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Haut-Karabagh : hostilités à la frontière, le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ravivé

Des affrontements ont eu lieu au Haut-Karabagh entre l'Azerbaïdjan et l'entité arménienne autoproclamée de la région. Des morts civils et militaires seraient à déplorer, la Russie a appelé à un cessez-le-feu.

Dimanche 27 septembre

Les Etats-Unis ont exhorté le 27 septembre l'Azerbaïdjan et les forces du Haut-Karabagh, soutenues par l'Arménie, à «cesser immédiatement les hostilités» dans cette région disputée, théâtre des pires affrontements depuis 2016.

Le numéro 2 du département d'Etat américain Stephen Biegun a appelé les deux parties pour les «exhorter à cesser les hostilités immédiatement, à utiliser les moyens de communication directs pour empêcher toute autre escalade et à éviter toute action ou parole inutile qui alimenterait les tensions sur le terrain», selon un communiqué de la diplomatie américaine.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a exhorté le 27 septembre les belligérants à «cesser immédiatement les combats».

Le chef des Nations unies «appelle avec fermeté les parties à cesser immédiatement les combats, engager une désescalade des tensions et revenir sans délai à des négociations significatives», selon un communiqué de son porte-parole Stephane Dujarric.

Les combats ont fait au moins 23 morts, dont sept civils, selon les affirmations des deux parties.

Cinq membres d'une famille en Azerbaïdjan ont été tués par des tirs d'artillerie, a annoncé le procureur général azerbaïdjanais.

«A la suite de tirs d'artillerie [provenant des combattants arméniens du Haut-Karabagh], une famille de cinq personnes a été tuée dans le village de Gachalty», a annoncé le bureau du procureur dans un communiqué.

L'Azerbaïdjan a déclaré le 27 septembre la loi martiale dans le pays ainsi qu'un couvre-feu à Bakou et dans plusieurs autres grandes villes.

«La loi martiale sera introduite à partir de minuit ainsi qu'un couvre-feu de 21h00 à 06h00», à Bakou, dans plusieurs grandes villes ainsi que dans les zones proches de la ligne de front, a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence azerbaïdjanaise, Hikmet Hajiyev.

Le président russe Vladimir Poutine a appelé le 27 septembre à mettre fin aux nouveaux combats meurtriers opposant les combattants du Haut-Karabagh, soutenus par Erevan, aux forces azerbaïdjanaises.

«Il est important de mettre en œuvre tous les efforts nécessaires pour éviter une escalade de la confrontation, mais l'essentiel est qu'il faut mettre fin aux hostilités», a affirmé Vladimir Poutine, cité dans un communiqué du Kremlin, à l'issue d'un entretien téléphonique avec le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian.

Au moins 16 soldats arméniens du Haut-Karabagh ont été tués et plus d'une centaine blessés le 27 septembre lors d'affrontements avec l'armée azerbaïdjanaise dans la région, ont indiqué les autorités de la république non reconnue par la communauté internationale.

«Selon des informations préliminaires, 16 militaires ont été tués et plus de 100 blessés» lors de ces affrontements, a indiqué le ministère de la Défense du Haut-Karabagh, soutenu par Erevan. 

Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a mis en garde le 27 septembre contre l'ingérence «agressive» de la Turquie dans les combats en cours entre les forces azerbaïdjanaises et la région séparatiste du Haut-Karabagh, soutenue par Erevan.

J'appelle la communauté internationale à utiliser tous les moyens existants pour empêcher l'ingérence turque

«J'appelle la communauté internationale à utiliser tous les moyens existants pour empêcher l'ingérence turque, qui peut déstabiliser une fois pour toute la région» du Caucase, a-t-il déclaré dans une adresse télévisée, exprimant son inquiétude face au «comportement agressif» d'Ankara en soutien à Bakou.

Dans un discours prononcé le 27 septembre et retranscrit sur le site officiel du Premier ministre arménien, Nikol Pachinian a fustigé la «guerre déclarée» par l'Azerbaïdjan au «peuple arménien». «C'est une guerre contre notre indépendance, notre liberté et notre dignité. Le peuple arménien est prêt pour cette guerre», a-t-il ajouté.

«La dictature de l'Azerbaïdjan est devenue l'otage de sa propre politique anti-arménienne et tente aujourd'hui de justifier ses propres promesses de propagande pour résoudre le conflit du [Haut-]Karabagh par des moyens militaires», a-t-il fait valoir, précisant : «La République d'Arménie, qui est signataire de l'accord de cessez-le-feu, prendra les mesures nécessaires dans les arènes politique, diplomatique et militaire pour assurer la sécurité du peuple du Haut-Karabagh et imposer la paix à l'ennemi.»

«J'attire l'attention des Etats coprésidents du Groupe de Minsk de l'OSCE et de l'ensemble de la communauté internationale sur la gravité de la situation. Le déclenchement d'une guerre à grande échelle dans le Caucase du Sud, dont nous sommes maintenant au seuil, pourrait avoir les conséquences les plus imprévisibles. Elles pourraient dépasser les frontières de la région et atteindre une échelle beaucoup plus grande, menaçant la sécurité et la stabilité internationales», a-t-il enfin conclu.

L'Azerbaïdjan a annoncé avoir conquis le 27 septembre une demi-douzaine de villages sous contrôle arménien lors de combats le long de la ligne de front de la région sécessionniste du Haut-Karabagh, informations démenties par son ennemi arménien. «Nous avons libéré six villages, cinq dans le district de Fizouli, un dans le district de Jebrail», a indiqué à l'AFP un porte-parole du ministère azerbaïdjanais de la Défense.

Selon l'agence russe Interfax, l'Arménie a démenti les affirmations azerbaïdjanaises. «La déclaration du ministère de la Défense de l'Azerbaïdjan sur la conquête de six localités ne correspond pas à la réalité. Cette information relève de la provocation», a indiqué une porte-parole du ministère arménien de la Défense.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a promis le 27 septembre un soutien total à l'Azerbaïdjan et appelé l'Arménie à «cesser son agression», à la suite des violents combats au Haut-Karabagh.

«Le peuple turc va soutenir nos frères azerbaïdjanais avec tous nos moyens, comme toujours», a déclaré le président turc sur Twitter. Il a accusé la communauté internationale de ne pas avoir «réagi de manière suffisante, comme il le fallait» à ce qu'il a qualifié d’«agression» de l'Arménie.

Le ministre turc de la Défense a affirmé le 27 septembre qu'Ankara allait soutenir l'Azerbaïdjan «avec tous ses moyens» et appelé l'Arménie à «cesser son agression», à la suite des violents combats au Haut-Karabagh.

«Nous allons soutenir nos frères azerbaïdjanais avec tous nos moyens dans leur lutte pour protéger leur intégrité territoriale», a déclaré Hulusi Akar dans un communiqué.

«La plus grave menace à la paix et à la stabilité dans le Caucase est l'agression menée par l'Arménie, et elle doit cesser cette agression qui risque de mettre le feu à la région», a-t-il ajouté.

Cité par l'agence TASS, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a lui aussi appelé à la désescalade. «Selon les informations disponibles, la situation dans la zone du conflit du Haut-Karabagh s'est fortement dégradée [...] Nous appelons les parties à cesser immédiatement le feu et à entamer des négociations afin de stabiliser la situation», a fait savoir le service de presse du ministre, selon la même source.

Sur Twitter, le président du Conseil européen, le Belge Charles Michel, a appelé à ce que «les actions militaires cessent [...] afin de prévenir une future escalade». «Un retour immédiat aux négociations, sans conditions, est la seule voie à suivre», a-t-il ajouté. 

Dans un communiqué mis en ligne sur le site du Quai d'Orsay le 27 septembre, la diplomatie française a expliqué être «préoccupée par les affrontements d’ampleur en cours au Haut-Karabakh et les informations faisant état notamment de victimes parmi la population civile». D'après le document, la France «appelle à cesser immédiatement les hostilités et à reprendre le dialogue».

«En sa qualité de coprésidente du groupe de Minsk, la France, avec ses partenaires russe et américain, réitère son engagement en vue de parvenir à un règlement négocié et durable du conflit du Haut-Karabagh, dans le respect du droit international», est-il encore précisé.

Tôt le 27 septembre, de violents affrontements ont éclaté au Haut-Karabagh entre les forces d'Azerbaïdjan et celles de l'entité arménienne autoproclamée de la région. Soutenu par l'Arménie, le Haut-Karabagh est une région peuplée majoritairement d'Arméniens, ayant fait sécession avec l’Azerbaïdjan, mais toujours reconnue internationalement comme faisant partie de ce pays. 

«Tôt ce matin, la partie azerbaïdjanaise a lancé des bombardements tout au long de la ligne de contact. Ils bombardent aussi Stepanakert [la capitale], nous appelons la population à se mettre à l'abri», a fait savoir le président de la république autoproclamée, Arayik Harutiounian, sur sa page Facebook.

De son côté, le ministère azerbaïdjanais de la Défense a, dans un communiqué repris par l'AFP, assuré avoir lancé une «contre-offensive sur toute la ligne de front [afin de] mettre fin à des activités militaires des forces armées de l'Arménie et assurer la sécurité de la population civile».

D'après Chouchane Stepanian, porte-parole du ministère arménien de la Défense, toujours citée par l'agence de presse hexagonale,  «deux hélicoptères et trois drones de l'Azerbaïdjan» ont été abattus par les forces arméniennes.

Dans son communiqué, le ministère azerbaïdjanais de la Défense a de son côté affirmé qu'un seul hélicoptère avait été abattu et que son équipage était sain et sauf.

«Des morts et des blessés ont été rapportés parmi les civils et les militaires», a souligné la présidence azerbaïdjanaise, repris par l'AFP, alors que le médiateur public du Karabagh a évoqué, selon la même source, des «victimes civiles». L'Arménie a quant à elle fait savoir qu'une femme et un enfant avaient été tués.

Loi martiale et mobilisation générale

Les sécessionnistes du Haut-Karabagh ont pour leur part décrété «la loi martiale et la mobilisation générale», tandis que le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a fait savoir, selon l'agence russe Interfax, que les forces sécessionnistes et arméniennes «résistent avec succès» à une attaque adverse.

La Turquie et la Russie réagissent

Un porte-parole du président turc Recep Tayyip Erdogan, allié de Bakou, a dénoncé sur Twitter une «attaque de l'Arménie contre l'Azerbaïdjan», accusant Erevan d'avoir attaqué des «localités civiles».

De son côté, Moscou a appelé dans la matinée du 27 septembre «à un cessez-le-feu immédiat» et à la mise en place de pourparlers entre les deux parties.

Cette région disputée a été le théâtre d'une guerre au début des années 1990 qui a fait 30 000 morts. Depuis lors, les autorités azerbaïdjanaises veulent en reprendre le contrôle, par la force si nécessaire. Des pourparlers de paix sont dans l'impasse depuis de longues années et des combats opposent régulièrement sécessionnistes et Azerbaïdjanais, mais aussi Erevan et Bakou. En 2016, de graves heurts avaient failli dégénérer en guerre au Haut-Karabagh, et des combats meurtriers ont aussi opposé en juillet 2020 Arméniens et Azerbaïdjanais à leur frontière nord.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev avait menacé le 25 septembre l'Arménie de représailles en raison de son «comportement agressif». Bakou a profité de ses immenses réserves de pétrole pour dépenser sans compter en matière d'armement ces dernières années. L'Azerbaïdjan peut aussi compter sur le soutien sans faille du président turc Recep Tayyip Erdogan, qui accuse régulièrement l'Arménie d'être une menace pour la stabilité du Caucase.

L'Arménie, bien plus pauvre, est plus proche de la Russie, qui y dispose d'une base militaire. Erevan appartient aussi à une alliance politico-militaire dirigée par Moscou, l'Organisation du Traité de sécurité collective, le Kremlin se positionnant en arbitre dans la région. Depuis près de 30 ans, il est parvenu à y éviter une guerre ouverte.