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Venezuela : victorieux aux législatives, les députés chavistes s'installent en nombre à l'Assemblée

Après les législatives du 6 décembre, l'Assemblée nationale vénézuélienne a accueilli le 5 janvier ses nouveaux députés, majoritairement issus du camp chaviste. Sans surprise, l'opposant Juan Guaido appelle à ignorer le résultat des urnes.

Le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV) du président vénézuélien Nicolas Maduro est entré le 5 janvier à l'Assemblée nationale après sa large victoire aux élections législatives du 6 décembre qui lui a permis de remporter 256 sièges sur 277, malgré une forte abstention. Parallèlement, l'Assemblée constituante, composée de fidèles du pouvoir et destinée depuis 2017 à neutraliser les décisions des parlementaires d'opposition, a cessé ses fonctions le même jour.

Comme on peut le voir sur ces images de la journaliste Erika Ortega Sanoja, les chavistes ont mis en scène leur retour au Parlement dans une procession où ils ont arboré les portraits de l'ancien président Hugo Chavez (1999-2013) et du Libertador Simon Bolivar (1783-1830).

Les portraits ont ensuite été accrochés sur les murs de l'enceinte. Une cérémonie des plus symboliques alors que la majorité gouvernementale espère, par cette reprise de l'Assemblée, le règlement de la crise politique et économique qui sévit dans le pays depuis cinq ans. La chambre basse était en effet aux mains de l'opposition depuis 2015. Une opposition radicale – incarnée par Juan Guaido durant les deux dernières années – qui refusait tout dialogue avec le pouvoir présidentiel et exigeait le départ de Nicolas Maduro, comme préalable.

L'opposition vénézuélienne qualifie de «frauduleux» le résultat du scrutin parlementaire

Cette même opposition qui a boycotté les dernières législatives a réuni le 5 janvier une assemblée parallèle, disant ne pas reconnaître le verdict des urnes qu'elle qualifie de «frauduleux». Le Parlement sortant s'est ainsi réuni à Caracas dans un lieu non divulgué «pour raison de sécurité» et Juan Guaido a de nouveau prêté serment en tant que président de l'Assemblée. De plus en plus isolé en interne, comme à l'international, l'opposant a promis de résister et d'assurer la continuité des travaux des parlementaires élus en 2015 jusqu'à l'organisation d'«élections présidentielle et législatives libres».

Nous sommes contraints à l'exorcisme

«Nous sommes contraints à l'exorcisme», a ironisé l'ex-ministre chaviste de la Communication Jorge Rodriguez, élu président de l'Assemblée nationale. «Ce matin, nous avons versé de l'eau bénite dans tous les coins», a-t-il raillé. «Il ne peut y avoir de pardon dans l'oubli», a-t-il ajouté, dans une allusion à l'ancienne mandature qui avait vu en janvier 2019 l'opposant Juan Guaido se proclamer président par intérim en invoquant la Constitution et encourager des sanctions économiques internationales brutales contre son pays.

Quels «fondements légaux constitutionnels» pour le projet de Guaido ?

Cité par l'AFP, le politologue Jesus Castillo-Molleda estime que l'assemblée parallèle voulue par Juan Guaido «n'a pas de fondements légaux constitutionnels». Pour le directeur de l'institut de sondage Datanalisis, Luis Vicente Leon, également cité par l'AFP, l'opposition et Juan Guaido espèrent par ce biais continuer à recevoir «un soutien international». Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a immédiatement annoncé dans un communiqué que les Etats-Unis ne reconnaissaient pas le nouveau Parlement issu «d'élections frauduleuses» et continuaient de considérer Juan Guaido comme le «président légitime» du pays.

Le président américain Donald Trump a été le principal allié de Juan Guaido. De son côté, Nicolas Maduro a déjà lancé plusieurs appels au dialogue à l'adresse du président élu Joe Biden. A cet égard, des rumeurs persistantes font état d'un lâchage de Juan Guaido par le futur président étasunien.

La Colombie, le Brésil, l'Uruguay, le Costa Rica et le Panama ont également indiqué ne pas reconnaître le nouveau Parlement. «Nous continuerons de travailler» avec Guaido, a par exemple tweeté le ministre brésilien des Affaires étrangères, Ernesto Araujo. Son homologue vénézuélien Jorge Arreaza lui a immédiatement répondu, demandant sur quel article de la Constitution vénézuélienne il se basait pour cette affirmation illégale et lui conseillant d'arrêter d'alimenter «la théorie de la terre plate».

Pour la majorité chaviste, le défi le plus important est de sortir le pays de la crise économique. Le Venezuela a perdu 99% de ses revenus en devises à la suite du sévère embargo sur ses produits pétroliers. La nouvelle Assemblée devra ainsi proposer et promulguer des lois qui offrent des alternatives pour stimuler une économie qui perd chaque année 30 milliards de dollars.

Meriem Laribi