Près de 20 ans après les attentats du 11-Septembre, les Etats-Unis vont réduire le nombre de leurs soldats en Afghanistan et en Irak à la mi-janvier 2021, tenant ainsi une promesse faite par le président américain Donald Trump qui avait promis en 2016 de mettre un terme aux «guerres sans fin». Le nouveau ministre américain de la Défense par intérim Christopher Miller a en effet annoncé le 17 novembre qu'environ 2 000 militaires se seront retirés d'Afghanistan le 15 janvier, et 500 autres auront quitté l'Irak pour ne laisser que 2 500 soldats dans chaque pays.
D'ici mai, le président Trump espère ramener tous les militaires en sécurité
Cette décision reflète le souhait du président américain de «mettre fin avec succès et responsabilité aux guerres en Afghanistan et en Irak et de ramener nos courageux soldats à la maison», selon Christopher Miller. Son prédécesseur Mark Esper, récemment limogé, plaidait lui pour le statu quo, comme d'autres responsables militaires opposés à un retrait tant que la violence ne diminue pas sur le terrain.
«D'ici mai, le président Trump espère ramener tous les militaires en sécurité», a pour sa part fait savoir le conseiller de la Maison Blanche pour la sécurité nationale, Robert O'Brien.
L'Afghanistan pourrait «redevenir une base pour les terroristes internationaux», selon Jens Stoltenberg
D'après le Pentagone, près de 7 000 militaires américains sont morts et plus de 52 000 ont été blessés depuis le lancement des offensives militaires en Afghanistan en 2001 puis en Irak deux ans plus tard.
Le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, avait estimé le 16 novembre que les Etats-Unis «abandonneraient» leurs alliés en cas de retrait prématuré, ce qui «ravirait les personnes qui nous souhaitent du mal», selon Mitch McConnell, pourtant un allié de Donald Trump.
Le sénateur Jack Reed, membre démocrate de la commission des forces armées, a quant à lui dénoncé «une approche à courte vue [qui] n'apportera pas la paix et qui plus sûrement menacera l'Amérique».
Le secrétaire général de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), Jens Stoltenberg, a averti que l'Afghanistan pourrait «redevenir une base pour les terroristes internationaux» en cas de retrait des quelque 12 000 soldats de l'Alliance, dont moins de la moitié sont américains.
La France voit d'un mauvais œil le retrait US, les Taliban afghans évoquent une «bonne avancée»
De son côté, la France a estimé que le retrait d'une partie des troupes américaines serait une mauvaise idée. Interrogé sur RMC et BFMTV le 13 novembre à propos de ce qui n'était à ce moment qu'une éventuelle accélération du retrait des troupes américaines d'Afghanistan, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a répondu au journaliste Jean-Jacques Bourdin que c'était «ce qu'il ne faudrait pas faire». «Ce qu'il ne faudrait pas faire non plus en Irak», avait-il poursuivi, affirmant qu'«on se le dira» avec le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo, lors de sa visite à Paris du 14 au 16 novembre.
Ce 18 novembre, le gouvernement allemand s'est dit «particulièrement préoccupé» par l'impact que pourrait avoir la réduction annoncée de troupes américaines en janvier 2021 sur «l'avancement des pourparlers de paix» en Afghanistan. «Nous sommes particulièrement préoccupés par ce que l'annonce américaine pourrait signifier pour l'avancement des pourparlers de paix en Afghanistan», a déclaré lors d'une conférence de presse le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas, soulignant que ce processus ne faisait que commencer. L'Allemagne, qui a 1 300 soldats déployés en Afghanistan et en Irak, a par ailleurs exigé que ce retrait soit coordonné au sein de l'OTAN.
Le nouveau ministre américain de la Défense par intérim a précisé avoir parlé à Jens Stoltenberg et au président afghan Ashraf Ghani.
Al-Qaïda est en Afghanistan depuis des décennies et nous serions idiots de dire qu'ils vont s'en aller demain
«Nous continuons à nous tenir à ses côtés alors que son gouvernement travaille à un règlement négocié pour la paix [avec les Taliban]», a-t-il fait savoir à l'occasion. Et d'ajouter : «On y est allé ensemble, on a changé ensemble, et quand le temps sera venu, on partira ensemble.»
Des pourparlers de paix sont en cours entre les Taliban et le gouvernement afghan, faisant suite à un accord entre Washington et les insurgés qui entérine le retrait des forces américaines d'ici la mi-2021. «Al-Qaïda est en Afghanistan depuis des décennies et nous serions idiots de dire qu'ils vont s'en aller demain», a expliqué un haut responsable du Pentagone cité par l'AFP peu avant l'annonce de Christopher Miller. Et de poursuivre : «La solution est de négocier un partage du pouvoir ou une espèce d'accord selon lequel les Taliban et le peuple afghan peuvent vivre côte à côte en paix.»
De leur côté, les Taliban ont estimé ce 18 novembre que le retrait programmé était une «bonne avancée» qui aidera à mettre fin à la guerre dans le pays. «C'est une bonne avancée et c'est dans l'intérêt des peuples [afghan et américain]», a déclaré à l'AFP Zabihullah Mujahid, un porte-parole des Taliban. «Le plus tôt les troupes étrangères s'en iront, le plus vite la guerre finira», a-t-il insisté.
Les violences n'ont fait cependant qu'augmenter ces derniers mois à travers le pays. Une attaque le 2 novembre contre l'université de Kaboul a fait au moins 22 morts, des étudiants pour la plupart. Elle a été revendiquée par Daesh mais le gouvernement a accusé les Taliban d'en être les instigateurs. Et en Irak, sept roquettes ont visé l'ambassade américaine à Bagdad au moment où intervenait Christopher Miller, rompant plus d'un mois de trêve décrétée par les factions irakiennes pro-Iran.