le centre, quelque 400 protestataires se sont dispersés pacifiquement après une manifestation autorisée par le maire de la ville.
A Amsterdam, une importante présence policière a mis fin à une manifestation essentiellement pacifique, mais illégale, contre les mesures anti-Covid.
La police avait auparavant arrêté une trentaine de personnes à proximité «en raison du risque de trouble à l'ordre public», selon les médias néerlandais, après un arrêté d'urgence du conseil municipal interdisant toute manifestation autour de la célèbre place qui abrite les musées Van Gogh, Rijks et Stedelijk.
Canon à eau et chiens de police aux Pays-Bas
Le 24 janvier des manifestations se sont tenues dans plusieurs villes des Pays-Bas après la mise en place d’un couvre-feu la veille afin d’éviter la propagation de l'épidémie de Covid-19, comme le rapportaient les autorités locales et les médias néerlandais.
Dans le centre d’Amsterdam, sur la place du Museumplein, la police a fait usage d’un canon à eau et a envoyé des chiens de police pour disperser la foule, selon la télévision publique NOS. Une centaine de manifestants ont été arrêtées informait le 24 janvier la mairie d’Amsterdam par voie de communiqué, sur environ 1 500 personnes, selon ses estimations.
Les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes dans la ville d’Eindhoven, face à une foule d’une centaine de personnes, selon la télévision régionale Omroep Brabant. Des véhicules ont été incendiés et des commerces ont été pillés, selon Omroep Brabant.
«Au moins trente personnes ont été arrêtées», a déclaré à l'AFP la police d’Eindhoven. La compagnie néerlandaise des chemins de fer NS a appelé les voyageurs à «éviter» la gare d'Eindhoven Centraal où la circulation des trains était interrompue en raison, selon elle, de l'intervention des services de secours à proximité.
Dans la soirée du 23 janvier, un centre de dépistage du Covid-19 a été incendié à Urk. Ce malgré le couvre-feu mis en place, ont indiqué les autorités locales. «L'incendie dans un centre de dépistage d'Urk dépasse toutes les limites», s’est indigné le ministre de la Santé Hugo de Jonge le lendemain des faits.
10 000 personnes à Vienne, 800 verbalisées
Environ 10 000 personnes, ont bravé le 31 janvier à Vienne, en violation des mesures sanitaires, une interdiction de manifester contre le couvre-feu et le confinement décidés par le gouvernement pour tenter d'endiguer le coronavirus.
La police avait interdit le 30 janvier cette manifestation, à la suite d'un précédent défilé ayant également rassemblé 10 000 personnes mi-janvier et au cours duquel les participants avaient été nombreux à ne pas porter de masques et à ne pas respecter les distances de sécurité.
Mais selon les forces de l'ordre, plusieurs milliers de personnes ont quand même répondu dans l'après-midi du 31 janvier à l'appel du parti nationaliste FPÖ, qui avait organisé la manifestation et jugé «scandaleuse» son interdiction.
La police a procédé à 10 interpellations quand la foule a refusé de se disperser et a voulu marcher en direction du Parlement, bloquant la circulation.
Quatre policiers ont été blessés et plus de 800 personnes ont été verbalisées pour non-respect des mesures sanitaires, selon le ministre de l'Intérieur Karl Nehammer, qui a organisé une conférence de presse dans la soirée, précisant que la manifestation avait pris fin vers 19h30.
Plus tôt dans la semaine, l'ancien ministre de l'Intérieur Herbert Kickl, membre du FPÖ, avait appelé à descendre dans la rue le 31 janvier contre le couvre-feu et le troisième confinement en vigueur.
C'était la première fois que ce parti organisait officiellement un rassemblement pour contester les mesures décidées par le gouvernement écolo-conservateur pour tenter de limiter les contaminations par le coronavirus.
Cette manifestation avait été interdite en raison des «troubles à l'ordre public» qu'elle était susceptible d'engendrer. «On assiste à une censure inédite», s'était insurgé Herbert Kickl, le 30 janvier, devant des journalistes. «C'est un scandale», avait-il ajouté.
Le FPÖ avait ensuite déposé une seconde demande d'autorisation pour «défendre la démocratie, la liberté et les droits fondamentaux», mais la police l'avait également rejetée.
«Transmissibilité accrue des nouveaux variants»
Elle avait mis en avant le risque de nouveau foyer de contamination, «en raison de la transmissibilité accrue des nouveaux variants» et «du manque de traçabilité des contacts» dans les rangs des manifestants.
Malgré un nouveau confinement, accompagné d'un couvre-feu, décrété après Noël, l'Autriche, qui compte 8,9 millions d'habitants, a enregistré le 30 janvier 1 190 nouveaux cas.
Selon un sondage paru le même jour dans l'hebdomadaire Profil, 64% des Autrichiens réclament la fermeture des remontées mécaniques dans les stations de ski, actuellement ouvertes.
Les écoles, les salles de sport, les hôtels, les restaurants, les magasins non-essentiels et les lieux culturels sont fermés. L'opposition sociale-démocrate s'est prononcée le 30 janvier en faveur d'une réouverture des écoles le 8 février.
Arrestations préventives en Belgique
Près de 500 personnes ont été arrêtées préventivement le 31 janvier à Bruxelles pour empêcher deux manifestations interdites par les autorités contre les mesures anti-Covid, a déclaré à l'AFP un porte-parole de la police locale.
«488 personnes ont été arrêtées administrativement», principalement aux abords des gares de la capitale belge, a précisé ce porte-parole. Elles ont commencé à être libérées vers 15h.
Une place située devant la gare centrale, où la mobilisation était la «plus large», a dû être évacuée, a-t-il ajouté. Parmi les personnes présentes figurent «des supporters de cinq ou six clubs» de football belge flamands et wallons.
Outre la gare centrale, les manifestants étaient appelés sur les réseaux sociaux à se rassembler à l'Atomium, un monument emblématique de la ville, où quelques dizaines de personnes étaient présentes.
La police belge a publié sur Twitter des photos des objets récupérés sur certaines personnes arrêtées : couteaux, pétards, feu de bengale, gants renforcés ou encore un protège-dents. «Pas des objets pour un rassemblement pacifique», a-t-elle commenté.
«Nous rappelons qu’il n'y a aucune autorisation pour venir manifester ce dimanche», avait-elle insisté sur le même réseau social. «Les personnes qui ont malgré tout l'intention de manifester à Bruxelles aujourd'hui seront abordées, dissuadées de rester et, si nécessaire, arrêtées administrativement», avait-elle prévenu.
La Belgique, qui compte 11,5 millions d'habitants, a déjà recensé plus de 20 000 décès liés au coronavirus depuis mars 2020. Ce pays a récemment décidé d'interdire les voyages «non essentiels» vers et hors de son territoire jusqu'au 1er mars.
Depuis trois mois, les Belges sont partiellement confinés, avec les écoles ouvertes mais de multiples secteurs d'activité fermés (cafés, restaurants, salles de spectacle, de sport, etc.).
Affrontements au Liban
Dans la soirée du 31 janvier, Tripoli, dans le nord du Liban, a été le théâtre d’affrontements entre la police et des manifestants hostiles aux restrictions sanitaires imposées dans le cadre de la lutte contre le Covid. Les forces de l’ordre ont utilisé du gaz lacrymogène pour disperser la foule.