«On entend que la langue française est en déclin au Québec. J’ai besoin de le voir pour le croire», déclarait le 13 novembre 2020, en anglais, la députée canadienne Emmanuella Lambropoulos, représentant la circonscription québécoise de Saint-Laurent, sous les couleurs du parti libéral du Canada. Propos pour lesquels elle s'était alors rapidement excusée, le lendemain, assurant qu'elle aimerait «aider à trouver des moyens de protéger davantage la langue française».
Episode pour le moins révélateur d'un phénomène qui touche la province québécoise en amont d'un projet de réforme de la loi canadienne sur les langues officielles qui devrait être présenté courant 2021.
Au Québec, la langue française face au défi
«Le déclin annoncé du français au Québec déchaîne les passions», a ainsi titré le Courrier international le 1er décembre, rapportant plusieurs événements de tension à ce sujet. «Je sens que nous sommes au bord d’une crise», a déclaré à La Presse, quelques jours plus tôt, la ministre canadienne des Langues officielles, Mélanie Joly. «La question de la langue au Québec est fondamentale. Et on doit tout faire pour la protéger», a-t-elle assuré.
«Ça va beaucoup plus vite que je croyais», déclarait de son côté Marc Termote, démographe à l’Office québécois de la langue française (OQLF), cité le 22 novembre par Métro, au sujet du déclin du français à Montréal, la ville la plus importante du Québec. «Selon l’expert, la donnée la plus parlante concerne le pourcentage de personnes qui parlent prioritairement le français à la maison, puisque c’est là que les enfants apprennent leurs premiers mots. [...] Selon Statistique Canada, seulement 53,7% des résidents de l’agglomération de Montréal discutaient avant tout en français à la maison en 2016. Cinq ans plus tôt, c’était 54,4%», un pourcentage qui continue de «baisser très rapidement», a affirmé le démographe cité par le quotidien gratuit.
«La population québécoise a vraiment pris acte cet automne du déclin du français au Québec et en particulier à Montréal. Ce déclin s’est installé il y a près de 15 ans. Le gouvernement précédent, libéral, négligeait cette situation et balayait le tout sous le tapis», estime pour sa part le ministre de la Justice du Québec, Simon Jolin-Barrette, dont un entretien avec le magazine Marianne a été publié le 1er décembre.
Les Québécois ont le droit, dès leur naissance et jusqu'à leur décès, de vivre en français au Québec
Appartenant à la coalition de centre droit «avenir Québec», qui défend le nationalisme québécois, l'interdiction du port de signes religieux aux fonctionnaires en position d’autorité ou encore la réduction du seuil d'immigration, Simon Jolin-Barrette entend actualiser, afin de «la renforcer», la Charte de la langue française.
«Les Québécois ne sont pas toujours servis en français dans les commerces. Il arrive que l’on exige une autre langue que le français pour au moment de l’embauche ou pour obtenir une promotion au sein d’une entreprise alors même que cette dernière ne fait pas affaire avec l’étranger. Ce n’est pas normal. Les Québécois ont le droit, dès leur naissance et jusqu'à leur décès, de vivre en français au Québec, sans avoir à utiliser une autre langue», déclare-t-il encore dans les colonnes de Marianne.