Le Venezuela va-t-il pouvoir tourner la page de l'hostilité maximale exercée par les Etats-Unis sous l'impulsion de Donald Trump ? L'agence américaine Bloomberg, citant trois personnes proches du dossier sous couvert d'anonymat, rapporte que les conseillers du président élu Joe Biden se prépareraient à de potentielles négociations avec le gouvernement de Nicolas Maduro au Venezuela dans le but de mettre fin à la crise économique et humanitaire que traverse ce pays.
L'administration Biden compterait néanmoins poser des conditions à cette ouverture du dialogue avec le gouvernement vénézuélien. Il s'agirait de continuer à faire pression pour des élections «libres et équitables», tout en offrant en retour «un allègement des sanctions».
Mais pour les chavistes, ce serait tout de même un changement de cap non négligeable. L'équipe de Biden ne compterait pas poser le départ de Nicolas Maduro comme une condition préalable au dialogue. Selon les informations de Bloomberg, l'équipe du président élu compterait examiner les sanctions existantes contre le Venezuela pour déterminer lesquelles seraient maintenues et lesquelles seraient allégées ou levées si Maduro se dirige vers «l'objectif démocratique». Selon ces mêmes informations, les alliés du gouvernement vénézuélien comme la Russie, la Chine et l’Iran, devraient jouer un rôle dans ces négociations, tout comme Cuba.
Washington a considérablement intensifié les sanctions contre le Venezuela depuis 2017, paralysant ses recettes d'exportation de pétrole, en le coupant des marchés financiers internationaux et en sapant son économie. Tout cela a un impact brutal sur la population vénézuélienne : les dommages causés par ces sanctions doivent, selon des études, être comptés en dizaines de milliers de morts. Le Centre de recherches économiques et politiques (CEPR) a établi à 40 000 le nombre de Vénézuéliens morts des suites des sanctions rien qu'entre 2017 et 2018.
Semblant conscients de la situation, les conseillers de Biden, cités par Bloomberg auraient ainsi qualifié la crise du Venezuela de plus grand défi diplomatique auquel il sera confronté dans l'hémisphère occidental.
Que faire de Guaido ?
Reste le problème du statut de Juan Guaido, autoproclamé président du Venezuela et reconnu comme tel par les Etats-Unis de Trump et leurs alliés. L’une des questions les plus épineuses pour Biden serait, selon Bloomberg, de savoir comment il abordera la revendication de l'opposant.
Après les élections législatives du 6 décembre, les chavistes ont obtenu une majorité des sièges et Guaido qui a boycotté l'élection perdra son mandat à la tête de l'Assemblée nationale le 5 janvier. Joe Biden prendra lui ses fonctions à Washington deux semaines plus tard.
Toujours selon les trois sources de Bloomberg, l'équipe de Juan Guaido aurait tenté d'organiser un appel avec Biden, «sans succès jusqu'à présent». Joint par Bloomberg, le bureau de Guaido aurait refusé de commenter la question.
De plus en plus isolé au sein de l'opposition vénézuélienne, Juan Guaido fait même l'objet de vives critiques en interne. L'ancien candidat à la présidentielle Henrique Capriles qui s'était présenté contre Hugo Chavez en 2012 et contre Maduro en 2013 a récemment critiqué Guaido, affirmant que le mouvement anti-Maduro manquait d'un leader efficace, tandis qu'Henri Falcon, qui s'est présenté contre Maduro en 2018, a fustigé le boycott de l'opposition.
Nicolas Maduro a félicité Joe Biden pour sa victoire. Il a déclaré que malgré un «champ de mines» laissé par Trump, il était prêt à travailler avec la prochaine administration. Mais il a dit avoir cependant peu d'espoir pour de grands changements, compte tenu du bilan d'Obama sur le Venezuela.